Elle n'avait pas atteint le coin de la rue qu'une perle rare vint faire ses « présentations » en règles. Du genre à vous rappeler pourquoi les sacrifices sont parfois indispensables pour la survie du groupe. Du genre a vous rappeler ce qu'est la pitié... Et a vous rappeler a quel point ce concept peut être... gênant. Du genre, surtout, à exciter vos envies de meurtres lorsque vous êtes un peu soupe au lait. Le genre de personnes apte à la convaincre que l'extermination des Lanyshta pourrait être bénéfique a la société dans son ensemble.
Un autre jour elle se serait peut-être retenue. Elle se serait peut-être interdit de formuler publiquement une pensée pareille, hésitant quand à l'image renvoyée de sa personne auprès des autres... Mais aujourd'hui elle n'était tout simplement pas d'humeur. Sans compter que l'exercice rentrait parfaitement dans le cadre de ses recherches actuelles. La première étape serait donc de formuler une pensée bien mielleuse vouée a convaincre l'imbécile de participer à une aventure dont les issues seraient presque forcément bénéfiques.
Soit il survivait et les autres lanyshta auraient peut-être réussi a intégrer trois sous de jugeote dans son esprit. Soit il y passait et, non contente d'avoir servie de diversion pour permettre éventuellement à certaines personnes autrement plus intéressantes de s'en tirer, sa mort débarrasserait son espace mental...
Deuxième étape s'assurer des interprétations possibles liés a un tel message. Mieux vaut paraître cruche que fondamentalement méchante au premier abord... Mais le cynisme se devait rester visible aux auditeurs avisés... Bien. La formulation était ce qu'elle était mais elle devrait faire l'affaire. A noter qu'une prochaine fois, pour une pensée réellement importante et dépassant les quelques phrases elle pouvait avoir intérêt a la rédiger sur papier en amont.
Troisième et dernière étape : la forme. S'appliquer sur le ton pour le rendre aussi doux que possible. Maîtriser les hésitations, les intonations. Pour un premier essai elle se contenterait de parler assez franchement tout en ayant un « ton » (noter qu'un nom plus adapté pourrait être utile) globalement amical et surtout dépourvu de mépris. Il serait intéressant et utile de s’entraîner là dessus. En revanche si certaines expérimentations pouvaient sans peine être publiques... Certaines autres... Il serait dommageable d'avertir les gens a ce propos. Elle perdraient beaucoup de leur usage. Il faudrait réfléchir a comment faire à ce propos.
Son message déposé sur le fil de pensées elle reporta son attention sur l'étal devant lequel elle se trouvait. Les légumes étaient plutôt jolis... Une partie (petite) venait de fermes proches et pas du Kil'dara. L’œil habitué reconnaissant sans peine les variétés atypiques adaptées aux terrains montagneux des environs. L’œil profane pour sa part avait tendance à penser que ces choux avaient une forme improbable... Sans des racines de Karis... Fraîches comme elles l'étaient elles auraient suffit a faire vomir pas mal de monde : la peau noire et luisante de cette rave avait une consistance pouvant être associée a celle d'une limace... Et l'odeur n'était pas sans rappeler celle de l'eau contaminée. Mais la chaire blanche avait une odeur d'amande amère et était absolument divine en beignets. Oh. Et des œufs. Ca faisait longtemps qu'elle n'en avait pas mangé.
C'est avec une panière bien remplie qu'elle repris le chemin de chez elle... Un rapide tour mental des différents cercles l'informa qu'une réponse était arrivée. Celle d'une Kildarienne visiblement horrifiée à l'idée de devoir se coltiner « ça » en sortie. Plutôt sain comme réaction. Peut-être un signe a exploiter ? En tout cas elle s'empressa de lui envoyer un rapide message d'excuse. La chose était toujours appréciable et permettait de toute manière d'ouvrir la conversation. En attendant une réponse elle pouvait se concentrer sur l’analyse de cette pensée. Une pensée prenant son temps, effectuant des phrases construites. Un Krolanne presque parfait indiquant qu'elle n'était pas toute jeune. La « saveur » de sa trace télépathique avait déjà croisé sa route. Pas en mal. Ah oui. Elle était aussi a l'origine de ce message a propos d'armes. Une artisane ? Peut-être une associée potentielle. Il y avait bien sur les problèmes de localisation mais quand on peut discuter aussi facilement...
Une première réponse. Plutôt du genre amusé. Sérieuse également. La conversation pouvait s'engager. Mais l'un des interrêts de ces pensées était qu'elles n'exigeaient pas forcément une attention de tous les instants. Une discutions pouvait très bien s’étaler sur quelques jours sans pour autant qu'on risque trop d'en perdre le fil.
*** ° ***
Assise en tailleurs sur son lit elle écoutait l'eau chauffer pour son thé. Le repas avait été des plus satisfaisants et surtout le début de sa discution avec la kildarienne avait été plutôt rassurante. Il y avait donc des gens capables de penser de manière intéressante. Et Jade n'était pas la seule a avoir retrouvé ses moyens. Ces informations valaient ce qu'elles valaient mais si le temps de latence était estimé a trois ou quartes semaines... Elle pouvait estimer que les choses ne tarderaient pas.
Le frémissement venait de changer. L'eau était bonne. D'une main elle versa l'eau frémissante sur les feuilles séchées... Un nuage de vapeur parfumé s’éleva. Parfait. Sur ce point au moins elle avait retrouvé la main. Cinq minutes d'infusion avant de retirer la première eau. Pendant ce temps elle pouvait choisir quelle musique mettre en fond sonore pour se mettre au « travail ». Quelque chose sans paroles pour la distraire. De pas trop triste aussi... Ce disque ? Il ferrait l'affaire oui.
Sa collection n'était pas la plus grande qu'elle connaissait en la matière et son appareil était loin d'être dernier cri et quelques grésillement ne manquaient pas de se faire entendre... Mais au moins elle pouvait profiter d'un peu de musique chez elle pour la couper du brouhaha de la ville.
Après avoir fini de préparer le thé elle s'installa, tasse et théière a portée de main dans des coussins, contre le mur. Quelques secondes passèrent pendant qu'elle savourait simplement les saveurs printanières de sa boisson... Puis elle laissa ses yeux se fermer... Bercée par la musique dans un premier temps et lentement... doucement mettre de côté les différentes sources de pensées parasites...
Devant elle se trouvait un bac à sable qu'il lui revenait de façonner par l'esprit. L'objectif était simple : éprouver ses limites et contempler le résultat. La... construction a proprement parler viendrait plus tard. Bien plus tard.
La curiosité. L'envie d'expérimenter. La détermination. Autant d'émotion qu'elle pouvait sans peine « afficher » étant donné la suite de ce qu'elle entendait faire. D'autres essais exigeraient d'adapter la façade. Cette dernière devait impérativement rester présentable pour le tout venant.
L'idée première étant posée restait à présent à lui donner forme. A quoi correspondait l'image d'une pensée ? Comment représenter mentalement une pensée ? Plusieurs possibilités s'ouvraient a elle... Le plus simple était d'observer les « signatures » télépathiques des différents Lanyshta, de les comparer à la sienne... Les choses s'assimilaient a un timbre de voix mais dont le ressenti était traduisible par une série de métaphore issues de l'ensemble de ses sens... ou d'évocations plus franches de ces derniers.
Jade. Premier exemple. Le plus simple. Elle « ressemblait » à une pierre précieuse taillée au poil de cul prés ainsi qu'a un enchaînement de mécanismes bien huilés. Le chant d'un verre en cristal. Ses pensées étaient l’empilement logique de briques correspondant d'une certaine manière a ce jeu que Naoko avait quand elle était petite avec des bouts de bois rectangulaires. D'autres observations pourraient être faites mais trop de conclusions découlaient de leur discutions et elle n'était donc plus objective en ce qui concernait l'aspect premier de sa « signature » télépathique. Ensuite en terme d'objectivité la chose était de toute manière discutable. Ces ressentis étaient une manière qu'avait son esprit de matérialiser quelque chose. Peut probable que les interprétations d'autres personnes soient identiques. Semblables... Probablement. Mais identique... Encore moins que s'il s'agissait d'une quelconque description physique ou gustative.
L'artisane kildarienne. Deuxième exemple. Ici encore un sentiment de rigueur. Mais cette fois cette rigueur qu'on observe dans un mécanisme complexe qui tourbillonne et continue a tenir par un quelconque miracle. Oui. Tourbillonnante. Vive. Mouvante. Le tout était accompagné d'une légère « odeur » de brûlé. Les émotions retransmises étaient franches. Réelles. Bouillonnantes. Les pensées qu'elle émettait avaient souvent une tonalités bien marquée et s’enchaînaient de manière presque... Musicale... Rythmée. Une musique entraînante accompagnées d'une bonne dose de percutions.
Le pochtron. Troisième exemple. Tout l'opposé. Les pensées étaient déstructurées. Le son obtenu avait quelque chose du violon. Joué par un débutant. Presque hachées malgré un aspect visqueux. Il sentait la défiance. Ses pensées étaient des bouchons de lièges remontant d'un bloc a la surface de l'incohérence. Le tout avec hargne. Presque comme si ces pensées essayaient de vous agresser... Assimilable au crissement d'une objet métallique sur une pierre lisse ?
Klem. Quatrième exemple. La pensée est puissante. Forte. Maîtrisée. Le son grave d'un didgeridoo. Les phrases formulées le sont avec précision. Elles évoquent la poussière renfermée dans un vieil ouvrage. Elles sont monolithiques non pas à la manière de Jade dont la pensée uniforme reste constituée de fragments. Ni a celle du pochtron... Non. Plus comme des cristaux purs de minéraux dans un verre uniformément brun. Des sentiments transparaissent. Peut-être irrépressibles tant ils sont puissants et faciles a remarquer étant donné la « taille ». Peut-être simulés. Mais qu'elle qualifierais de « purs ».
Le scientifique fou attardé. Cinquième exemple. En ce qui concernait son aspect... Il était sphérique, coloré ou plutôt bariolé. En train de dévaler une pente en déclenchant toutes les alarmes que le bon sens avait bien voulu semmer. Sucré (mais pas mielleux) et parsemé de petits cris d’excitations ravis. Ses pensées donnaient l'impression d’émaner entièrement de lui comme un petit bloc de sa personne jeté au petit bonheur la chance et ayant pris forme d'une manière ou d'une autre... Ces petites boules atypiques atterrissant sur des pentes dont le propriétaire n'avait que faire si ce n'est pour courir -rouler - après en chantant (mal).
Ces quelques aperçus effectués il restait a essayer de se définir elle-même. Quand elle revenait consulter une de ces propres pensées. Le problème était un peu le même que pour Jade (en bien pire)... Le mieux pouvait être de demander un avis extérieur. L'artisane avec laquelle elle était en train de discuter ferait parfaitement l'affaire. Le tout était donc de répondre a sa dernière pensée (ou elle sombrait dans ce travers Kildarien de tout ramener à l'outre-science) et d'y ajouter la question. Elle verrait bien l'éventuelle réponse.
En attendant ? Un pendule comme ceux suspendus au dessus du lits des poupons. Une toile. Une boule de jonglage remplie de farine. Quelque chose d'un seul tenant mais ressemblant plus à un puzzle dont chaque pièce bouge en fonction des autres que du bloc. Ou plutôt quelque chose de liquide. En mouvement perpétuel mais conservant une cohérence d'ensemble. Oui... Le son de la pluie constituant peu a peu un chant. Des pensées semblables à l'entrecroisement d'une série de fils laissant paraître un résultat.
Était-il possible de moduler ce ton ? Si oui comment ? Il faudrait... essayer de « penser » comme quelqu'un d'autre ? Comment jouer sur tous ces facteurs ? Comment se... déguiser ? Vis à vis de cela il y avait plusieurs choses a noter : si jamais pareille manœuvre devenait possible plus aucune communication entre Lanyshta ne serait fiable. Si un tel moyen existait il n'était donc pas souhaitable de le découvrir. Éventuellement de découvrir son existence. Mais sûrement pas sa pratique. Par ailleurs il restait possible pour tous de comparer directement chaque pensées avec celles déjà émises par la personne. Une imitation serait donc infiniment plus complexe que physiquement.
Alors qu'elle laissait ses pensées filer sur ces sujets et qu'elle se questionnait quand aux risques intraséques liés a de telles méthodes ainsi qu'aux possibilités gênantes d'intrusion qu'elles pouvaient évoquer, Naoko se servit une nouvelle tasse de thé. Cette fois ci il était moins brûlant et elle pouvait donc en profiter pleinement. Sans faire attention. Un vrais délice. Peut-être devrait-elle se faire des beignets de karis pour aller avec ? Non... Pas tout de suite. Et pas avec ce thé là. Un autre, plus fort, serait appréciable pour ne pas être écrasé par le goût entêtant du karis.
La réponse ne tarda pas a arriver. Intéressante. Elle confirmait que les choses variaient d'une personne à l'autre. Pour elle le ressenti était plus... sensoriel. Moins visuel également. La manière dont elle en parlait laissait penser que les métaphores employées étaient un moyen d'exprimer son ressenti plus qu'une manière de ressentir a proprement parler. Elle était donc « fraîche et piquante » avec des tendances a virer « glaciale et acide » le tout en un « filet d'eau cristalline tourbillonnant sur lui-même dont les mouvements même troublent la vue ». Et elle était comparée a une « citronnade des jours de grande chaleur ». Intéressant. Très. Ainsi malgré les différences une « constance » demeurait. Cette description était agréable a entendre et lui correspondait d'une certaine manière. Il était donc probable que les description qu'elle-même avait fait éveillent un sentiment de reconnaissance chez leurs cibles. Peut-être pas de plaisir par contre lorsqu'elles n'étaient pas flatteuses.
Le point notable était que cette information rendait les éventualités d’imitation plus ardues encore. Impossible de savoir ce que ressentent tous les autres Lanyshta et une « illusion » pouvant en tromper un ne trompera pas forcément un autre. Très bonne nouvelle. En tout cas la première chose a faire avant de se replonger dans sa méditation était de rendre la politesse a son interlocutrice et lui décrire quel était son propre ressenti vis à vis de son timbre à elle.
*** ° ***
Ceci étant fait elle pouvait s'en retourner a sa méditation. Le jeu ne pourrait, ne devait, donc pas se faire sur l'aspect a proprement parler de ses pensées. Il devait jouer sur la manière de les présenter. Moduler sans chercher particulièrement a modifier. L'idée du liquide pouvait aider. Jusqu'à présent elle avait « noué » ses pensées plutôt que de les laisser couler. Le tout serait donc de faire preuve de spontanéités de manière non spontanée. Sachant que spontanément elle n'avait pas fait preuve de spontanéité en la matière... Bah voyons. Dans le genre contradictoire ça se posait là.
Bien entendu ce n'était pas différent d'un quelconque discours ou d'une pièce de théâtre. Il fallait préparer ces choses de manière a donner l'impression, au moment du show d'être parfaitement spontané. De ne pas s'être préparé. Le combat à mains nues relevait des mêmes codes : chaque mouvement était travaillé. Codifié et travaillé jusqu'à devenir naturel. Elle avait déjà vu des maîtres réagir de manière parfaitement « spontanée » en adoptant la posture d'un Kata... Il fallait qu'elle trouve comment obtenir cette même fluidité.
A priori les exercices pour y parvenir étaient les mêmes que ceux effectués au théâtre si ce n'est qu'elle devrait être sa propre juge. Hors de question de s’entraîner publiquement à ça. L'exercice était donc bon a remettre à plus tard. Pour l'heure elle pouvait se centrer sur les émotions... Ou sur les images. L'intérêt de se focaliser sur les images était qu'elles pouvaient constituer une base pour d'autres expérimentations sans pour autant les révéler au grand jour.
Il fallait donc choisir une image sur laquelle s'essayer pour la première fois. Le mieux serrait une image a la fois simple, facile a conceptualiser, et exigeante. Précise. Elle pouvait se lancer de manière parfaitement abstraite sur une forme géométrique. La plus intéressante étant le cercle. Mais l'absence de support physique rendait la chose a priori plus complexe. Créer une image mentale devait logiquement être plus facile en ayant l'objet sous les yeux. Et le risque de passer du concept « cercle » au mot « cercle » était loin d'être négligeable. Le mieux serrait donc soit de dessiner un cercle soit de trouver un objet simple correspondant a ses besoin...
Un œuf. Un œuf était simple, harmonieux... Et la moindre imperfection de l’image serait facilement visible. Bon. Ce n'était pas a proprement circulaire (du moins pas ceux d'oiseaux comme elle en avait acheté) mais ça ferrait parfaitement l'affaire. L'objet de son jeu serrait donc un œuf. Elle se leva pour aller en chercher un dans la cuisine et le poser sur la table basse à côté de sa tasse désormais vide.
Assise devant l'œuf elle commença par le fixer avec détermination. Il fallait qu'elle soit capable d'en conserver l'image aussi précise que possible une fois les yeux fermés. Exercice a la fois terriblement facile et quasiment impossible. Lorsqu'elle refermait les yeux elle évouquait sans peine l'idée de l'image mais pas l'image elle-même. Il fallait qu'elle agisse de la même manière que si elle désirait s'imprégner d'une image pour la peindre ou la broder sur une tunique.
Maître Hok le lui avait expliqué a moultes reprises sans qu'elle parvienne réellement à mettre le doigt sur « le truck »... Bon. Elle devait bien avouer qu'elle n'avait pas non plus mis toute sa volonté dans ces essais. Selon lui recopier a mesure ne suffisait pas. Il fallait évoquer l'image dans son ensemble avant de se lancer... C'était ce qui la différenciait d'un véritable artiste. Elle n'était qu'une paire de petites mains de plus.
Il n'avait pas tord mais ça n'en était pas moins vexant. Surtout maintenant qu'elle n'était même plus digne d'être une paire de petites mains. Hors de question d'abandonner cette fois. De toute manière elle n'avait pas grand chose d'autre a faire tant qu'elle ne serait pas redevenue capable. Elle s'imposa donc une stricte discipline. Au bout d'une heure elle avait fini sa théière et commençait a éprouver quelque chose pouvant s'apparenter a de la haine pour cet œuf. Le transformer en omelette serrait un vrais plaisir. Ou le brouiller. N'importe quoi pourvu qu'il cesse de ressembler a un œuf.
Un sourire amusé sur les lèvres elle s’imagina en train de casser l'objet de son énervement... Et presque immédiatement un point la marqua : elle avait « vu » cette action. Plutôt que de chercher à imaginer l'œuf elle s'imagina donc en train de le tenir sur trois doigts. L'image se créa presque immédiatement dans son esprit. Après... Retirer les doigts ? Logiquement ça devrait fonctionner non ? Bien. Elle devait maintenir une ferme concentration pour ne pas la perdre mais... La base était là.
Pour voir la fiabilité du procédé restait a l'éprouver. Au passage elle pouvait essayer de transmettre les émotions suivantes de manière consciente : curiosité, amusement, détermination, concentration.
Pensée :
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Hésitations... Inquiétude. Curiosité...
Détermination...
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°
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« Reculer » un peu pour observer le résultat obtenu. Bon... Ok. C'était pas encore ça. Pas encore du tout. Elle avait donc réussi a exprimer une image. Mais le résultat ne correspondait définitivement pas à ce qu'elle avait espéré. Le rendu était flou... hésitant... Comme si le résultat final soufrait de chacun des instants d'inattention qu'elle avait eu.
Tant pis pour les fioritures. Une pensée se modifie après coup. Autant donc être capable d'y intégrer une belle image bien propre a posteriori... Et ne pas forcément être à son aise pour retransmettre l'image sur l'instant. En revanche malgré cette possibilité de modification il était plus intéressant de laisser cet essai a la vue de tous. Il pourrait être utile.
Le problème relavait du manque de fluidité dans sa pensée. En combat on parlerait de manque « d'assurance ». Pour y remédier elle devait soit atteindre un niveau de maîtrise suffisant... Beaucoup d’entraînement et de temps... Mais sans personne pour la guider l'exercice serrait malaisé. Soit se détendre a l’extrême. Pour le coup ralentir un peu le flux de ses pensées ne ferrait pas de mal non plus ce qui invalidait l'une des méthodes de détentes les plus agréables. Elle y recourrais sans doute une fois qu'elle aurait fini. Un peu d'alcool en revanche serrait le bienvenu. Mieux valais éviter des drogues plus... violentes. Le but était de rester parfaitement maîtresse de soi.
Elle alla donc chercher dans le placard une bouteille d'une liqueur anisée qu'elle affectait. Une dose bien chargée, un peu d'eau pour couper le tout et... cul sec. Huuuuuu... Ses yeux s'écarquillèrent quelques instants alors qu'elle souflait se surprise : elle ne pensait pas y être allée aussi fort. Bon... Par contre c'était agréable de temps en temps de sentir la chaleur de l'alcool se répandre dans son corps. Habituellement elle buvait plus pour le goût que pour les effets... Mais force était d'avouer que ça pouvait faire du bien.
S’installant à nouveau dans ses coussins elle repris l'observation de son œuf, bien déterminée a ne pas perdre contre lui. Cette fois, la méthode étant assimilée elle parvint bien plus vite à visualiser l'œuf derrière ses paupières closes. Restait à fixer l'image et a l'envoyer sur les entrelacs.
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Cette fois le résultat était à la fois plus satisfaisant et moins bon. Les espèces de vaguelettes dans la structure de l'image étaient quasiment absentes mais le rendu était... Flou. Le plus marquant était cette étrange spirale qui, pour ce qu'elle pouvait en juger émanait de la manière dont elle avait construit l'image : au lieu de faire le tout d'un bloc elle avait procédé par cercles concentriques en partant du milieu.
Il fallait donc recommencer en essayant de tout faire d'un coup. Ou de partir des bords. Les bords semblaient moins... intuitifs. Hypothèse rejetée. Pour l'aspect « flou » elle doutait que cela puisse venir de l'alcool. Il était encore bien loin d'embrumer ses sens. Il l'avait simplement délassée. C'était sans doute le contre coup : elle arrivait a avoir une image fragmentaire et nette ou une image d'ensemble floue. Il y avait logiquement un moyen d'y remédier mais elle n'en était pas encore là.
En s'appliquant à produire l'image de l'œuf d'un seul tenant elle lui donna corps une nouvelle fois sur l’entrelacs :
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Bon... C'était moins tourbillonnant mais ça ne ressemblait même plus à un œuf. L'image d'un visage aussi déformée que ça devait être tout bonnement horrifiante. Le coup de tout faire d'un coup n'était pas... bon. Si avec un simple œuf c'était aussi dur... Elle n'arriverait jamais a être ne serai-ce qu'aussi précise qu'un simple dessin croqué. Par quelqu'un dépourvu de talent en la matière. Dans ces conditions autant abandonner le concept. Pourtant... à la manière dont Klem en avait parlé... ça n'avait pas l'air si compliqué.
* Attend... Et si je fais comme une peinture ? Que je retouche a mesure pour atteindre le résultat final ? Après tout rien ne me l'interdit non ?
Bien décidée elle commença par créer une nouvelle base... Moins... étrange que la précédente mais plus carrée. Méthodiquement elle repris les bords en les re-créant un par un... Ensuite il fallait superposer le tout... Adapter la taille... Assurer la netteté de l’image... Elle avait depuis longtemps perdu le compte des retouches et il avait bien du se passer quinze minutes quand elle s'estima satisfaite :
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Ravie elle se releva juste le temps nécessaire pour se déshabiller et se laisser tomber dans son lit. Elle méritait bien un peu de repos et avait une promesse a sa propre personne à tenir.
HRP//Finalement ça aura pris un peu plus de temps que prévu. Mais le fil de pensée associé a été fait./HRP