Samuel Venek
Libertaire
Kil'sin
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Le Merakih 23 Astawir 814 à 22h11 |
***
Il a l'impression de flotter.
Il flotte.
il suffit d'y penser pour que ce soit vrai.
La voix lui parle,
La voix du Père.
Lui qui n'en a jamais eu.
Mais c'est pas aujourd'hui que ça va lui fendre le coeur.
Non.
Le Père, car c'est bien lui, lui parle.
Lui livre des secrets.
Des secrets grandioses.
Cela dépasse de loin sa misérable existence.
Il flotte, il apprend, il voit.
Il sait que ce qu'il voit dépasse l'entendement.
Mais il ne saurait le décrire.
La Peur.
Trop en savoir attire les regards.
Les regards de la meute.
Ils apprendront qu'il sait.
Ils tenteront de l'éliminer.
La Peur.
Il veut qu'Il se taise.
Il ne veut plus savoir.
Il ne veut que retourner dans son trou.
Il n'a rien de spécial.
Il ne veut pas être spécial.
La Panique.
Il flotte, non il tombe.
Le vertige l'envahit...
***
Il se réveille en sursaut.
Un cri étouffé se coince dans sa gorge nouée.
Le drap vole dans les airs alors qu'il s'écrase au sol de toute sa masse.
Il est en sueur. Épuisé. Il a soif. Son souffle est court.
Il reste un moment au par terre à tenter de reprendre ses esprits.
Ses impressions sont floues.
La sensation de flotter, de tomber.
De terribles secrets. Dangereux.
Il a peur. Il ne sait de quoi.
Il craint un fantôme qui se câche au-delà de sa propre conscience.
À tâton il cherche sa bouteille qui doit traîner quelque part sur le plancher jonché de détritus.
Il tremble comme une feuille.
Sa main massive frôle le verre poli puis empoigne la forme réconfortante.
Son amie de toujours. Sa confidente.
Seul dans sa chambre mitteuse, Samuel accueille la venue du jour avec une double rasade de tord boyaux, histoire de se calmer les nerfs. |
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Samuel Venek
Libertaire
Kil'sin
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Le Vayang 23 Manhur 814 à 01h33 |
Une semaine plus tard...
***
Il y avait eu un homme...
Il y en avait eu plusieurs, mais il y en avait eu un.
Lui.
Celui qui avait les mots.
Samuel se souvient maintenant.
Les mots.
***
L'après-midi est tranquile, le soleil plombe. Dans un escalier qui donne sur une place, Venek taquine la bouteille en regardant la vie qui s'active. Il n'a jamais été homme à faire des bilans. Il a toujours vécu au jour le jour. Né dans une maison close et poussé à la rue en bas âge. Il n'est pas amer. Il n'a jamais rien eu. Il survit, voilà tout. Il a toujours survécu. Ça ne vous laisse pas trop de temps pour l'introspection, survivre. Et pourtant aujourd'hui des moments bénis de ce passé tordu lui reviennent.
Lui. Un client régulier de sa mère. Un type éduqué avec qui il avait tissé des liens. Un type respectable qui venait former une famille dans la fange de temps en temps. Samuel ne se souvient même pas de son nom. Il l'avait même oublié durant la majeure partie de sa vie.
Et aujourd'hui ça refait surface.
Depuis ce foutu rêve, sa tête est à l'envers.
Cet homme avait laissé des traces. Ce père qu'il avait eu pendant un an ou deux tout au plus avait pri le temps de lui apprendre à lire autrefois. Quel age il avait à l'époque ? Samuel ne pourrait même pas le dire. C'était un grand parleur comme il y en a tant des ce 'kil. Par imitation et à force de questions, le petit Samuel en avait appri... pour oublier le tout pendant une bonne trentaine d'année de basse criminalité et d'alcoolisme crasse.
Mais aujourd,hui il se souvient.
Les mots.
Il n'a jamais été un orateur.
Mais aujourd'hui il se souvient qu'il aurait pu l'être.
C'est donc ça devenir Lanyshsta ? Se souvenir de ce qu'on aurait pu vivre ?
Qui sait ? C'est à se fendre la tête en deux cette histoire.
Et sans savoir pourquoi, sans même se demander s'il fait fausse route, il a l'impression de comprendre un peu. |
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