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Ainsi soit-il
 
Narrateur
 
Le Merakih 11 Marigar 815 à 16h53
 
Même si Oromonde était sans doute plus confuse que son interlocuteur, celui-ci, sous son demi-sourire poli résolument accroché à sa face, ne devait pas être beaucoup plus en état.

Non mademoiselle, nous... Non, je ne pense pas qu'il faut que vous laissiez quoique ce soit, je...

Ce n'est pas une procédure classique. Il est perdu. Ah, si, peut-être que les Commis de la Défense auront des questions à poser.

Un nom et une adresse, peut-être.

Pour des questions, oui. Et peut-être pour envoyer une brochure publicitaire dans quelques temps. Il ne voit rien d'autre pour l'instant. Il a l'impression d'oublier quelque chose, mais cela reste hors de sa portée. Il l'a sur le bout de la langue, à la lisière de l'esprit, mais...

Mes condoléances.

Ce n'était pas ça qu'il cherchait. Pas exactement. Mais c'est d'actualité, au moins.

 
Oromonde
Prédicateur
Kil'dé  
Le Julung 12 Marigar 815 à 17h30
 
Oromonde regarde fixement l’aubergiste sans réagir. « Mes condoléances ? » « Mes condoléances ?!! » C’était une chose à dire, ça ? Qu’est-ce-qu’on pouvait bien réponse, si ce n’est un …

« Merci » plus issu d’une politesse inscrite sous la peau via un processus éducatif rigide que d’un réel sentiment de gratitude.

Prenant de quoi écrire, Oromonde note son adresse exacte sur le papier. Il est y écrit « Mlle Oromonde Shen, 47 rue de la valve, Fissures. » Elle s’imagine les Commis frappant à la porte de la maison familiale le soir. Comment réagiraient ses frères, ses belles-sœurs, neveux et nièces ? Et Mamie Bellatine ? Et les gens du quartier ? Elle retire le papier rapidement pour le laisser au tenancier, hésite, puis rajoute :

« S’il vous plaît, est-ce-que vous pourriez me dire…Si vous obtenez plus d’informations ? »

Suite à quoi, toujours ailleurs, elle sortira pour rejoindre Thaïs.
Allons chez toi, s’il te plaît.
Je n’ose pas encore rentrer dans mon quartier…




Mon nom est Personne.
*Le Chaudon qui Fume*
 
Thaïs d'Ascara
Commis des Sans Destins
Kil'dé  
Le Julung 12 Marigar 815 à 18h06
 
Bien sûr.

Thaïs se relève péniblement, accroche le bras d'Oromonde et les deux femmes se dirigent vers une voiture, qu'elles arrêtent et dans laquelle elles s'engouffrent. Thaïs donne une adresse approximative -pas trop loin de la demeure d'Ascara mais pas à ses pieds non plus.

Le voyage se passe dans le silence. Thaïs est disponible, bien sûr, si Oromonde souhaite s'épancher, mais n'ose ouvrir la bouche de sa propre initiative. Elle a déjà un peu de mal à se retenir de pleurer -l'adrénaline l'abandonne peu à peu.

Une fois la course payée et les colis "livrés", Thaïs emmène Oromonde dans sa chambre, l'assoit sur son lit et demande mentalement à Harvain de les rejoindre. Sans doute remettra-t-il le pli à la jeune femme, qui sera libre de l'ouvrir ici ou plus tard, de le déchirer ou d'en faire ce qu'elle veut.

Thaïs s'affaire doucement, défait sa perruque, essuie les restes de maquillage, dénoue son corsage, se défait de son rembourrage, se pèle misérablement comme une poupée ratée.

Il doit être proche de la mi-journée. Thaïs se sent vieillie de plusieurs siècles.


 
Harvain
Gens de foyer
Kil'dé  
Le Vayang 13 Marigar 815 à 10h25
 
Je m’étais accordé quelques minutes de repos. Assis sur mon lit, dans l’obscurité de ma chambre sous les combles, je fermais les yeux quelques instants. A peine rentré, je m’étais changé et revêtu mon uniforme de service. La tension redescendait lentement mais l’anxiété restait là, en arrière-plan. Je reprenais mes froids raisonnements sur les risques encourus, les failles dans notre plan et sur les réactions possibles de mes deux complices.

Les exigences du service.

Dans la pénombre, je regarde mes mains et repense à ce que j’ai fait. Oh j’ai déjà fait pas mal de choses douteuses dans ma vie et il y a fort à parier que mon statut de Lanyshsta n’arrange pas les choses… Je repense à mon Augure qui s’éclaire différemment à la lumière des derniers événements tragiques. Une variation serait-elle possible, une approximation sémantique ? Que se passe-t-il…

*** Ambiance ***


La pensée de mademoiselle Thaïs me percute. Elle ne maîtrise pas encore la puissance de ses messages mais la situation actuelle pardonne quelques emportements je suppose. Je me relève et descends d’abord vers la cuisine. Face à l’apocalypse, à la fin des temps, les tragédies et les bouleversements, rien ne vaut une bonne tasse de thé.

J’ouvre la remise pour sélectionner la boite où j’avais mis l’enveloppe. Je regarde l’étiquette. Un thé bleu, ça fera l’affaire. Je prépare l’eau selon le rituel habituel et après avoir rempli la théière fumante, je sors d’une poche intérieure un petit flacon de verre sombre que je dévisse. Je verse trois gouttes avec une grande précaution puis touille à nouveau. L’odeur fruitée du thé couvrira celle de l’huile essentielle de valériane que je viens de verser. Cette décoction m’a déjà rendu pas mal de services chez certains de mes anciens maîtres. Calmant, hypnotique, anxiolytique et somnifère, la dose que je viens de verser devrai ralentir les humeurs et assouplir les esprits en quelques minutes. Oh ce n’est pas une technique très honnête et je n’aime pas y avoir recours mais je sais ce qui est mieux pour elles.

Je pose le tout sur un plateau avec des biscuits secs et la fameuse enveloppe puis me dirige vers la chambre de mademoiselle Thaïs. Oh bien sûr, je pourrai la sermonner sur sa tenue débraillée et à la limite de l’indécence selon mes critères mais je pense que je vais être un peu plus coulant pour l’occasion.

Je pose le plateau sur le petit secrétaire en bois laqué puis verse le thé. Je reviens vers le lit avec les deux tasses fumantes dans un premier temps. Puis un nouvel aller-retour avec l’enveloppe posée sur une petite assiette en argent que je tends vers mademoiselle Oromonde.



 
Oromonde
Prédicateur
Kil'dé  
Le Vayang 13 Marigar 815 à 20h46
 
Oromonde accepte le thé sans broncher, le regard ailleurs. L’apparition de l’enveloppe a l’air de provoquer un sursaut chez elle, et elle l’ouvra sans hésiter pour la lire, d’abord pour elle-même. Cela ne lui prend pas longtemps ; son visage devient livide et elle repose l’enveloppe sur le lit.

« Oh, Scylla ! »

Puis, se relevant et tournant en rond frénétiquement : « Ce n’est pas possible ! Ce n'est pas possible ! Il ne...je n'étais rien pour lui...quelle conne !»

Elle pointe le doigt vers l’enveloppe, visiblement furieuse – état assez exceptionnel chez Oromonde pour être noté, et enjoint sommairement ses camarades à en prendre connaissance.

« Lisez ça ! »


Citation :
Par la présente, moi, Iolain, résident de la chambre 127 du présent établissement, et locataire de l'espace de coffre lié à la dite chambre, donne dérogation d'accès, à la condition expresse que mon décès soit avéré à mon amie Oromonde.

S'en suit quelques menus détails permettant de reconnaître, ou de contacter la dite Oromonde, ainsi que la date et la signature.
L'ensemble a été tracé d'une main visiblement tremblant légèrement.


La jeune femme se passe la main sur le visage et ne touche pas à son thé. "Quelle idiote.."'


Mon nom est Personne.
*Le Chaudon qui Fume*
 
Thaïs d'Ascara
Commis des Sans Destins
Kil'dé  
Le Vayang 13 Marigar 815 à 22h21
 
Thaïs saisit délicatement la feuille et parcourt le mot des yeux rapidement. Ses sourcils se froncent.
Elle boit doucement son thé, par petite gorgée : un délice. Lentement, elle s'apaise, s'assoit sur le lit, se détend, ses mots deviennent traînants et moux.


Or... Il faut tout nous dire. Comment ça s'est passé. Comment vous le connaissiez... Depuis quand...

Les circonstances exactes de... l'accident...

Car...


Bâillement.

Car... ce mot vous accuse plus qu'il ne vous gratifie. A moins qu'un si jeune homme ait... prévu de mourir.

Etirement.

Or... votre identité Lanyshsta était connue sur les Entrelacs, comme la mienne. Vous étiez une proie facile à qui voudrait nous faire accuser. Nous faire inculper. Tout ceci est... troublant.

Haussement d'épaules. Les propos sont graves : Thaïs y a réfléchi tout le trajet du retour. Oromonde, la d'Ascara et quelques autres sont quelques rares mutés à s'être dévoilés à la communauté télépathe. Mais il est avéré que des "Anciens", comme Klem, ont accès à ces informations et des savoirs Ô combien inconnus à cette nouvelle vague. Avéré aussi que leurs intentions ne sont pas forcément honnêtes ou louables... Et voilà qu'Oromonde se trouve prise dans un sombre meurtre où la victime la désigne comme première bénéficiaire de sa mort...

Malgré tout, Thaïs sourit et passe sa main dans les cheveux de son amie, en un comportement étrange et détendu.


 
Oromonde
Prédicateur
Kil'dé  
Le Sukra 14 Marigar 815 à 10h22
 
Oromonde se dégage, visiblement trop nerveuse (et n’ayant bu encore du breuvage anxiolytique) pour rester en place et apprécier les attentions de Thaïs. Elle fait les cent pas dans la pièce. En toute franchise, elle n’a pas très envie de confier à ses camarades son historique allongé avec Iolain. Ce serait perdre la dernière chose qui lui appartient vraiment : ce fantasme secret, privé, qu’elle a conservé une dizaine d’années enterrée en elle. Quelle ironie, pensez-vous : la laide Oromonde, maladroite, renfermée, amoureuse du séduisant Iolain, bourreau des cœurs du quartier ! Une histoire d’adolescence qui aura duré bien trop longtemps, plus une idée qu’une réalité…et pourtant.

Il lui faut donc du temps pour rassembler ses idées, et ses souvenirs. Finalement, elle décrit, sans émotions autre qu'une colère contenue :

« J’ai rencontré Iolain quand j’avais quatorze ans. Nous jouions dans des équipes de balle-de-pied opposées. J’ai…je l’ai tout de suite adoré. J’espérais terriblement que les Augures nous réuniraient. Mais mes Augures…mes Augures ont été modifiés par le Concile, comme tous ceux de ma famille, peu avant le décès nouvellement prédit de mes parents. Après cela, j’ai compris qu’Iolain me serait à jamais inaccessible, mais j’ai continué à vivre dans son ombre, espérant chaque jour un regard, un mot, une attention que je n’étais jamais assez séduisante, futée ou drôle pour recevoir.
Même s’il n’était pas inscrit dans mes Augures, je reste persuadée que nos Destins étaient liés. Pas sous le signe que je voulais, c’est d’autant plus certain aujourd’hui…mais nos rencontres perpétuelles, dues à notre voisinage particulier – le monde des Fissures est un monde clos où chacun se connaît -, me paraissaient trop régulières pour être le fruit du strict hasard. Il n'a jamais été là pour moi, car il ne s'est jamais rien passé entre nous avant, mais en même temps il était toujours là, comme une scansion de mon existence...vous comprenez ?

Ce n’est que très récemment que Iolain a commencé à faire attention à moi, pourtant. Peu après mon Eveil. Le fait d’être lanyshta…je l’avoue, cela me confère un sentiment de pouvoir et d’intensité que je ne possédais pas avant. J’ai l’impression d’être plus vivante, plus confiante, plus forte depuis. C’est excitant. Et amusant. Même pour une fille comme moi.

Du coup, j’ai osé me rapprocher de lui. Ces dernières semaines, nous discutions régulièrement ensemble, et hier, en quittant l’Hermine, j’avais rendez-vous avec lui. Je crois que nous sommes partis prendre un verre, mais le reste…
…Le reste, je ne m’en souviens pas. Du tout. Pour moi, je me suis réveillée ce matin dans cette chambre d’hôtel, sans souvenir de ce qui se fût passé avant.

Iolain a…paniqué, à cause de mon…de mon bras, je crois. »

Elle repousse sa manche pour leur montrer : il est vrai que la peau de la jeune femme est marquée, à certains endroits, d’une sorte d’eczéma de couleur grise assez curieux.

« Ce matin, il…Il pulsait. Je crois que…la magie que manipule Thaïs et Yloyse, et les autres lanyshtas…je pense simplement que c’était sa première manifestation. Mais je ne sais pas pourquoi, et je ne sais pas comment…j’ai eu peur, j’ai voulu le retenir. La magie est partie, comme une lance, de mon corps. Il en est mort.

Si c’est cela d’être lanyshta, si c’est cela notre don, alors je n’en veux pas. »



Mon nom est Personne.
*Le Chaudon qui Fume*
 
Harvain
Gens de foyer
Kil'dé  
Le Luang 16 Marigar 815 à 18h54
 
*** Ambiance ***


J’observe la scène depuis ma place dans un coin de la pièce. Le dénouement tragique de cette triste histoire à la fois si longue et si brève, et de notre première incursion ensemble dans le monde souterrain. Comme je m’y attendais et le redoutais, mademoiselle Oromonde s’emporte. La balle-de-pied ? On y joue encore à notre époque ? Alors ses Augures sont mauvais ? Enfant du malheur, chat noir à deux pattes, miroir brisé sur sept décennies, Vayang 13 tous les jours en résumé.

Une banale histoire d’amour. Comme des millions d'autres. Qui finit mal. Comme des millions d'autres. Lanyshsta ou pas. Elle a voulu contrer son Augure, pure folie infantile, croire en une petite parcelle d'espoir et de bonheur, espérant une révision du Concile. Il n'est pas question de mériter tel ou tel augure car je ne doute pas que cette bonne âme mérite un peu plus de bonheur que ça. Mais il est question d'accepter notre Destin, la tête haute. Bon gré, mal gré.

Je continue à m'interroger sur cet épitre funèbre. Il nous faudra agir prochainement pour récupérer le contenu de ce coffre, quel qu'il soit. Je crains qu'il soit également difficile de récupérer les cendres de ce pauvre jeune monsieur, ça risque d'être compliqué... Je verrai ce que je peux faire. Tout cela sous réserve que nous ne soyons pas dérangés par la Défense dans les prochains jours...

Je regarde par la fenêtre, le ciel est maussade, sombre, de lourds nuages grondent à l'horizon. Une pluie serait bienvenue pour laver le pavé que j'ai ensanglanté et camoufler nos propres larmes. En cette période bien triste, un ciel bleu clair et un grand soleil eut été inconvenant. Je regarde ces deux jeunes femmes qui ont eu une rude matinée. Je crains que leurs prochaines nuits ne soient difficiles, emplies de songes carmins et désincarnés. Quant à mademoiselle Oromonde, la culpabilité viendra en plus recouvrir ses épaules d'une chape de plomb pour le reste de sa vie j'en ai peur.

Haussement de sourcil à la vision du bras de mon apprentie. Nous y voilà, une autre personne pouvait manipuler la réalité à sa guise. Il nous restera à voir quel genre de manipulation. Si comme mademoiselle Thaïs elle fait exploser les théières, nous n’aurons plus de quoi prendre un « après-huit heures » dans trois jours. Sauf que cette fois, la théière était ce jeune monsieur Iolain, qui désormais, est dans un bien triste état. Tout le monde sur Syfaria a des petites marques de naissance sur la peau, souvent à l’épaule droite. Comme moi avec des tâches en formes de longs filaments noirs. Sur une peau aussi pâle que la mienne, on ne peut pas les louper. Fort heureusement, mon emploi et le code vestimentaire strict qu’il demande camoufle plutôt bien cette coloration.

J’ai du mal à comprendre. Je déteste cela mais je vais devoir prendre la parole. Je m’approche de la jeune femme agitée et j’essaye de prendre un ton presque gentil dans ma voix.


Mademoiselle Oromonde…

Entrée en matière navrante de classicisme. Je me fends même d’un quart de sourire navré et pose lentement ma main sur son épaule pour l’ancrer au sol. Scylla me vienne en aide, je ne suis pas fait pour ce genre de discours qui ne rentrent pas dans ma fiche de poste.

C'est fini....c'est fini....

Je reprends dans un chuchotement.

Don ou malédiction, c’est vous qui choisirez. Vous contrôlerez ce pouvoir, ne le laissez pas décider. Ce qui s’est passé ce matin était un accident, voyez-le comme l’avertissement de l’étendue de vos pouvoirs et des responsabilités qui en découleront.

Un instant.

Vous avez beaucoup appris aujourd’hui. Mais pour obtenir ceci, vous avez dû perdre quelqu’un. Je pense que monsieur Iolain, où qu’il soit désormais, comprendrait votre situation et vous pardonnerait de tout son coeur.

Fin de la séquence émotion. Je recule de quelques pas dans l'ombre près des murs jusqu'à être presque caché. Mademoiselle Oromonde, en connaisseuse de la chose reconnaîtrait un certain type de camouflage. Je ne comprends vraiment pas. J'ai nettoyé moi-même la chambre de mademoiselle Thaïs et j'ai quand même une poussière dans l'oeil

Quant à vos plaques… si effectivement elles sont nouvelles et potentiellement liées au plein éveil de votre état de lanyshta…

Je réfléchis un instant.

…je vous invite à en dessiner le contour avec un pincent à l’encre de Kil’sin et à surveiller l’évolution sur les prochains jours et les prochaines semaines. Peut-être est-ce là une conséquence inédite de votre situation car je n’en ai pas eu personnellement et je ne crois pas non plus pour mademoiselle Thaïs.


 
Thaïs d'Ascara
Commis des Sans Destins
Kil'dé  
Le Merakih 18 Marigar 815 à 11h09
 
Durant le discours d'Oromonde, Thaïs s'est allongée paisiblement sur le lit, aussi aberrant que cela puisse paraître. Elle somnole de plus en plus, ouvrant de temps en temps un oeil, s'étirant, baillant. Elle marmonne :

Récemment... Quand ?

Après... identité sur... entrelacs ?


Elle se tourne en position fœtale sur le lit, un sourire apaisé sur les lèvres. Elle murmure toujours, comme pour elle-même, comme si elle réfléchissait dans ses rêves.


Drogue.

... piège ?



 
Oromonde
Prédicateur
Kil'dé  
Le Sukra 21 Marigar 815 à 12h48
 
Oromonde finit par hocher la tête lentement aux propos d’Harvain, sans ajouter quoi que ce soit. Que dire de plus ? Les mots font impasse. Elle recouvre à nouveau ses bras et les croise nerveusement, à la façon des jeunes filles. Maintenant qu’elle s’est emportée, elle se sent vidée, et soudainement la perspective d’atteindre l’état de Thaïs n’est plus aussi dérangeante. Elle finit donc par s’emparer du thé.

La question de son amie, d’ailleurs, l’interloque. Elle doute qu’il puisse y avoir un lien entre ça et sa révélation des Entrelacs. Puis elle se rend compte, après réflexion, qu’elle commet l’erreur de croire qu’elle connaît déjà tout des lanyshtas du Kil’dé ou des liens qu’ils entretiennent avec les krolannes. Est-il possible que quelqu’un d’autre, dans les Fissures, ait été à son tour touché par l’appel ? C’est pourtant ridicule…

« J’ai révélé mon identité très tôt sur les Entrelacs, alors beaucoup de choses se sont passées après. Je ne suis pas sûre que cela soit significatif. »

Elle vide son thé d’un trait, ce qui ne s’avère pas être une bonne idée. Grimaçant, elle attend désespérément les premiers signes avant-coureurs du somnifère que le majordome a probablement « glissé malencontreusement »à l’intérieur. C’est au bout d’un moment qu’elle finit par dire :

« Merci. »

Et, sans autre fioritures, de s’allonger sur le lit de Thaïs et de fermer les yeux.



Mon nom est Personne.
*Le Chaudon qui Fume*
 
Harvain
Gens de foyer
Kil'dé  
Le Julung 26 Marigar 815 à 14h43
 
J’attends quelques instants que mon thé fasse effet. Aurai-je un peu trop chargé la valeriane ? Plutôt je pense avoir surestimé la constitution de ces deux jeunes filles… Hum tant pis pour la discrétion. Le résultat est le même, c’est ce qui compte. Dormez mesdemoiselles. Dormez d’un sommeil sans rêves, profond, aussi artificiel que notre nature mutante. Le sommeil est le meilleur des remèdes. Je le sais bien…

Bientôt il ne reste plus que le bruit lent de leurs respirations calmes. Je reste quelques minutes sans bouger, analysant plutôt que regardant la scène. En l’espace de quelques heures, il s’était passé beaucoup de choses lourdes de conséquences. Pour nous tous. Tout n’était pas fini. Le coffre restait hors de portée ainsi que son contenu. Nous n’avions que peu de détails sur ce jeune monsieur Iolain.

Je finis par bouger. Je remets les tasses sur le plateau et je glisse l’enveloppe dans une poche intérieure. Je borde mademoiselle Thaïs dans son lit. Je suis tenté de laisser mademoiselle Oromonde au même endroit par pure flemme de devoir la déplacer… Mais il n’est pas convenable. Et nous avons des chambres pour les invités. Je sens que je vais me faire mal au dos…


Si vous voulez bien m’excuser…

Je soulève difficilement mademoiselle Oromonde, c’est que ce n’est pas une plume que j’ai entre les mains… Oh hisse ! Aïe mes lombaires ! Va pour la chambre turquoise, c’est la plus proche d’ici. Oh misère, la prochaine fois, je penserai à les droguer au bon endroit, ça m’évitera des soucis.

Péniblement, je parcours les quelques mètres vers la chambre turquoise puis dépose mon mort colis sur les draps en satin. Avec une certaine aisance due à l’habitude, je la glisse sous la couette que je borde. Je glisse l’enveloppe dans une de ses poches puis quitte la pièce quelques instants. Je reviens après avec une carafe d’eau que je dépose sur une table basse.

Je préviens la femme de chambre de la présence d’une invitée et madame d’Ascara que sa fille est tombée en pâmoison après avoir vu un oiseau mort. Excuse risible mais qui renforce l’impression de faiblesse chez sa fille. Toute jeune fille bien éduquée est sensible à ce genre de choses.

Je retourne à mes occupations pour le reste de la journée. J’avais besoin de me divertir l’esprit avec la solidité d’une routine journalière de tâches domestiques. Une page, un chapitre venait de se clôturer.



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