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Rêve d'Ivresse
Un monstre en promenade
 
Thaïs d'Ascara

Kil'dé  
Le Matal 28 Otalir 814 à 11h39
 
*** Une pensée très floue, embrouillée. Il semble que le lanyshsta qui l'émet n'en est pas tout à fait maître. Paradoxalement, la télépathie est extrêmement riche, déliée de toute notion de maîtrise ou de conceptualisation. Dans un état de conscience, nul doute que son émetteur ne pourrait pas reproduire ce genre de bulle onirique.

Parallèlement, tout se mêle ici. C'est un joyeux fouillis où tout est balancé pêle-mêle sans grand souci de compréhensibilité pour le public -à dire vrai, le penseur semble ignorer avoir un public...

Le rêve s'étiole très vite, disparaît. Il surgit au milieu de la nuit, intense et coloré mais délicat et fragile. Au matin, il n'en restera probablement rien.

La bulle est commune, même si difficilement accessible -qui de conscient s'y engagerait, à cette heure tardive ?-, mais plus directement liée à un autre lanyshsta, Harvain, que Thaïs a rencontré ce jour et auquel elle a songé avant de s'endormir, à moitié ivre.
***


Je tombe. Je tombe à l’infini, sans fin. Comme dans un puits sans fond. Dans un noir total, je tombe.

Je me mets à courir. Courir sans avancer. Courir sur le vide, courir sur le rien. Je m'épuise mais ne progresse pas.

J’ouvre des portes, des dizaines de portes, qui débouchent sur des successions de lieux. Tous différents. Un désert. Une forêt. Ma chambre. La bibliothèque. L’océan. Notre salon.

Un miroir. Il se fissure à ma simple image.

Je suis un monstre.



Un monstre plutôt pas mal. Je m’admire. J’ai le poil luisant, les crocs bien blancs, les cornes propres. Celle sur mon nez me fait un peu loucher, mais je m'en amuse.

J’ai surtout des griffes plutôt chouettes et une chevelure carrément canon.

Je me promène dans les bois. Je cueille des fruits, je profite du vent dans ma fourrure. Je crois que je suis heureux. Heureuse ?
Ici je n’ai pas de genre.
Je suis un monstre asexué.

Je croise un sanglier fort sympathique, nous parlons quelques temps des lanyshstas. Lui a trois marcassins qui ont muté, il est très inquiet. Je le rassure : moi aussi je suis devenu télépathe et pourtant je n’ai pas foncièrement changé. Je suis toujours cornu, poilu, crochu. Je me sens bien, il ne faut pas s'en faire. Ses marcassins grandiront, iront à l'Université de Kil'dé. Ils ont un bel avenir, allons !
Tout s'arrange toujours.

Je reprends mon chemin. J’ai une sorte de corde dorée qui me permet de me frayer un passage dans la végétation. Je l’agite, je la fais tourner autour de ma tête, et les arbres s’abattent, les hautes herbes plient. La corde semble heureuse de faire ce travail, elle rigole, elle chante.
Ca me va bien. Mes coussinets ne souffrent ni des branches, ni des épines. Je semble voler.

Un oiseau aux jolies couleurs m’insulte. Il a la voix de ma mère. Je lui tire une langue fourchue. Je passe mon chemin.

Lymiria est là, qui tâtonne, à la recherche de sa route. Elle est aveugle, parfaite, désirable. Elle égrène des prédictions de Scylla, de celles que je ne connais pas. Une sombre histoire de huit milles tomates qui s'en vont en guerre contre nos travailleurs hydrauliques. Elle enfouie sa tête dans ma fourrure, ronronne de plaisir. Entre en moi, s'absorbe. Disparait.

Je tombe. Je retombe à l’infini. Dans une obscurité opaque, je tombe.

Et puis..
Je suis sur une plage. Au milieu du sable, une grande bâtisse affiche des couleurs criardes. Des rires en montent. J’entre. C’est un club d’échec.

Je m’assois à une table.
J’attends.


 
Harvain

Kil'dé  
Le Merakih 29 Otalir 814 à 10h23
 
[hrp] suite du sujet lancé ici [/hrp]

Je fais la fermeture comme d'habitude. Premier arrivé dernier parti c'est ma politique. Je finis de faire ma caisse, la soirée était dans la moyenne. Hum…oui, on a tout juste dépassé notre point mort, bien bien bien. C'est le seul moment où je suis vraiment au calme, j'aime ces instants. Les dernières bougies s'éteignent progressivement et j'entends au travers des murs et des fenêtres les quelques bruits provenant de l'extérieur. Il commence à se faire tard et moi je commence à me faire vieux. Ce soir, particulièrement, je me sens fatigué. Je sais que cette histoire de lanyshsta doit jouer. J'ai entendu ces satanées voix toute la soirée et j'ai du faire de grands efforts pour me concentrer et les mettre en sourdine. A cette heure, ça semble plus calme, tout le monde doit dormir forcément. Il me faudra mettre à profit les temps de repos pour m'y entrainer. Je secoue la tête, range le livre de comptes et ferme à clef l'Hermine.

Bonne nuit messieurs. A demain. Dis-je aux deux malabars à l'entrée. Ils m'adressent un petit signe de tête et partent dans une autre direction.

Une trentaine de minutes plus tard, je gravis péniblement les 5 étages pour arriver à mon petit appartement. J'ai un mal de crâne de tous les diables, mais quelle ficherie que cette histoire de télépathie ! Je me change et m'apprête à dormir. Une petite tisane et au lit. Je fais le point sur cette nouvelle journée. Point de force exceptionnelle, pas de mutation anormale, aucune vision nocturne ni la moindre petite amélioration de santé si j'en crois mes lombaires qui grincent autant que ce lit. Hormis cette damnée télépathie, j'ai bien l'impression d'être strictement identique. Et tout ce raffut, cette agitation, ces discussions pour seulement ça ? Je leur donnerai bien volontiers ma télépathie. Les gens qui y parlent sont si mal éduqués Seigneur ! Je suis sûr qu'ils ne repassent pas l'intérieur du col de leur chemise ou qu'ils ne savent pas comment dresser une table correctement. Ah ces jeunes…

Le mal de tête ne s'estompe pas et je mets du temps à m'endormir. Et les choses ne font que commencer…


*** Ambiance ***


T’aurais du feu mec ? me dis le plus naturellement du monde une chouette montée sur un grand bi chromé avec un accent du Kil’sin.

Mais certainement cher ami.



Oh mais oui, pourquoi pas. Un alter égo onirique musclé, moustachu mais mal rasé tenant un lance-flammes comme briquet. Gilet en cuir sans manches, ah tiens, j’ai d’autres armes à la ceinture, ma parole, une vraie boutique d’armement sur pattes. Et les pattes, parlons-en, c’est quoi ces chaussures cloutées même pas cirées avec des semelles surélevées ? Et ce pantalon tâché de boue et de sang. Ah c’est sûr, je ne fais pas partie de la guilde des comptables avec un tel accoutrement.

Oh, une parade. Je crois qu’il me manque les mots pour l’exprimer tellement cela sort de l’ordinaire. Plutôt une impression… Entre la joyeuse confusion, la théorie du chaos personnifiée, des hybridations mathématiquement improbables et sûrement la quintessence de l’incohérence. Je vois passer devant moi un coffre avec plein de petites jambes et là, ce grand squelette qui porte sa faux sur l’épaule comme un mineur porte une pioche après le boulôt. Dans une autre main, il tient une canne à pêche.

Normal.

Où en étais-je ? Ah oui.

J’attrape un batracien qui souffle dans une trompette miniature et le monte à hauteur de visage.

Je cherche la cour secrète des arcanes, c’est dans quel espace vectoriel ?


L’animal continue de souffler dans une trompette d’où s’échappent des marguerites puis me répond.

Tournez tout droit à la prochaine non-intersection et lorsque les poules auront des dents, descendez en haut et voyagez sans vous déplacer.

Il disparait dans un nuage de fumée laissant imprimé dans l’air un « POUF » que j’efface avec un tampon à craie. Je me retourne car après tout, je peux tourner tout droit dans n’importe quelle direction et je me retrouve dans une grande salle. Oh je ne suis pas seul. Aussi loin que porte ma vision, je vois des tables avec à chaque fois deux personnes en train de jouer aux échecs. Enfin par personnes… Ce que j’ai en face de moi prouve que non. C’est la seule place de libre.

Je regarde mes pièces. Je suis intrigué par la reine. Une sorte de grande femme, plutôt jeune en rouge, cheveux roux, chapeau pointu, des flammes dans les mains et qui tire la langue. Les pions sont des hommes, un peu plus vieux, mal coiffés, une sacoche usée, une cape élimée et une bonne paire de bottes. Dans son regard, je lis la trouille.

Je vois mon adversaire, un monstre, plutôt…incongru, un peu moche mais qui fait plutôt penser qu’il aurait raté le partiel de l’épreuve « faire peur aux mômes ».

J’avance un pion peureux.



 
Thaïs d'Ascara

Kil'dé  
Le Merakih 29 Otalir 814 à 14h37
 
Alors oui, forcément, c’est la cacophonie. Entre les canards qui hurlent à qui-mieux-mieux que le hareng n’est pas de première fraîcheur et les loups de la table d’à côté qui commencent à philosopher sur qui du cochon ou de la brique a pondu le dé en premier, on s’y perd un peu.

C’est un bar à tapas, oui ou zut ? Si on ne peut plus jouer de la flûte tranquillement…

Quoi, un club d’échec ? Ah oui, c’est vrai. Tant pis pour les tapas. Je range ma flûte dans le placard à bières.

Je ne parviens à ne me reconcentrer sur ce fichu plateau de jeu que lorsqu’un type s’assoit en face de moi. Je le jauge. Il a l’air d’un dur à cuire. Moustache, biscottos, éraflures. Il a même un lance-flamme. Classique, l’endroit est fumeur et son plafond déjà en feu –un joli feu vert, pas comme les inquiétants feux jaunes qui dessèchent le poil et font de vilaines frisettes.

Bon, il joue. C’est déjà mieux que la plupart des autres participants qui se content de manger les pièces. Je réfléchis. J’hésite. Je prends un air de monstre intelligent.

Si j’avance ma coquillette pour prendre son chou, je vais me faire bouffer la chaussette qui me tient lieu de fou. Dur dur. Je me gratte la tête –c’est drôlement pratique, ces griffes.

L’arbitre commence à me stresser, avec ses coups de sifflet incessants. Soit disant qu’il n’y a plus d’eau dans la Faille, que nous allons tous mourir d’asphyxie si je ne joue pas. Minute, papillon, une partie d’échec est quelque-chose de sérieux ! Je le renvoie d’un regard sur la scène, où il faisait des claquettes quelques secondes auparavant, un trombone vissé dans son bec de corbeau.

Où j’en étais ? Il me semble qu’il y a deux minutes je manifestais pour que la peine de mort par ingurgitation de chocolat s’applique aux gens qui portent plus de trois couleurs d’habits. J’avais fait un peu tâche dans cette lutte complexe mais indispensable, moi le monstre sans culotte. J’espère que cette souris me pardonnera.

Oh, un homme me regarde, assis en face. Il a l’air d’attendre… Ah oui, la partie d’échec ! Nous sommes dans un concours très fermé où tout le monde semble jouer sa vie. A côté, trois vieillards se meuvent au ralenti, mettant quatre jours à déplacer le moindre pion. Des pissenlits les entourent, hurlant de faire attention aux émotions fortes, affolés pour leurs racines.
Pauvres chats.

Je ne réfléchis pas plus. Je lance un regard avisé à mon opposant puis j’avance une pièce d’or et je tente de couler son bateau. Manque de bol, quatre soucoupes s’en retrouvent alignées et le crayon commence à poignarder un pion humanoïde qui émet de drôles d’hurlements. C’est un peu violent, non, comme jeu ?

Je fixe mon adversaire de mes grands yeux jaunes.
C’est bizarre. J’ai l’impression que seul ce monsieur ne change pas.


*** ***


 
Harvain

Kil'dé  
Le Sukra 1 Nohanur 814 à 10h54
 
Je me gratte le dessus de la tête avec mon chalumeau vindicatif. Au passage, je perd quelques cheveux.

Cette manœuvre connue sous le nom du "coup du pot au fleur à vélocité balistique incongrue" est une très vieille technique qu'on enseignait dans les dortoirs d'écoles prestigieuses du pays d'Oz. A moins que ce ne soit lors de cours de guipure ancienne au club des plombiers-chauffagistes ? Diantre, me voilà bien cuit et confit. Quant à ma tête déconfite, ce n'est que le reflet de ma rate au court-bouillon. Si je continue, je vais passer à la casserole sans même un cube or pour assaisonner le tout. La cuisson à point s'il vous plait. Vous n'avez pas de feu, attendez mon brave, j'ai le mien.

Quelle pièce jouer...

Soit je joue mon schmalox parfait en diagonale de la roustate bipolaire pour tenter une attaque sur les flancs ce qui pourrait l'inciter à cuire sa coquillette. Ou alors, je joue ma tondeuse à gazon pour ratiboiser sa ligne de vie. Mais une telle créature a-t-elle une ligne de vie ? Je reste sceptique.

La vie est faite de hauts et de bas. dis-je en claquant des doigts.




Voilà qui va pimenter la serviette.


*** Ambiance ***


A ma droite, je vois un étrange hurluberlu qui se met à courir à une rare vitesse. Sur son chapeau, il y a marqué "MAJE". Etrange, je pensait qu'on y mettait un deuxième J. Alors voyons voir, revenons à nos moutons électriques. Donc si j'avance mon cuirassé en carton, je peux tirer en B8 et toucher sa frégate de bain en forme de canard. Ah non, impossible, j'ai son tartare de hamster en opposition. A moins que je lance mon gnome aux pieds poilus chercher sa babiole unique.

Frelon phosphorescent prend la pièce d'or en (x=4;y=12,9)

Je déplace ma bestiole et saisit la pièce d'or de mon adversaire. Je la fait tourner entre mes doigts puis décide d'ouvrir le papier pour manger l'intérieur en chocolat. Les pièces dorées sont en chocolat, tout le monde sait ça.


 
Thaïs d'Ascara

Kil'dé  
Le Luang 3 Nohanur 814 à 13h35
 
Le… Le… le bigorneau ! Il mange le chocolat. MON chocolat.
Un instant, je me demande si je ne vais pas le croquer tout entier. Après tout, si je mange celui qui a mangé mon chocolat, nous serions à peu près quittes. Mais ce foutu lance-flamme va sûrement avoir un goût très amer. Et je n’aime pas ça : c’est comme le signe, ça donne des rides.
Je me tâte.

Une krolanne à tête de chien passe au-dessus de nous en hurlant l’heure. Crâneuse : moi-aussi, je peux me balancer de branche en branche en petite tenue. Tout ça pour vendre trois saucisses à deux pélicans, honnêtement, ça ne vaut pas le coup.

Mais c’est vrai que l’heure avance. J’ai l’impression que la baraque s’effrite.

Revenons à la partie. Tout n’est pas terminé. Il a laissé l’aiguille à tricoter à découvert et ne semble pas avoir remarqué que mon vernis à ongle est embusqué dans le recoin de droite. Je plisse les yeux. Je me frotte les mains. Puis je hulule et à ce signal mon cookie double pépite s’élance telle une balle pour s’en venir couper en deux son joueur de cornemuse. Ce dernier meurt dans un bruit lent et pitoyable. Tous les poissons alentours applaudissent à s’en rompre les nageoires.

Je relève le menton, pas peu fier de mon coup, et invite mon adversaire à élever un peu le niveau -sans quoi ces cochons font finir par s'endormir. Moi-même je baille un peu.

Dormir ? Quelle douce, douce idée...

Tout d’un coup, il me semble que nous tombons. Pas beaucoup, mais nous tombons. Tout tombe ensemble, de telle sorte que ce n’est pas flagrant. Je murmure :


Vous… vous avez senti ?

C’est redevenu très calme. Les murs ont fondu –forcément, avec ce froid. Nous sommes au milieu d’un grand château, avec des grosses pierres en guimauve colorée. Un lustre en caramel nous éclaire d’une clarté blafarde qui ne met pas du tout mon teint poilu en valeur. Je suis très contrarié.
L’échiquier est toujours là.

Autour de nous, le public –jusque-là majoritairement composé d’animaux- semble avoir quelque peu changé…

Sommes-nous… en terrain hostile ?


*** ***


 
Harvain

Kil'dé  
Le Luang 3 Nohanur 814 à 20h42
 
Même sous ma forme onirique, je ne peux me retenir de hausser un sourcil métaphorique. Voilà bien un coup de maître. Quelle partie bien étrange ne trouvez-vous pas ? Hein ? Oh oui, indubitablement. N'est-ce pas ? Ce cookie double pépite n'aurait pas pu vaincre mon cornemusier dans la réalité ! A moins qu'il ne soit en réalité un cookie lancé par un ecclésiastique de niveau 12 un soir de pleine lune enroulé dans du jambon. C'est ce qui me fait penser que ce que j'ai sous les yeux n'est pas la réalité.

Petit tremblement.

Mais alors, c'est quoi ?

Et petit à petit, une idée fait son chemin dans ma tête...

Et si.....

Soubresaut tellurique.

...c'était...

Secousse sismique.

...un..rê....


*** Ambiance ***


Si pour mon adversaire poilu ce n'est qu'une légère dégringolade, je vis la chose d'une façon bien différente...



Les murs, dans un vacarme silencieux explosèrent vers l'extérieur. Des plaques entières s'envolèrent avec fracas, projetées au loin, laissant apparaître un temps d'orage annonciateur d'une fin du monde. C'était comme contempler la création de l'univers au travers d'un kaléidoscope après avoir pris un acide mal dosé. Des éclairs zébraient le ciel avec une telle puissance que l'image restaient incrustées au fond de ma rétine. Puis le toit s'ouvrit de la même façon qu'on ouvre une boite de sardine de la taille d'un immeuble. Et c'était nous les sardines. Les carreaux du carrelage dégringolaient lentement mais sûrement selon le classique effet dramatique qui se rapproche à toute vitesse vers notre position.

J'empoigne mon lance-flammes et commence à pomper à toute vitesse. Je ne sais pas pourquoi mais je me disais que ça manquait un peu de flammes dans tout ça. Les dernières plaques s'effondrent et moi avec. S'en suit une chute qui dura une infinité de fraction de seconde, à moins que ce ne soit l'inverse, j'ai un doute, ma montre gousset indiquait "moi aussi je veux une réduction du temps de travail". Pendant ma chute, autour de moi, je voyais les autres joueurs tomber, certains avec plus ou moins d'inquiétude ou de style. J'en vois les jambes croisées et les bras derrière la tête faire une sieste, un livre sur le visage. J'entends un hurlement, il me faut plusieurs minutes pour comprendre qu'il s'agit de ma propre voix.

Une chute ne fait pas mal. Le sol par contre...

Je fouille dans mes poches à mesure que je vois une grande étendue de terre se rapprocher dangereusement de moi. Je sors un canard jaune qui fait "miaou", une paire de lunettes environ 8 fois trop grandes pour moi, une peluche en forme d'ampoule électrique avec des yeux globuleux, un cintre, une photo de pin up, un fer à repasser et trois pièces de monnaie.

Ca va faire mal !

Nouveau déchirement de l'espace. Au sens propre ou au sens figuré me demanderez-vous ? Eh bien au sens propre figurez-vous. Comme une feuille de papier qu'on déchire mais à l'échelle de l'espace qui m'entoure. Quoi de plus logique.


Senti quoi ?

Me revoilà dans une pièce étrange. Oh un château, oh des pierres guimauves, oh un lustre en caramel. Logique. Par contre, nous avons un public envahissant. Je claque des doigts et mon lance-flammes se transforme en couteaux de cuisinier.

Pour votre santé, mangez 5 fruits et légumes par année bi-textile ! (les années où on ne porte que deux vêtements pour les ignares qui ne connaissent pas les mots compliqués dépassant 2 syllabes)

Sourire sardonique sur mon visage.


Qui c'est que je taille dans le julienne ?

La plupart s'enfuient. Déçu, je range le matériel et me reconcentre sur le plateau. Alors voyons, il s'agit d'être sérieux. Ca va bien cinq minutes de voir et faire des bêtises, les échecs sont un jeu sérieux. Ce n'est pas pour les guignols qui écrivent des bêtises. De l'art, de la discipline et du style pardi !

Gobelet à stylos prend cocotte minute et échec.



 
Thaïs d'Ascara

Kil'dé  
Le Matal 4 Nohanur 814 à 13h10
 
J’ai… j’ai comme une soudaine attirance pour ces légumes et ces fruits. Leurs petits yeux mignons, leurs sourires en coin, leurs pétales aguicheuses… Cette mandarine me fait de l’œil, je ne rêve pas ? Et que dire de cette grande asperge qui ondule comme une catin ?
J’ai beaucoup de mal à me concentrer. Je jette un regard désapprobateur à mon adversaire alors qu’il effraye ces pauvres, pauvres petites créatures.

Mes mignonnes.
Mes toutes douces.
Mes choubidoubidoumes.

Venez voir maman…


*** ***


AH ! Je ne vois même pas venir le coup fatal. Son gobelet pulvérise ma cocotte et expose mon ampoule qui perd totalement la pêche. Je me sens désemparé, je me sens nu, je me sens bête –un pois-chiche à la place du cerveau ! Je manque de défaillir : je suis si prévisible, mon jeu ne vaut pas une cacahuète ! Vite, vite, je rabats un obélisque rouge tomate en première ligne et je lui intime de chanter un hymne à l’amour. Qu’il fasse le poireau, ça lui fera les pieds. La pitié, il n’y a plus que ça de vrai dans les situations désespérées. Pendant ce temps, tapis dans l’ombre d’une case noire particulièrement profonde, mon hibiscus attend son heure. Lui et moi sommes certains que ce foutu Roi adverse et son chapeau melon finiront par ramener leur fraise à portée de crocs : il faut les voir se fendre la poire en racontant des salades, comme si tout était déjà biné. Ils me courent sur le haricot, ces deux hurluberlus ! Vivement que mes pièces leur mettent une bonne châtaigne.

Pendant que mes petits soldats se mêlent de leurs oignons, je me baisse pour tapoter le bulbe à deux ou trois légumes en flattant leurs jolies couleurs. Sans trop y prêter attention, je saisis et grignote du bout des dents une ardente carotte. C’est plein de soleil, ces petites bêtes.
Bonheur...

Tiens, j’ai l’impression que tous mes nouveaux amis me regardent bizarrement. Est-ce parce-que moi, monstre énorme, poilu et crochu, je mâchouille avec lenteur et délectation leur copine ? Les gens s’effrayent d’un rien, de nos jours…



 
Harvain

Kil'dé  
Le Julung 6 Nohanur 814 à 11h08
 
Qu’on lui coupe la tête !! glapit ma reine rouge sur l’échiquier tridimensionnel.

Je baisse la tête vers la pièce sautillante qui lève son visage rougeaud vers moi et je fronce les sourcils. D’une petite voix, elle reprend, timide.


…s’il vous plait ?

Je me redresse et remarque que mon cigare est en fait un concombre. Ca tombe bien, j’avais un petit creux. Je mâchonne un petit bout, pensif et me dit que ça a le goût de fraise. A l’orée de ma vision, je discerne une tomate qui vient de se faire marcher dessus. D’autres s’approchent d’elle, solennellement, portant un cercueil en forme de bouteille. Le cadavre légumineux glisse à l’intérieur, je lis une étiquette…A.R.O.M.A ou A.M.O.R.A. ? Plus loin, je vois une agression, une patate se fait littéralement tailler en morceaux, une cure d’amaigrissement un peu extrême à mon goût. Une autre patate vient de se faire littéralement écraser par une pastèque ! Ses semblables expriment leur surprise en criant « Purée ! »

Où sommes-nous tombés en fait ? Dans la cuisine de l’univers ?

Un groupe de fruits s’indigne à mes pieds devant un nouveau venu « arrête de ramener ta fraise » disent-ils à une framboise accompagnée dudit fruit. Les siamois cerises qui partagent la même tige ont toujours un avis divergent. J’entends une grappe de raison qui traine un long couteau « et si on allait se fendre la poire ? », j’en connais une qui ne partageait pas le même avis en voyant la vitesse à laquelle elle roulait se cacher derrière un ananas.



 
Thaïs d'Ascara

Kil'dé  
Le Vayang 7 Nohanur 814 à 13h47
 
La hache fuse. Les fruits et les légumes frémissent en se couvrant leurs petits yeux. Une traînée rouge déchire le silence, tâche mon pelage, se répand partout. La tour se pulvérise, mon Roi tombe, décapité, puis se liquéfie. Le bruit est horrible. Toutes mes pièces explosent une à une en tentant de fuir de façon désordonnée sur le plateau.
Apocalypse.

Le lustre vacille et clignote, le château tombe en ruine. Nous nous enfonçons dans une mer de chocolat qui monte à n’en plus finir.
Nous allons finir noyés.
Tant mieux.

La partie est terminée.

Je tente de sauver le maximum de mes nouveaux amis : je les mets dans ma gueule, le plus possible, pour les protéger du liquide corrosif. Je mâche pour faire de la place, même.
Ca semble les effrayer. Certaines tomates deviennent blanches, se mettent sur le dos et ne bougent plus. Celles-là je les aplatis pour qu’elles rentrent mieux.
Je chope un poireau, je le balance en l’air pour qu’il attrape une pierre mais il se contente de s’écraser au plafond.
Je balance un pote chou-fleur vers le lustre mais ce bêta passe en plein dans les bougies et prend feu.
Que dire du pamplemousse que je coupe en deux pour lui permettre d'optimiser ses chances de fuite ?
Bah. Je prends une clémentine que je plante sur l’une de mes cornes, en hauteur. Elle devrait être contente mais n’arrête pas d’agoniser en parlant d’idiot d’empaleur.

Les autres…

Si vous ne faites pas confiance, nous allons au massacre !
Revenez ! Revenez !

Je cours au plafond, j’agite les pattes. Je marche sur l'un ou deux d'entre eux.
Il y a comme une violente lumière qui me transperce.
Je me… réveille ?
Impossible !

J’ai juste le temps de pointer un doigt griffu vers le gagnant de la partie et de grogner :
-Nous nous reverrons, mon petit, je veux ma revanche !

Et tout disparaît.


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