vide fam
 
 

Page : 1 2 3 4 5

A l’hermine de cristal
Piano bar - tenue correcte exigée, animaux interdits
 
Lelhuü
Travailleur
Kil'dé  
Le Matal 28 Otalir 814 à 09h33
 
Accaparé par sa belle, il ne remarqua même pas qu'Harvain lui déposa la carte des boissons. Il lui adressa tout juste un regard par politesse et respect : quand on est bien élevé, on regarde son interlocuteur dans les yeux.

La même chose...

Il se ressaisit, il était encore perdu dans ses rêves avec la diva, qui lui commémorait de vieux souvenirs lorsque jeune il parcourait de nuit le quartier pour rencontrer quelques affriolantes donzelles.

La même chose je vous prie. Deux Islay, doubles, secs. J'aimerai aussi que lorsque Lady Olynn aura terminé, vous lui apportiez un "Mademoiselle de beauté", je pense que vous devez en servir?

Scylla l'en préserve, que son épouse ne revienne pas au foyer : il pouvait désormais passer sa solde en alcool sans que son salaire ne subisse les affres de l'imagination et les extravagances de Dynella. Il fouilla ses poches, les prix n'étaient indiqués nulle part, pas même sur la carte des boissons, mais il avait fait le plein avant de partir et peut être même qui lui resterait assez pour un pourboire.

Soudain un air, quelqu'un chantait quelque chose de très mauvais par dessus la diva. Un petit rigolo oserait-il faire offense à cette déesse du blues? Qui plus est en tentant de la parodier d'une façon tout à fait infâme, ici, devant elle et son public? Il tourna vivement la tête dans tous les sens. Personne ne semblait dire un mot, ni même siffloté. Mais le plus curieux : personne ne semblait remarquer l'affront. La voix était dans sa tête, il n'était pas le seul de son "genre" à s'attarder dans l'antre de l'hermine... Il tenta maladroitement de s'isoler mentalement immédiatement, mais plus il essayer de camoufler ses pensées, plus il les exprimer. Il craqua puis, se résignant, il laissa éclater sa pensée colérique :


Vas tu te taire ou non?!! Tu insultes la diva Olynn et m'empêche d'apprécier son timbre!

 
Thaïs d'Ascara
Commis des Sans Destins
Kil'dé  
Le Julung 30 Otalir 814 à 11h53
 
Doubidouuuu bidouuuuuuuu bidouuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuu

Voilà à peu près la pollution mentale que Thaïs produisait, sans le vouloir, par dessus le chant sirupeux de la sirène au micro.
Elle se permettait même de tapoter du pied, en rythme, un petit sourire sur les lèvres.
Elle était dans son monde.

La pensée de Lelhuü la heurte de plein fouet. Elle regarde partout, un peu incrédule -à droite, à gauche, et même au plafond. Fronce les sourcils. Se mord les lèvres.
Qui parle dans sa tête ?
Quelqu'un comme elle ?

Thaïs étend sa toile mentale, tente d'identifier l'émetteur -ou l'émettrice- de l'invective. "Ca" a parlé de la diva, "ça" doit venir d'ici. De pas loin.
De tout près.

L'esprit fouine dans la salle. Tente de toucher les krolannes un par un par la pensée, à la recherche d'une porte dans laquelle s'engouffrer.
Se ravise -a peur, un instant.

Finalement, reprenant quelques règles de sécurité élémentaire, elle affiche une mine plus sereine, détachée -fixant très naturellement une carte tenue à l'envers- et commence à émettre plus discrètement.

Mille excuses. Je. Je ne contrôle pas encore... cela.
Je suis... simplement... perdue.




 
Harvain
Gens de foyer
Kil'dé  
Le Julung 30 Otalir 814 à 18h24
 
Gagné.

Un gaillard de cet acabit n’allait pas se contenter d’un seul service et Olynn le retient désormais au bar. Il ne mangera probablement pas car il privilégiera la quantité à la qualité.

Très certainement monsieur.

Six doses d’alcool de noix de coco, quatre d’ananas, autant d’orange et une pointe de grenadine. Nous y ajoutons souvent un saupoudré de cannelle pour boiser le goût. Un bon choix, désespérant de classique et de cliché mais un bon choix quand même. Je le vois tourner la tête comme s’il cherchait quelque chose. Quelle mouche le pique ? Cherche-t-il les trois clients de la table d’à côté ?

Je quitte la table alors que j’entends maintenant ces voix chanter. On chante sur ces consensus télépathiques ?? Ma parole, quelle bande de malotrus. J’ouvre une des portes de service incrustée dans le mur. Dans les couloirs réservés au personnel, je m’appuie dos au mur pour souffler un peu et reprendre mes esprits. J’attends quelques minutes puis reprend mon service. Je sers les deux verres à la table huit puis dépose sur un coin du piano sur une petite serviette carrée un verre à pied à côté de la chanteuse.

Je quitte la pièce principale pour revenir au hall. Je croise le jeune garçon qui écoute la musique. Quitter la table en plein repas pour aller écouter de la musique, tsss…



 
Lelhuü
Travailleur
Kil'dé  
Le Julung 6 Nohanur 814 à 08h59
 
Une petite voix s'excuse, mille fois. Une seule aurait suffit. L'intendant s'exécute, bien... Deux verres, à ce prix là combien de litres d'eau je pourrai m'offrir ? C'est tout à fait ridicule de dépenser des sommes pareilles. Mais ai-je le choix ? Arrêter l'alcool ? Non, Dybella n'y est pas arrivée, ce n'est pas ce satané palais qui déconne qui m'en empêchera. S'il faut passer sa solde dans ce trou pour renouer avec le précieux nectar, ce sera chose faite.

Harvain dépose discrètement le cocktail à côté de la diva. Elle sourit, continue de chanter et observe son public à la recherche de son bienfaiteur. Les regards se croisent, se toisent, Lelhuü fait un signe de la tête et la diva le remercie d'un clin d'oeil, sans cesser sa mélopée.

Le final approche, le géant déteste ce moment. La chose qu'il apprécie le plus en ces rares occasions et de s'extirper dans la pénombre, porté par la ravissante mélodie qui s'estompe petit à petit pour ne jamais cesser dans sa tête. La rupture est trop brute, d'un coup on vous expulse de cette douce torpeur pour vous ramener à la réalité, c'est insupportable. L'ouvrier se lève, se dresse de tout son haut et surplombe la haute société, avachie de part et d'autre de lui, ridiculement petite vue d'ici.

Fouillant ses poches à la recherche des hyalins, il se dirige lentement vers le comptoir. C'est Harvain qui l'encaisse. C'est lui qui vous installe puis vous soulage de vos affaires, manteaux et monnaie. Il lui présente un carnet en cuir impeccable finement décoré de fils d'or brodés. Il renferme une note manuscrite qui lui détaille sa dette. Nul besoin de stipuler que la maison ne fait pas crédit. Presque trois hyalins ! Près de deux jours de travail. Il arrondie, pour le pourboire, puis récupère son manteau des mains d'un assistant du maître d'hôtel.

La maison le remercie et les employés le salue. Lelhuü renvoie la politesse et s'échappe du confort pour rejoindre le silence et le froid de la rue en cette heure tardive. Les deux armoires à glace l'observent, le dévisagent, mais le saluent poliment à leur tour. Les salutations sonnent presque faux, ils devaient être au courant de la petite scène du début de soirée.

La nuit, la solitude, le silence, le froid.


 
Oromonde
Prédicateur
Kil'dé  
Le Julung 6 Nohanur 814 à 15h15
 
Il était tard, très tard, trop tard.

« Qu’est-ce-que tu fais, Oromonde ? »

Je ne sais pas, songea-t-elle, mais sa bouche répondit : « Une livraison exceptionnelle de la part de maître Li Yun. »
Sa deuxième belle-sœur jeta un coup d’œil vers le sac de cuir tanné qui à lui seul aurait assuré les revenus de toute la famille. Des parchemins et des vélins de grande qualité, soigneusement calligraphiés et porteurs d’étranges images, y étaient contenus.

« Si tard dans la nuit ? »

Oromonde se tendit en refermant la boucle du sac avec toute l’attention qu’un voleur porte à ses effractions. Elle en fit passer la lanière autour de son cou.

« Quand maître Yi Lun me demande quelque chose, je ne pose pas de questions, et je le fais », répondit-elle d’une voix douce, sans croiser le regard de sa belle-sœur.
Cette dernière opina de la tête. Tout le monde savait que cela faisait partie des prédictions qui concernaient Oromonde : une servilité à en mourir…
Intérieurement, Oromonde frémit. Elle découvrait que, pourvu qu’on s’en tienne à la vérité, on pouvait toujours mentir…

**
Elle avait bien réfléchi depuis son rêve.

Si elle était devenue cette chose effrayante qu’on appelait Lanyshta – et elle ne doutait plus de cela -, sa promiscuité familiale allait devenir un fardeau ; bien qu’elle ait fait attention à ne rien laisser paraître des troubles qui agitaient son âme, qui pouvait garantir qu’elle serait capable de prolonger cette attention indéfiniment ? Les nombreuses migraines qui l’affectaient d’ores et déjà nuisaient à sa concentration habituelle, et elle vivait dans la crainte qu’on le remarque. Il était temps qu’elle quitte le taudis des Fissures où elle vivait ; temps qu’elle obtienne un apprentissage différent qui pourrait toujours se dissimuler sous ce qu’on avait prédit de son existence. Pour cela, bien sûr, il fallait des hyalins...
Elle avait donc proposé spontanément à son maître d’accomplir ses livraisons. Le calligraphe avait accepté, bien sûr : elle s’était assurée de faire passer toutes ses commandes le même jour, afin que, surchargé de travail, Li Yun ne se pose pas trop de questions. En bref : elle devenait paranoïaque.

Elle avait réussi à arranger trois livraisons et négociations différentes, chacune à des places où elle espérait pouvoir mendier un travail subsidiaire ou extorquer quelques hyalins à son propre compte. Comme celles-ci étaient prestigieuses – trop prestigieuses pour l’origine modeste de la jeune krolanne -, elle se doutait bien qu’elle n’aurait jamais pu y mettre les pieds autrement, et encore moins tenter de marchander avec elles…mais sous le couvert de maître Yi Lun, les choses, bien sûr, étaient différentes.

Elle cacha son visage derrière le long col de son manteau pour se protéger du vent gelé de la nuit et se pressa, ignorant les regards et les saluts des garçons des Fissures qui la connaissaient bien.

« -Où est-ce-que tu cours, l’Oro ? Viens donc t’épancher avec nous autres ! Ah !
- Ils vont lancer des paris, ramène ton frère, le grand Goth !
- Bah alors ? T'es invitée quelque part, petite soeur ?
- Réponds, au moins !

- Je travaille.»

Les Fissures : ce panier à crabe géant de Kil’dé, où chacun savait tout sur son voisin et pourtant y trouvait toujours quelque chose à redire…fort heureusement, elle avait beaucoup de frères ce qui faisait d'elle "la petite soeur" de son quartier, et elle assistait assez régulièrement les femmes en couche et les personnes âgées pour qu'on la laisse tranquille...Plus ou moins.

Première destination : l’Hermine de cristal. Oromonde connaissait l’établissement de nom, bien sûr, et savait très bien que les souillons de son espèce n’y entraient jamais.
Elle se demanda pourquoi. Etait-ce parce que l’établissement les refuserait, ou était-ce plutôt parce qu’on se refusait même d’essayer… ? Qu'est-ce-qui l'interdisait vraiment ? Il n'y avait aucun texte, aucune Loi, et pourtant chacun agissait comme si une main invisible les poussait hors des beaux quartiers...

Elle traversa les Parapets, n’hésitant pas à emprunter tous les raccourcis qu’elle connaissait pour éviter les zones où les travailleurs locaux venaient boire de l’alcool bon marché pour se remettre de leurs journées. D’ordinaire, elle adorait passer par ce quartier pour pouvoir longer la muraille et admirer la plaine Extérieure ; mais, à la nuit tombée, la fréquentation en était beaucoup moins calme, aussi se contenta-t-elle de se faufiler telle une souris dans les multiples mailles du filet. Puis elle repiqua promptement vers le bazar de Thün, glissa entre les rares marchandises qu’on proposait encore, ignora les vendeurs ambulants et, au terme d’une courte ruelle obscure, se retrouva face à l’Hermine. Les rues étaient beaucoup plus propres ici et elle n’avait pas à enjamber les restes de nombreux estomacs, aussi se sentit-elle mal à l’aise en évoluant vers l’entrée du restaurant, où elle était persuadée que les deux gardiens qui en barraient le passage l’observaient déjà avec dédain.

Respire un bon coup, songea-t-elle, et elle crispa légèrement la main sur son sac. Comme elle ne faisait pas attention, elle manqua percuter un krolanne gigantesque qui venait juste d’émerger du prestigieux bar, et se maudit intérieurement d’être si grande et si maladroite. Elle s’excusa tout bas et poursuivit jusqu’aux vigiles.
Quel embarras…elle se racla la gorge et dit :

« Bonsoir messieurs…je suis envoyée par Maître Li Yun. Votre établissement a commandé des exemplaires de présentation pour sa prochaine carte, c’est cela… ? »

Elle resta très droite le temps que les deux gardes se mettent d’accord sur la marche à suivre. On lui indiqua la porte de derrière et elle rentra dans les cuisines, affectant une raideur qui voulait passer pour de l’assurance.

« On va vous envoyer quelqu’un pour s’occuper de ça. »

La cuisine était pleine de monde et de bruits, et personne ne faisait attention à elle, ce qui ne changeait pas beaucoup Oromonde qui éprouvait le désir de tourner les talons et de rentrer chez elle.
Par-dessus le brouhaha, pourtant, il y avait comme une voix divine et un air lancinant qui firent beaucoup d’effet sur la petite artisane…
Si seulement elle avait été doué de ce genre de talents !

Comme on lui avait dit d’attendre ce mystérieux commanditaire, la jeune femme se mit dans un coin de la cuisine et resta parfaitement immobile, le visage fendu d’une expression grave et doucereuse.


Mon nom est Personne.
*Le Chaudon qui Fume*
 
Harvain
Gens de foyer
Kil'dé  
Le Julung 6 Nohanur 814 à 17h17
 
La fin de la soirée arrive en douceur. Lady Olynn quitte la scène pour de bon après deux rappels. Quelques clients commencent à partir, au moins ont-ils été suffisamment polis pour ne pas partir pendant. Si ça ne tenait qu’à moi, je verrouillerai les portes de l’établissement pendant le récital. C’est comme quitter un repas en cours. J’en frissonnerai presque, quelle horreur ! Les bonnes manières se perdent tellement de nos jours.

J’encaisse le douze. La gestion des pourboires est chez nous mutualisée et je mets un point d’honneur à ce qu’ils soient répartis équitablement entre tous. Le rôle de chacun est tout aussi important et personne n’est irremplaçable, du plus petit commis de cuisine à moi-même, la même part pour chacun. Sauf parfois, certaines exceptions font jurisprudence et j’autorise unilatéralement des dérogations. Je laisserai le pourboire du douze à « La dernière » qui nous a évités souvent des problèmes. Quelques habitués continuent à rester après, savourant autant que moi les grands espaces vides.

Je suis à mon pupitre dans le hall d’entrée, je prends note des prochaines réservations pour le reste de la semaine. D’un tiroir, je sors un petit carnet noir sur lequel j’inscris les noms des personnes qui avaient réservées et qui ne sont pas venues. Ce manque d’éducation me dégoûte au plus haut point. Oh bien sûr, ils seront toujours aussi bien servis en venant ici et j’appliquerai le même zèle à répondre à leurs attentes. Mais je n’oublierai pas de les considérer comme il se doit.

Un commis vient me prévenir que notre livraison de menus vient d’arriver. Je hausse le sourcil droit, de surprise. Je sors ma montre gousset et l’ouvre d’une pression du pouce.


A cette heure ?

Je la range et part en direction de la cuisine. Le « coup de feu » comme on dit en restauration, c’est-à-dire la période où les clients commandent en même temps, est fini. Les équipes s’activent pour ranger les plats, nettoyer les plans de travail, finir la plonge, nettoyer les cuivres et grignoter les restes. Je traverse la pièce, seul élément « noir » au milieu de tous ces « blancs ». Je m’arrête avant vers le chef avec qui je m’entretiens quelques minutes. Toujours le même celui-là, il veut faire plus grand, plus beau, plus raffiné. Sauf que lui, il ne pense pas au prix que nous allons proposer ça et que les clients qui peuvent se payer ses plats, ça ne pousse pas dans les arbres. Je botte en touche, ça sera au directeur de trancher. Je ne suis qu’un employé comme les autres. Je le remercie et continue à avancer jusqu’au fond de la cuisine.

Hum, eh bien. Cette jeune fille doit faire ma taille. Vêtements propres mais usés, aucune mise en valeur, plutôt maigre de visage, pas de bijoux apparents, coupe de cheveux anarchique. Les mains ne sont pas calleuses à première vue donc peu de travaux manuels lourds. Baisse les yeux, a peur des autres. Je la classe immédiatement dans la catégorie « pauvre mais avec une estime de soi ». J’observe.


Bonsoir mademoiselle…

Je baisse les yeux sur le sac.

Si vous voulez bien me suivre.

Je traverse en sens inverse la cuisine, je prends mon temps. J’ouvre une porte donnant sur un couloir de service étroit. Après quelques mètres, nous bifurquons à droite pour déboucher sur ce qui est une salle pour le personnel avec les casiers, une grande table centrale et quelques serveurs qui se prélassent. Une autre porte ouverte donne sur un tout petit bureau sans fenêtre où peuvent tenir trois personnes au plus. Un vieux meuble secrétaire adossé à un mur, une chaise pliante devant, un tabouret dans un coin et une petite armoire pleine à craquer. Je laisse la coursière entrer en premier puis rentre à mon tour. Je laisse la porte ouverte à mon accoutumée et appuie sur l’interrupteur.

Elle reste droite comme un i. Je désigne le tabouret.


Je vous en prie, asseyez-vous.

Je m’attable devant le secrétaire et déplie le panneau de travail. D’une poche intérieure, je sors une fine paire de lunettes avec les verres en demi-lune. Je les pose sur le bout du nez et tends la main.


 
Oromonde
Prédicateur
Kil'dé  
Le Luang 10 Nohanur 814 à 13h31
 

Oromonde salue le majordome et prend naturellement sa suite. Comme elle est quasiment aussi grande que lui et qu’elle a les jambes longues et la démarche rapide, cela lui demande un peu de concentration pour éviter de lui rentrer dedans, ce qui n’est pas sans faire sourire les serveurs qui se détendent dans la salle près du bureau du contremaître de l’établissement.

La salle est austère, ascétique. Sans se présenter, le quinquagénaire lui désigne le tablier et prépare avec une efficacité qui relevait de l’habitude une petite trousse de travail d’où il sort une paire de binocles qu’Oromonde lui envie quasiment instantanément.

Elle se refuse néanmoins à s’installer sur le petit tabouret. De son expérience, elle sait très bien être trop sèche et trop grande pour être vraiment à l’aise sur ce type de meuble, et un brin trop maladroite aussi pour ne pas ressembler à un pingouin mal à l’aise. Qui plus est, aussi austère que soit la petit pièce, l’établissement reste un domaine de luxe : qu’on l’y reçoive en lui proposant un modeste tabouret de bois dur frise l’insulte, ou en tout cas établit clairement la hiérarchie locale.

« - Je préfère rester debout, merci beaucoup. »

Elle fait coulisser la lanière du lourd sac de cuir qu’elle porte sur son épaule et le pose sur le tabouret en question. Avec sa prudence habituelle, elle en fait émerger un dossier relié avec soi qui contient cinq exemplaires différents de la même carte, disponible avec quelques subtiles différences à chaque fois.
Elle continue de sa voix ronde et chaude, aussi douce que ses gestes sont pointus :

« - Je ne me suis pas présentée. Je m’appelle Oromonde. Je suis une des élèves de Maître Li Yun, que vous avez contacté plus tôt dans la semaine. Mon maître s’excuse de ne pas avoir pu venir lui-même ; il a en effet eu beaucoup de travail, et m’a chargé de venir vous voir au plus tôt pour vous présenter son travail. »

Elle tend le livre de présentation au majordome et le laisse examiner le travail, explicitant volontiers de ci et de là ce qu’il y a à savoir sur le travail en question.

« …Ici, l’illustration est placée plus en marge, afin de laisser un alinéa plus conséquent qui met plus en valeur les titres des formules…
…L’encre est teintée d’azurine…
…la reliure est en cuir, le parchemin côté fleur y est plus granulé, la contexture est un peu particulière, originale…
…des veaux très jeunes ont été utilisés pour confectionner ce vélin très pur, à demi-transparent comme vous pouvez le voir, très cher, aussi, car noble et prestigieux…difficile à fabriquer en quantité…
…là, on a utilisé du papier défibré à partir de chanvre…c’est un peu plus commun, plus pratique aussi, et évidemment moins coûteux…on l’a passé dans un presse encolleuse pour lui donner toutefois un peu de caractère…
…la carte des boissons est un peu plus fantaisiste, forcément…
Voilà. Puis-je vous aider à répondre à d’autres questions ? »


Finalement, ce n’était pas si déplaisant que ça de discuter un peu avec quelqu’un sur son travail…par contre, son mal de crâne reprenait et elle se sentait perdre contrôle sur le capharnaüm de pensées entrelacées qui dévoraient son esprit, et dont toutes n'étaient pas les siennes. Elle grimaça brièvement et porta la main à la tempe.



Mon nom est Personne.
*Le Chaudon qui Fume*
 
Harvain
Gens de foyer
Kil'dé  
Le Luang 10 Nohanur 814 à 16h45
 
J’écoute, attentif, l’exposé de cette jeune femme. Je ne savais pas que le vieux Yun avait pris une apprentie. Oh ma mémoire doit me jouer des tours. Encore. J’aime bien le grain du papier, comme si chaque feuille avait une histoire différente. Et pour le coup, entre un papier raffiné et un jeune veau, oui l’histoire n’est pas la même… J’ai une petite préférence pour le papier, plus malléable, plus adaptable, moins noble malheureusement oui.

J’essaye de me mettre dans la peau d’un client, dans la même situation. J’arrive de la rue, il fait froid, je m’installe, on me tend un menu. Comment j’aimerai qu’il soit. Ce n’est pas un menu pour manger ou boire, c’est l’itinéraire de ma soirée, en trois étapes. Une entrée. Un plat. Un dessert. J’ai envie que cet itinéraire, cette carte m’amène à la bonne destination et de la bonne façon. J’ai envie d’avoir une sensation unique, que je n’ai jamais rencontrée et que je ne rencontrerai plus jamais. Même si je reviens le lendemain. La couverture doit être en cuir forcément mais le papier, c’est plus délicat…

« Un vert appelé éméraldine, un bleu azurine, et le noir intense d’aniline, ne se sont développés que sur les fibres végétales »…où ai-je entendu cette phrase ? Oh ça fait si longtemps. Ma pauvre tête, mais ils en font un raffut ces lanyshstas ! Ne peuvent-ils pas se taire, quels sans-gênes ma parole. Allez concentrons-nous.


De très belles pièces assurément mademoiselle. Veuillez transmettre une nouvelle fois mes plus belles félicitations à votre maître pour l’exceptionnelle qualité de son travail. L’hermine de cristal continuera à lui assurer l’exclusivité de ses fournitures en ce domaine.

Je saisis les feuilles que je tends devant la lampe pour voir la transparence.

Votre maître est toujours le bienvenu dans notre modeste établissement. Nous avons reçu un nouvel assortiment de thés qui, je l’espère, saura satisfaire son palais exigeant.

Je réfléchis.

Hum…

Je me disais, que penseriez-vous d’ajouter un filigrane aux pages ? Sur du papier bien entendu. Peut-être mettre… « l’hermine de cristal » ? Hum…non non, à quoi bon l’écrire puisqu’on le sait. Ou alors le symbole de notre établissement ? En central grande taille ou dans un coin plus petit ?

Pour la typographie, j’aime bien ce modèle-ci. Classique, sobre, élégant, formel.


Je jette un œil à la carte des boissons. Deux secondes pas plus.

Trop fantaisiste par contre mademoiselle. Nous ne sommes pas dans un cabaret ou au grimborg grillé. La clientèle qui commande nos cocktails ou certaines boissons à 15 graines le verre ne souhaitera probablement pas de… « fantaisie ».

Je réfléchis.

Fut une époque, je crois, nous avions tenté une carte des boissons avec un type de papier différent par alcool, une police différente, une casse différente…échec. Nous souhaitons depuis garder un socle commun, discret mais reconnaissable. Mais je reste toujours à la recherche d’un je-ne-sais-quoi qui pourrait distinguer nos alcools, nos prestations… Peut-être une couleur différente.

Je lève la tête et retire mes lunettes. Je sais que je suis pénible mais de là à donner une migraine. Ah ces jeunes, probablement à boire et à manger n’importe quoi. Voilà le résultat.


 
Oromonde
Prédicateur
Kil'dé  
Le Julung 13 Nohanur 814 à 16h22
 
« Le nescio quid, bien sûr », approuva la krolanne avec un sourire timide, aiguisé nerveusement par la migraine douloureuse qui sourdait de son crâne. Que de raffut, que de chaos… : que de choses qu’Oromonde ne saisissait qu’à peine !

Avec effort, elle se concentra sur la discussion en court et jeta un coup d’œil sur les exemplaires qu’a préféré le majordome.

« Si je puis vous donner un conseil, monsieur, concernant le filigrane : évitons la disposition centrale, elle est un peu vulgaire pour établissement. Si je comprends bien vos exigences, il vous faut quelque chose de plus subtil… » Ici, elle s’arrêta pour réfléchir, et saisit la liasse élue entre toutes entre ses doigts papillonnants. Elle avait plus l’habitude de manipuler ce qui faisait la matière des livres que les œuvres elles-mêmes, et avait développé avec le temps un certain attachement aux différentes sensations qu’appelaient un bon travail de papier : le crissement du grain ou son froissement soupiré, l’odeur, bien sûr, l’odeur devait être spéciale, et la rugosité sous la pulpe des doigts…on parlait de peaux et de corps, ici. Certes, elle n’était pas Li Yun, dont la folie excentrique et exigeante et le talent faisait légende dans son quartier ; mais cela faisait quelques temps qu’elle vivait sous sa stricte garde, et le vieux renard lui avait enseigné deux ou trois trucs quant à ce qui concerne le ventre ronronnant des presses et l’énigme sans visage de tout ce qu’on lit entre les mains.

« …une reprise filigranée en haut de page, plutôt, à un centimètre vingt-sept de la marge…coloris doré. Une miniature du logo avec les lettres entrecroisées…bien entendu, cela augmenterait le tarif, avec une réduction de groupe…pour la carte des boissons, je ne sais pas, quelque chose d’un peu surprenant et formel…je pensais… » Elle hésita. Si Li Yun était là, il lui aurait sans doute d’ores et déjà tapé du doigt avec son impitoyable règle de bois ! Et aurait dit quelque chose comme ‘Je ne te paie pas pour penser, Oromonde, mais pour faire…le krolanne n’est que krolanne faber, être de main, sache-le maintenant et toujours !’ Li Yun arborait les grands discours et ne supportait guère la parole là où le geste pouvait agir…Mais Li Yun était un génie, ce que n’était pas la toute nouvelle Lanyshta. Elle poursuivit timidement : « …nous pourrions disposer d’un carnet relié plus souple, dans le même code typographique et déclinaison de couleurs, mais de dimensions différentes, avec un historique peut-être sur l’établissement, et, hmm, au lieu d’un filigrane, y placer une hermine en origami sur la couverture : ce n’est pas si difficile à faire, cela demande juste un traitement manuel personnel, je peux tout à fait m’en charger…travailler sur une différence de relief plutôt de que texture ou de mise en forme…des enluminures, peut-être. »

Elle croisa les doigts et laissa sa voix mourir, pas très sûre de ce qu’elle venait d’avancer. Li Yun n’aurait pas du tout argumenté les choses comme ça !



Mon nom est Personne.
*Le Chaudon qui Fume*
 
Harvain
Gens de foyer
Kil'dé  
Le Vayang 14 Nohanur 814 à 22h26
 
Je hoche la tête devant les propositions. Mes modestes connaissances arrivent vite à leur limite. Hâtivement, je sors une feuille et une plume pour prendre quelques notes. J’écoute, sérieux, la jeune apprentie. Je griffonne quelques idées supplémentaires et pense-bêtes. Une fois fini, je relève la tête.

Ces propositions m’ont l’air tout à fait dans le ton de ce que nous cherchons mademoiselle.

Je me tourne vers le meuble et farfouille dans un tiroir pour en extraire une liasse de papiers. Il s’agit des pages du menu actuel annotées d'une myriade de commentaires écrits par plusieurs personnes. Quelques ratures, des ronds de café sur un coin, des dessins incompréhensibles, des encadrés… Un vrai document de travail où au moins deux acharnés ont dû passer des heures du jour et de la nuit dessus.

Voici le menu de la prochaine saison ainsi que les nouvelles boissons proposées pour vos presses.

Je farfouille dans un autre tiroir pour en sortir une petite boite rectangulaire. Je rechausse mes lunettes sur le bout du nez et commence à compter.

Voici cinquante graines comme acompte, ça n’a pas changé je suppose ? Le solde à la livraison.

Je tends la bourse garnie à l’apprentie sans être conscient de la somme que ça peut représenter. Je jette un œil à ma montre gousset. Ah c’est l’heure.

Excusez-moi.

Je me lève en tirant la grimace. Mon dos… Décidément, être lanyshsta n’apporte vraiment rien ! Quelle plaie. J’entends des personnes qui n’ont aucune éducation, qui bafouent les bonnes manières, j’en entends même chanter parfois ! Quel sans-gêne ! Je suis sûr qu’ils ne savent pas faire un nœud de cravate ces malotrus. Si au moins ça me rendait plus jeune ! Mais non, à la place, je suis télépathe… A quoi ça m’avance humf

Fichtre, j’ai peut-être pensé un peu fort, ils ont encore du m’entendre sur ce consensus télépathique.

Je quitte le bureau pour faire un tour en cuisine à la recherche d’une bricole à grignoter. Je prends un plateau du service et commence à le remplir. Ah parfait, il reste des parts du mille-feuilles de ce soir. Le coulis de fruits rouges doit être quelque part par là…ah voilà. Hop. Hum, sachons soigner la représentante de notre fournisseur. Une part un peu plus grande. Voyons pour le thé… Un goût boisé, fort pour relever la pâtisserie mais pas trop pour ne pas l’étouffer. Un thé noir poudre de canon sera bien. Feuilles brisées ou broyées ? Si c’est un coulis de fruits rouges, broyées bien sûr.

Je sors une théière que je mets à chauffer. Machinalement, j’exécute les gestes de préparation, avec rigidité mais efficacité. Une fois l’eau chaude, je vide la théière puis la laisse lentement refroidir pendant que je fais mes dosages. Deux tasses, cinq grammes pas plus, pas moins dans le filtre. De nouveau trois verres et demi d’eau, pas plus pas moins versés dans l’ustensile. Je sors ma montre et commence à compter. Deux minutes trente, pas plus pas moins. Je remue la théière pour que le tout soit homogène. Dans les deux tasses légèrement préchauffées pour ne pas faire de choc thermique, je verse le thé. Soucoupe, cuillère à thé, sucrier, fourchette pour le gâteau, tout y est. J’enfile mes gants par réflexe.

J’empoigne le plateau des deux mains et revient dans le bureau. Je le dépose sur le panneau de travail pour tendre à Oromonde la soucoupe et la tasse fumante. Je dépose son assiette avec le mille-feuilles sur un coin du panneau vers elle.


Pour ce soir, un thé poudre à canon du Kil dara avec son mille-feuilles sur coulis de fruits rouges.

Je dépose ma tasse et mon assiette sur un tiroir laissé ouvert comme support en hauteur. Je saisis la tasse puis hume la vapeur, sourire fugace sur mon visage puis je sirote du bout des lèvres. Je me laisse aller sur ma chaise


 
Oromonde
Prédicateur
Kil'dé  
Le Luang 17 Nohanur 814 à 20h36
 

Oromonde se saisit des affaires que lui tend Harvain avec une prudence sacerdotale, paniquant déjà intérieurement à l’idée d’effriter un menu ou de se faire dérober la bourse de hyalins, dont elle se rend compte qu’il va être plus compliqué de prévu d’en délester quelques éléments…

Quand, toutefois, le quinquagénaire se lève et commence à grimacer, la jeune femme toute automatiquement se déplie – mouvement toujours intéressant chez Oromonde dont la carcasse est ainsi faite qu’elle donne l’impression d’être montée sur un ressort à vertèbres.

« Vous allez bien ? » hasarde-t-elle avec inquiétude, mais Harvain lui fait signe que oui. Toutefois, alors qu’elle approche le bras et le torse pour soutenir le geste douloureux, elle entend…

Elle entend quelqu’un qui pense en même temps dans les entrelacs, une pensée ténue et échappée, dont elle ignore même comment elle a pu la capter – alors qu’elle n’est pas particulièrement attentive à tout ce qui s’y trouve. Or, c’est étonnant comme cette dernière a une résonnance particulière avec l’instant présent…de surprise, et sans être bien sûre de ce qui se passe, Oromonde fait un pas en arrière précipité et manque renverser le tabouret.

Quelle maladroite !

Heureusement, Harvain quitte la pièce sans prêter attention à son trouble, ce qui lui offre quelques minutes pour se recomposer. Mais d’où diable venaient toutes ces intermittentes rêvasseries et autres songeries qui lui rongeaient l’esprit ? Pourquoi n’a-t-elle pas le même contrôle que d’habitude sur sa sensibilité mentale ? Tout est encore nouveau, bien sûr, mais…mais Oromonde est douée pour ne rien laisser percer, n’est-ce-pas ?

Intérieurement, elle fulmine de la réceptivité non désirée avec laquelle elle perçoit ce soir les multiples signaux télépathiques de la communauté Lanyshta, et prend quelques longues inspirations pour tâcher de se concentrer sur la situation actuelle.

Il ne faut pas qu’on me prenne pour une folle, songe-t-elle (un peu fort).

Contre toute attente, le majordome finit par revenir, mais pas seul. Il est précédé d’un plateau de biscuits surmonté d’une théière tout à fait respectable et qui inspire aussitôt un brin de désir à la krolanne assoiffée, qui a tout de même fait une sacrée route de nuit pour en arriver là.

Elle comprend, alors que le vieil homme la sert, que ce petit ‘encas’ surprise doit sans doute être celui que favorise son maître Li Yun, grand amateur de thés. Elle pique du nez dans sa tasse, les yeux ronds, ne sachant pas trop quoi dire. Ah, si :

« Merci beaucoup. »

Wah. Dans la même soirée, elle est rentrée à l’Hermine de Cristal (par la petite porte, certes, mais tout de même), a négocié avec le responsable, et s’est fait offrir un thé. Woaw !
Bien sûr, tout ça serait encore mieux si elle disposait en sus d’un sujet de conversation intéressant…mais en la matière, Oromonde n’est pas la plus fertile.

En silence, donc.

Une gorgée.
Slurrrrrp.
Une seconde.
Slurrrrrp.
Une dent dans le mille-feuille…
Crunch, crunch.

Elle repose le mille-feuille pour s’éviter l’embarras de le gober en entier devant le majordome, remue un peu.
Le silence commence à se faire pesant.

«Auriez-vous des besoins en personnel de soirée dans votre établissement ? » commence-t-elle d’une voix timide.



Mon nom est Personne.
*Le Chaudon qui Fume*
 
Harvain
Gens de foyer
Kil'dé  
Le Vayang 21 Nohanur 814 à 15h33
 
*** Ambiance ***


Je hausse un sourcil. Tant pis, je dois tenter. Scylla me vienne en aide, je suis trop vieux pour ces âneries. Je mettrai de côté les bruitages peu ragoûtants. On ne fait pas un tel raffut quand on boit le thé, ma parole, ces jeunes n’apprennent rien. Que lui enseigne donc son maître ?

Mais revenons-en à nos moutons.


L’hermine de cristal a toujours besoin de personnel. Nous demandons un haut niveau de maîtrise en hôtellerie, une tenue irréprochable et une attitude exemplaire. Nous avons du mal à recruter du bon personnel de nos jours. Mais nous nous targuons de donner sa chance à quiconque l’ose.

Et plus important encore…


Je repose ma tasse.

Nous avons besoin de personnes comme vous.

Cette dernière phrase n’est pas sortie de mes lèvres. Cette dernière phrase n’a pas été prononcée à haute voix. Cette dernière phrase, je l’ai envoyée avec ma tête.



 
Oromonde
Prédicateur
Kil'dé  
Le Luang 24 Nohanur 814 à 13h14
 
Oh.
Oooooh.

Donc…elle n’a pas seulement rêvé, tout à l’heure. La répétitivité du même phénomène est clairement un facteur qu’il s’est réellement produit…et que cela n’a rien à voir avec les Entrelacs. Un instant d’inquiétude saisit et trouble la krolanne, qui repose sa tasse de thé avec un faux calme et une composition qu’elle est loin de ressentir.
Bon…
Vous n’auriez pas pris le risque que vous venez de prendre si vous n’étiez pas certain de ce que vous avancez, répond Oromonde en se concentrant. (et en se demandant ce qui l'a trahi.)

Elle est encore assez nouvelle à ce jeu de dupes et former des pensées cohérentes et ‘audibles’ lui paraît toujours un peu difficile.

J’en conclus que je ne suis pas la seule de ma…particularité à vous avoir abordé et que vous avez l’habitude ce type de commerce.
J’ai une question, néanmoins
.


Oromonde détourne le regard, peu habile pour toutes ces rhétoriques. Et si elle avait imaginé ce qui s’était produit, ou que quelqu’un d’autre l’avait pensé…et que depuis tout à l’heure, le majordome l’observait froncer les sourcils avec effort avec une drôle d’expression dans le regard, sans qu’elle ne dise rien pour autant ? Brrr. Ce serait...dommageable.

Elle finit à haute voix :
Quand est-ce-que je peux être mise à l’essai ?



Mon nom est Personne.
*Le Chaudon qui Fume*
 
Harvain
Gens de foyer
Kil'dé  
Le Luang 24 Nohanur 814 à 21h04
 
*** Ambiance ***


Je me coupe une part de mille-feuilles tout en écoutant cette jeune apprentie. Je prends mon temps avant de répondre, je sens la fumée qui s’échappe de ma tasse de thé en me disant qu’il faudrait que je prenne rendez-vous avec le caviste pour passer de nouvelles commandes. Et puis il m’avait parlé d’une bonne cuvée à me faire goûter.

Je regarde par-delà la porte du bureau ouverte. Je préfère la laisser ainsi. Cela a toujours été ma politique et la fermer pour plus de discrétion attirerait davantage l’attention. Suffit juste de ne pas parler trop fort.


Quel risque aurai-je pris ? J’aurai… « pensé » dans le vide et personne d’autre ne m’aurait entendu…coup d’œil rapide sur sa main gauche. mademoiselle.

Détrompez-vous. Je suis tout aussi… « inexpérimenté » que vous. Je tâtonne… Même si…


J’essaye de me souvenir.

J’ai eu la forte impression, maintenant que j’y pense, que plus tôt dans la soirée, un ou plusieurs clients…en étaient. Je…

Je suis moins sûr d’un coup.

Je…ne crois pas aux coïncidences. Tout est écrit, tout est prévu, les Augures ne peuvent se tromper.

Je hume de nouveau la tasse puis en boit une gorgée.

Nous avons du mal à cloisonner nos pensées même si on dirait qu’il faut un acte conscient de volonté pour « communiquer » ainsi. Quant à ce large consensus télépathique, ce bourdonnement incessant, je n’ai malheureusement pas de solution. Je suppose qu’avec l’expérience viendra la possibilité de mettre en sourdine ces pensées.

Je repose la tasse et laisse la cuillère sur le côté droit du mille-feuille comme le demande la bienséance.

Chaque chose en son temps jeune dame.

Ah ces jeunes. Tout vouloir tout de suite, maintenant...avidité humf. Je hausse le sourcil gauche.

Après l'accord de votre maître en bonne et due forme car jusqu'à nouvel ordre, il a tout droit sur votre personne. Ensuite, nous pourrons vous compter dans nos effectifs. Bien entendu, vous ne serez pas lâchée dans la salle principale avec votre plateau et vos manières...disons maladroites.

Pour ne pas dire rustres.

Vous serez soumise à une formation difficile entre les mains de nos meilleurs éléments, moi y compris. Sur l'hôtellerie, les bonnes manières, la gastronomie, la maîtrise des accords mets/vins, dresser une table, savoir accueillir un client, l'organisation du service, le vocabulaire, le savoir-être, le savoir-faire.

Scylla me vienne en aide, nous partirions de zéro.

Le fait que nous ayons ce..."point commun" ne vous dispensera d'aucune obligation et vous serez soumise au même traitement exigeant que n'importe quelle autre personne sous ce toit. Je n'échappe à aucune de ces règles bien entendu. Je lâchai ces mots sur un ton plus rigide que je ne l'aurai souhaité.

Un coup d'oeil à ma montre, je rechausse mes lunettes.

Ce que nous offrons ? Une formation considérée comme d'élite, une élévation sociale pour ceux qui partent d'en bas, un réseau auprès de tous les grands établissements de notre Kil, un salaire honnête et un jour de repos par semaine. Vous aurez un uniforme de fonction sur mesure, nous le paierons, vous l'entretiendrez. Les pourboires sont mutualisés, vous aurez une part égale à tout le monde. Et comme les autres, vous pourrez ramener des restes chez vous, du moment que c'est raisonnable.

Une fois votre formation achevée, vous serez serveuse pour vous familiariser avec les bases du métier. Ensuite, selon vos appétences et vos compétences, vous pourrez évoluer sur des fonctions plus spécialisées comme barman, sommelier ou en cuisine comme saucier, pâtissier....

Ensuite...

Je réfléchis. Tellement de choses dépendront d'elle. Elle n'a pas l'air lente d'esprit si elle a réussi à être l'apprentie de Li Yun. Elle doit avoir des qualités mais il va falloir les trouver, les maîtriser et les magnifier...Mais elle pourrait être une nouvelle "La dernière".

Nous...verrons bien. A deux, nous aurons plus de chance de trouver d'autres personnes comme nous.susurrai-je dans son esprit.


 
Oromonde
Prédicateur
Kil'dé  
Le Vayang 28 Nohanur 814 à 13h06
 

Oromonde écoute les diligences du majordome avec cette allure plate et respectueuse qu’ont tous les bons élèves, mais sans plus, de l’univers. Quelque chose dans sa façon de positionner ses mains raides sur ses genoux, dans le battement lent de ses iris attentifs, renvoient la curieuse impression qu’elle est en train de prendre des notes – alors que, par ailleurs, les propos d’Harvain relèvent d’un bon sens plutôt commun. Malgré tout, pour on ne sait quelle raison, Oromonde se sent l’envie de répondre : « Oui, chef ! » à chacune des injonctions du vieil homme.

Malgré tout, ce qu’il dit lui fait peur et Harvain peut le sentir dans les altérations ramifiées de ses projections spirituelles. C’est qu’au Kildé, on ne change pas tout simplement comme ça de profession. Bien sûr, les Augures en ce qui la concerne sont plus que laissés à l’interprétation, mais il faut dire aussi qu’ils ne sont guère positifs…
La raison en est qu’ils prévoient sa mort prochaine. Raison pour laquelle Oromonde se garde en général d’en livrer le contenu à ceux qu’elle croise…
Elle opine de la tête.

Je comprends vos exigences. Je reviendrai vers vous avec l’accord de mon maître et des Augures, ou ne reviendrai pas.

Prend une gorgée de thé. Une chose l’intrigue. Harvain mentionne une volonté de découvrir d’autres lanyshtas.

Si votre établissement devenait un refuge clandestin des nôtres,…comment le prendriez-vous ?
Bien que je sois partisane d’une union et d’une entraide des nôtres plutôt que de notre diaspora…je me demande quelles sont vos intentions concernant les autres. Si tant est qu’ils sont aussi nombreux que nous les croyons. Il est plus effrayant encore de songer que nous ne sommes peut-être qu’une poignée au Kil’Dé…




Mon nom est Personne.
*Le Chaudon qui Fume*
 
Harvain
Gens de foyer
Kil'dé  
Le Sukra 29 Nohanur 814 à 12h09
 
Je regarde ma tasse et hausse un sourcil. Déjà finie ?! Ma parole, j'ai bu ça comme un soiffard, décidément, il y a du laisser-aller dans mes manières. Quelle honte, si mon professeur voyait ça, il sortirait sa badine... J'ai presque peur de le voir débarquer devant ma porte en disant mon nom avec son accent de vieux hibou. Si tant est que les hiboux aient un accent.

Je suis modérément contre cette idée. L'hermine de cristal n'a pas vocation a être un tel endroit. Le dirigeant de cette paisible institution n'aimerait probablement pas être un centre d'accueil pour réfugiés. Nous voyons bien sur le consensus que tout le monde ne possède pas la même...comment dire...éducation pour se tenir correctement en société.
rétorquai-je dans sa tête.

Scylla me préserve ne serait-ce de les avoir comme clients...

Toutefois, si certains lanyshstas se comportent de manière appropriée, j'entends comme des clients dignes de notre établissement rien ne s'oppose à ce qu'ils viennent. De même, j'imagine que rien ne m'empêche d'en engager certains s'ils ont des talents particuliers pour le service.


Une des premières règles que nous apprenons dans le métier. Il ne faut pas confondre ce qui est personnel de ce qui est important.



 
Oromonde
Prédicateur
Kil'dé  
Le Luang 1 Dasawar 814 à 13h18
 

Oromonde hoche la tête. Rien de très surprenant dans la réponse d’Harvain, il ne s’agit que de bon sens, or le bon sens n’est-il pas la chose la mieux partagée du monde… ?

Elle déplie ses longues jambes recouvertes d’un pantalon recousu, arrange sans y penser ses cheveux courts qui coulent devant ses yeux.
« Je vous remercie d’avoir accepté ma proposition et de m'avoir fait preuve d'hospitalité."
Et d"assez de confiance pour vous révéler à moi.

"Je vais en parler à maître Yun dès demain. Je ne peux pas simplement quitter l’atelier, il compte beaucoup sur moi, mais je suis convaincue qu’il sera prêt à m’aménager des horaires pour que je puisse venir suivre votre formation ici. »


C’est vrai. Le vieux Li Yun a, bien malgré lui, perdu beaucoup en mobilité avec le temps et, même si Oromonde n’est pas sa seule apprentie, elle l’est depuis plusieurs années maintenant. Ses Augures l’ont fixé au service des autres, ont ordonné la manualité de ses travaux, la modestie de son train de vie ; tout semble s’accorder à la fois aux deux postes qu’elle se propose de remplir. Elle peut sans doute espérer que ce dernier la laisse travailler l’après-midi et le soir ; l’essentiel des travaux d’enluminage et de préparation du papier se font à la lueur de l’aube, ceci afin d’ordonner judicieusement les temps de séchage une fois le zénith passé.
Elle incline la tête poliment, comme tous les enfants issus des Fissures savent très bien le faire une fois passé les murs délabrés qui abritent leurs folies et leurs rêves enfermés.

« Je lui ramènerai aussi la carte et m’assurerai de vous la livrer au plus vite.
Puis-je disposer, Monsieur ? »




Mon nom est Personne.
*Le Chaudon qui Fume*
 
Harvain
Gens de foyer
Kil'dé  
Le Luang 1 Dasawar 814 à 16h51
 
Je vous en prie mademoiselle.

Je me redresse, aïe mon dos. Voilà une soirée bien remplie décidemment. J’espère ne pas en avoir tout le temps du même acabit sinon je ne tiendrai jamais ce rythme. Pas à mon âge ! D’abord ce jeune garçon un peu perdu puis ce gros malabar qui a failli déclencher une nouvelle guerre et enfin cette livraison pour le moins inattendue. Ne manquent plus que des poules volantes et j’aurai eu un panel à peu près représentatif des imprévus que tout bon personnel doit affronter.

Je vais vous raccompagner.

Je tends le bras l’invitant à sortir en premier puis repasse devant pour la guider dans le fin couloir débouchant sur les cuisines qui sont désormais plus calmes. Ne reste plus qu’un commis qui nettoie le carrelage. Finalement, je me souviens d’un point, je m’adresse au jeune employé.

Sol, s’il vous plait, demandez à Massetard de se présenter à l’entrée de service. Merci.

Sans demander son reste, le gosse pas plus haut que trois pommes disparaît avec une rare vélocité. Sur le pas de la porte qui est ouverte pour aérer, je lui tends la main.

Vous pouvez m'appelez Harvain.

Une large silhouette apparait sur le pas de la porte. L'air avenant de son visage laisse plâner un soupçon à cause de quelques cicatrices éparpillées ça et là. Aussi large que haut, il pourrait mériter son titre d'armoire à glace. A la différence près qu'il est plus résistant qu'une glace. Il se fend d'une inclination un peu raide, protocolaire mais peu habitué tout de même.

Au plaisir mademoiselle. Notre portier va vous raccompagner pour ce soir.


 
Harvain
Gens de foyer
Kil'dé  
Le Merakih 31 Dasawar 814 à 11h45
 
J’aime l’ambiance ce soir. Tout est calme à l’Hermine. Peu de clients mais chose normale en cette période de fin d’année. Seuls quelques piliers de comptoirs qui repoussent au maximum l’heure de rentrer à la maison. Pour nos clients les plus fidèles, nous envoyons quelques cartes de vœux assorties d’une invitation à venir pour découvrir en exclusivité la prochaine carte des boissons pour la nouvelle année. Le travail est long et fastidieux, la prochaine fois, je pense que nous enverrons ça sur des cartons imprimés. Hum…

*** ***


Je jette un œil sur le livre comptable. Nous avons payé nos fournisseurs, la plupart des clients ont réglé leurs ardoises, la paie est soldée, nous sommes à jour sur nos finances. Bien… Nous avons revendu l’ancien service de verres vieillissants à un autre bar moins exigeant. Nous avons reçu une première partie de la commande, je ne les imaginais pas si lourds…

Je me dis que pour l’instant, cet état de lanyshsta ne me sert pas à grand-chose. Oh, j’ai essayé, je me suis concentré, j’ai psalmodié pour voir si je pouvais invoquer des flammes. Tout ce que j’ai pu faire, c’est avoir l’air ridicule devant le miroir. La magie ? Pffff, à peine plus évolué que du charlatanisme ! Peut-être suis-je trop vieux pour pratiquer ces arcanes ? Bon, je tiens mieux mon souffle quand je fais mon footing quotidien, je porte les assiettes plus facilement mais c’est tout. Quelle blague…

Un client me fait signe et indique son verre vide. Je hoche la tête et m’affaire.

La vie de lanyshsta, je pourrai dire beaucoup de choses à ceux qui croient que nous avons des pouvoirs pharamineux, des talents inimaginables et que nous sommes de dangereux monstres. Oh oui, je suis une source de nuisance absolue à servir un single malt de 10 ans d’âge avec un glaçon…

Je sers le verre sans un mot et retourne au comptoir.



 
Scellynia
Commis du Commerce
Kil'dé  
Le Luang 5 Jangur 815 à 17h01
 
*** Scellynia avait entendu parlé de cet établissement en arpentant les ruelles du Kil.

Elle n'en avait eu que des éloges aussi bien de parts les consommations qu'offrait l'établissement, le spectacle et un accueil des plus urbains.

Elle se dit donc qu'elle allait pouvoir voir si il lui était possible d'entrer en ce lieu et commencer à prendre contact avec ces habitués.

Un brun de toilette était obligé même si elle avait une tenue soignée en tout temps.
Elle sortie donc une de ses longues robes échancrée aux mollets et remis sa coiffure.

Dans sa tête, un jour elle aurait les fonds d'ouvrir son propre atelier de confection artisanale pour des personnes qui auront la finesse de voir la précision de réalisation.
Un tel lieu devait très certainement ne laisser entrer que des personnes corrects en tout point, des gens bien.

Scellynia se dit que même si elle souhaitai se lancer dans une carrière artisanale, l'apparence était un atout à ne pas négliger surtout pour le commerce...

Enfin arrivé sur le perron de l'enseigne, elle poussa la porte.

Quand elle mis le premier pied elle pu entendre une belle musique raffinée, une décoration très soigneuse et de divines odeurs lui chatouillaient le nez à un point qu'elle décida de ne pas prendre qu'un verre mais prendre une table afin de se restaurer pour peu qu'une place était disponible, car elle devait maintenant faire la queue à son tour afin d'obtenir place si il y avait.

En tout cas, pour le moment elle était ravi et nulle doute qu'elle en serait de même vu les assiettes qui passaient devant elle...


Page : 1 2 3 4 5

Vous pouvez juste lire ce sujet...
Nombre de joueurs actifs :0(Inscrits : 191)
Infos légales Mot de passe perdu ?