Cal : Je suis rentré !

Il y a toujours quelqu'un pour entendre. C'est ça, la condition de Lanyshta. Volent, volent, volent, petites pensées ! Quelqu'un finira bien par t'attraper !

Fais attention. Un jour, elles t'échapperont.

Ah ! Une question pertinente ! Qui suis-je ! Je suis... Je suis...

Un détail de l'Histoire. C'est ça, un insignifiant détail de l'histoire. Tout comme toi... Mademoiselle ? Cette fraicheur de pensée, oui, oui, mademoiselle. Un détail de l'Histoire, ayant par hasard accroché un fil tendu. Consciemment ? Inconsciemment ? Quelle importance, ce qui est fait est fait ! Vous savez tout, je ne sais rien. A qui est ce que je m'adresse ? Ai-je tapé juste ?

Oh ! Oh je prends ! Permets que je note, alors ! Car je ne vole rien, j'emprunte, et je trace les mots sur un carnet ! Car je suis...

Cal. Cal le metteur en scène, Cal le producteur, l'humble découvreur de talents, scénariste et baladin. Je ne vole rien, je file au gré du vent ou des pensées. Et ma foi, c'est de bien belles pensées ! Lépidoptériste, vous dites ? Très beau mot, vous le définiriez comment ? Aide moi, contribue à l'Art ! Je te promets qu'il n'y a rien de criminel là-dedans !

Un drame ? Un drame ! Elle a dit un Drame ! Ha ! Mais la vie, mademoiselle, c'est l'inverse ! La vie est une Comédie, une vaste blague qu'il convient d'exploiter, dont il convient d'explorer les ficelles ! La vie est une Comédie, et je vais vous dire pourquoi : on ne se souvient jamais longtemps des morts. Le Drame, le vrai Drame, c'est lorsque la mort est plus mémorable que la vie. Si seule la péripétie compte, on trouve toujours à en rire !

Bien sûr que tu contribue à mon Art. Toute personne y contribue, mais j'avoue que... J'aimerai que ta contribution soit particulière. Continue de parler. Tes insultes ne sont pas vraiment les plus utiles face aux lames que tu trouveras dans les Dessous, mais quel lyrisme, quelle originalité ! Non, vraiment, je t'assure !

Sommes nous réellement originaux ? Les plus grands écrivains ne font-ils pas que réécrire ce que d'autres ont écrit avant lui ? Et, dans ce cas, ces livres que tu as lu ne sont-ils pas une bonne source passée pour de bons écrits futurs ? Tu apportes à ma plume les livres, là où je ne peux qu'apporter mon expérience de la vie ! Mais dis moi plus sur... Non, attends.

Non, attends, Tu insultes comme une enfant mais tu penses comme une adulte. De toute évidence, tu n'as pas été élevé dans les dessous. Je ne sais pas comment fonctionne nos pensées mais si nos langues sont proches, peut-être que le rapprochement est inévitable. Une riche Kil'Sinite ? Ai-je bon, ma Muse temporaire ?

Si pas riche, bonne éducation. Personne n'est riche au Sin, mais nous savons tous ce que personne veut dire. Pas de Dessous, enfin, je veux dire, tu ne viens pas DES Dessous, ou ton vocabulaire et ta culture serait bien plus limités, riche ou pas riche.

Si, si, je suis du Sin. C'est pour cela, je pense, que nos pensées peuvent s'accorder avec tant d'aisance. Si tu avais rêvé comme un Dara, peut-être serai-je passé à côté de la mélodie. Qui sait ? C'est un phénomène fascinant en vérité.

Joli... D'un livre, de toi ? Quelle importance. L'Etrangère a effectivement dans ses yeux un éclat qu'on ne retrouve nulle part. Non attends. A nul autre pareil. L'Etrangère a dans ses yeux un éclat à nul autre pareil. Ca sonne... Ca sonne... Faux. Drôle, tout ce lyrisme et ces mots sonnent faux, et creux, une fois opposés à la vie. Comment écrire si tout ce que l'on peut écrire n'est que lyrisme pompeux et fausse poésie ? Hein ? Qu'est ce que je peux faire moi, modeste écrivain, que puis-je opposer à la beauté de la Nature si ce n'est un ton empesé ?

Non pas la nature, mademoiselle, la Nature, avec un grand N. Celle que l'on trouve dans les cris, les rires et les larmes de la cité et de ses habitants, pas le caractère bucolique des choses, pas ça, non ! Je te parle du fait de respecter le Vrai, non pas le vraisemblable. Même la nature, celle des forêts et des collines, n'est qu'une image formée par nous-mêmes ! Une forêt, c'est des insectes, de la vie et un combat pour la survie, de la mousse, de la saleté, de la poussière, pas un souffle de vent passant gracieusement dans les branches ! Pas seulement un souffle de vent. La Nature, avec un grand N, c'est un grand tout, avec ce qu'il y a e plus beau et de plus laid. Ce n'est pas majestueux, car nous accordons la majesté à ce que nous pensons digne de l'être et... Et...

Excuse moi, je parle, je parle, je parle, mais... Quel es ton nom, douce muse ? Car sans nom, impossible d'inscrire sur mes registres qui fut ma parolière ! Quand à mon ailleurs, il est partout. Pas au Sin pour l'instant. Bientôt, si tout va bien ! Bientôt si les Kils le veulent.

Hein ?

Oui. Oui oui oui, bruyant, euh... Mais réussi, je suppose. Tu ne m'en voudras pas si j'offre à ma muse un cadeau plus matériel.

Ma muse, parfaitement ! Car tel est désormais ton titre, celui d'une dame capable de m'inspirer quelques vers, tels que...

Tels que ceux qui viendront lorsque l'inspiration frappera à la porte. Il faut la laisser venir, je suppose. Et si tu désire garder ton nom secret, voix parmi les voix, qui suis-je pour te persuader ? Mais je finirai bien par le saisir au vol, une fois de retour au bercail. Et le capturer ainsi ne le rendra que plus précieux encore. N'est-ce pas ? Les noms ont un pouvoir. On ne donne pas d'ordre à une personne sans nom. On ne peut partager avec une personne qui n'a pas d'identité, on ne peut savourer la compagnie de celle qui renonce à son patronyme. Ce nom, mademoiselle, m'apporterait un bien grand pouvoir, ce ne serait que justice après t'avoir donné le mien.