Après sa visite à la Loge du Destin et sa rencontre avec Jade, Oromonde avait eu la soirée pour terminer ses affaires, faire le point sur la situation et rejoindre le refuge offert par les confrères d'Harvain, aka le Locus Solus. Elle y avait rejoint Thaïs. Pas de nouvelles du majordome depuis lors. Qui sait ce qu'il était parti faire ? En commun, les deux jeunes femmes avaient partagé leurs points de vues et décidé de s'offrir un petit moment de grande subtilité. Puisqu'à la fois les soupçons de la Shragelle et le dossier piégé les avait mené sur la piste d'un Apostat, il s'agissait d'essayer de le retrouver. Pourquoi ne pas tout simplement se rendre à la Cellule Hermétique, où les Apostats étaient formés à l'écart du reste du Quartier, toquer sur la porte, dire qu'elles avaient vu de la lumière et entrer comme des fleurs pour poser quelques questions ?

Inutile de dire que, même si leur enquête semblait devoir en passer par là, Oromonde n'en menait pas très large. N'importe quel Kil'Déen adorait et redoutait à la fois les Apostats. On parlait tout de même d'individus extraordinaires. Des êtres qui vivaient au-delà des Augures qui leur étaient, à eux tous, imposé...ne risquaient-elles pas de se faire foudroyer par quelque mauvais sort ? Pire encore, d'être renvoyées ou exilées du Quartier ? Heureusement que la d'Ascara possédait une accréditation officielle de Commis pour essayer de donner le change.

Les deux jeunes amies, parties après leur petit déjeuner, finissaient leur route jusqu'à la Cellule.
Sur le chemin, elles devisaient et tentaient de se mettre d'accord sur une approche.

" - Répétons." Oromonde ouvrit la paume de sa main et compta sur ses doigts.
" On présente le meurtre des Flicksen et la falsification conséquente des Augures. On raconte qu'on est tombées sur un rapport volontairement discrédité d'un Apostat sur l'affaire, et que nous demandons très humblement à leurs maîtres s'il est possible, pour le bien du Kil, de prendre contact avec cet Apostat.
En effet, si un Apostat a rédigé ce rapport, et qu'un simple krolanne l'a par la suite falsifié, c'est après tout ne pas avoir respecté son statut particulier : personne n'aurait, normalement, pu l'oser. Et on espère très fort que cela marchera et suffira à nous faire rentrer.
J'ai tout ?"

 
La Main menait l'enquête tambour battant. Harvain était allé au Commissariat directement, Oromonde avait consulté les Augures et Thaïs avait fouiné pour trouver des informations de seconde main. Durant ce temps, un étranger s'était rendu à la maison des Flicksen's, qui était tombée en poussière peu après avoir révélé une mise en scène assez.... artificielle.
Tout, d'ailleurs, dans cette enquête, était étrange et non parfaitement agencé : les Destins semblaient falsifiés, l'enquête initiale bâclée, reprise par un Apostat dont l'identité et les contributions avaient été volontairement raturés à la Défense... Le rapport d'enquête avait été livré à la d'Ascara non sans observation et piège par un coursier enregistré nulle part...
Harvain avait finalement obtenu la confession que l'histoire émanait d'hautes autorités traquant quelques dangereux Lanyshsta's -ceux ne coopérant pas entièrement avec le Un, s'entend.

Tout était relié au fameux Apostat -réel ou lui-même fictif. Et la Main se trouvait dans une impasse sur ce point, incapable de remonter discrètement plus en avant. La conclusion était donc évidente, l'action téméraire : foncer à la loge des Apostats pour tenter d'obtenir une suite à tout ceci... Une identité. Un pourquoi du comment définitif.

Thaïs, habillée sobrement avec sa robe de Commis aux Sans-Destins, est sur les pas d'Oromonde. Elle complète les propos de son amie, la mine songeuse :

Oui, il me semble que tu as tout. S'ils nous poussent plus avant sur le pourquoi nous nous intéressons aux Flicksen's, je prétexterai un dossier de mon prédécesseur, Commis aux Lanyshsta's, qui nous a aiguillonné sur la piste d'un dangereux muté. Nous soupçonnons ce muté d'avoir falsifié le dossier en en coupant le lien avec l'Apostat. Je t'ai demandé de l'aide pour des vérifications officielles de Destinées et c'est en tant que consultante que tu m'accompagnes dans une enquête que je mène un peu sous le manteau...

Une grimace.

Mais méfions-nous tout de même. Harvain a extorqué l'aveu à la Défense qu'il s'agit plus ou moins d'une souricière à lanyshsta. La famille ne semble avoir été qu'un leurre destiné à attirer Klem, ou un autre, dans un piège.

Et puis je m'interroge sur le Destin de Carmïnn, où il est écrit qu'elle périra de la main d'un Apostat...

Mais à se triturer le cerveau, c'est un coup à ne rien faire, ne pas agir. C'est donc avec élan et en balayant ses craintes, que Thaïs, à quelques pas de l'endroit visé, double Oromonde et s'en vient toquer à la fameuse Cellule, haut lieu sacré du Quartier.
Un frisson de curiosité mêlé de craintes court déjà sur la peau de l'adolescente...

Après tout, les Apostats ont tout pouvoir au Kil'Dé.

 
Après avoir arpenté le Kil, les deux compagnes finissent par arriver, proche des murailles, là où se tient la Cellule Hermétique.
Peu de gens viennent dans le coin, car les Apostats ont une réputation qui ne donnent pas forcément envie de les cotoyer.
Le nom même de ce lieu n'incite pas à y venir...

Pourtant, en approchant, nos investigatrices sont sans doute surprises.
Il n'existe pas un "gros bâtiment noir qui fait peur".
En fait, la "Cellule Hermétique" est composée de plusieurs bâtiments agréables, lumineux, bien agencés.
L'ensemble prend une place importante de cette zone du Kil'dé.
Il y a sans nul doute des parcs intérieurs. Des commerces. Des artisans.

Plus elles avancent, plus tout cela ressemble à... une ville dans la ville.



Pour autant, nulle barrière, nul contrôle ne vient entraver leur progression.
Peu de badauds, et difficile de savoir quand elles sont sur les lieux.
Pas de panneau indicateur, pas de bâtiment réellement désigné comme "administratif".
Des bruits d'enfants, des odeurs de pains, de la musique émanent des cours intérieures, sans qu'elles ne puissent jamais les observer.
Car malgré tout, l'agencement des maisons fait qu'il est impossible de rentrer ou de regarder dans la zone intérieure sans passer par l'un des bâtiments...

Alors qu'elles doivent se dire que les rumeurs sur la Cellule font bien leur travail, un jeune homme se dirige vers elles.
La trentaine, bien habillé, souriant. Le jeune premier par excellence.
Il s'incline.

Bonjour, Mesdames.
Vous ne me semblez pas habiter par ici.
Je me présente, je suis Shymön Arasth et je serai enchanté de vous être utile.

Puis-je faire quelque chose pour vous ?

 
Thaïs examine longuement la zone dans laquelle elle n'a jamais mis les pieds. Kil'dé est bien ordonné et il n'y a aucune raison pour qu'un simple Voisin vienne traîner dans le Quartier des Apostats de prime abord. Surtout quand les dits Apostats ont une réputation d'ostracisme, de secret et de pouvoir absolu.

Cet agencement serré, cette étendue, ces ruelles surprennent plus d'une fois l'adolescente, qui s'attendait plus à un bâtiment unique et austère. Mais à y réfléchir, les Apostats étant désignés à la naissance et pris en charge très tôt, il n'est pas illogique que leur communauté soit parfaitement organisée pour subvenir à tous leurs besoins.

La jeune femme sursaute, alors qu'un jeune krolanne vient à leur rencontre. Reprenant rapidement contenance, la d'Ascara le salut avec soin -ne manquant pas au passage d'examiner figure et habits discrètement. Il ne semble manquer de rien et avoir un certain statut. Parfait.

Thaïs rentre directement dans le vif du sujet, circonspecte, tentant de se donner des allures professionnelles d'enquêtrice en action :

Bonjour, Sire. Nous cherchons un Apostat qui aurait mené une enquête récente. Sur la mort d'une famille du Dé.

Une grimace qui tente de se faire de connivence.

Je suis du Commissariat des Sans-Destins et l'aide de cette personne, dont nous ignorons le nom, nous serait plus fort utile. Surtout, nous avons des éléments nouveaux à porter à sa connaissance.

Se faisant, Thaïs montre son écusson officiel, espérant apporter quelque crédibilité -habituée, surtout, à ce que son jeune âge desserve certains de ses propos...

 
Aux côtés de sa consœur, Oromonde se tient légèrement en retrait. Elle salue le jeune homme de façon austère, mains jointe et torse baissé autant que le permet sa rotondité abdominale actuelle. Pour le moment, autant ne pas empiéter sur les propos de Thaïs. Il faut bien quelqu'un pour observer tandis qu'elle se charge des négociations.

 
Shymön Arasth regarde les deux femmes, toujours souriant, mais... visiblement déçu.
La connivence, ça n'a pas l'air son truc.
Il répond, d'une voix toujours suave, mais avec une certaine sécheresse sous-jacente, dédaignant totalement l'écusson officiel sans même lui accorder un regard.

Si un Apostat ne donne pas son nom, Mesdames, c'est qu'il ne souhaite pas être contacté.
En aucune manière...

Je ne peux rien pour vous, malheureusement, et votre quête est vouée à l'échec.
Sauf... si cet apostat entend parler de vous, et souhaite alors vous rencontrer.

Dites m'en plus sur ces "éléments nouveaux", je ferai passer le mot à mes frères et sœurs et qui sait, peut être votre Apostat sera-t-il intéressé...

Ou alors, continuez votre balade.
Comme vous voulez.

 
Thaïs grimace intérieurement, tandis qu'en extérieur elle garde un sourire parfait et hoche docilement la tête -oui, oui, elle comprend. Elle jette un regard à sa compagne, comme pour juger s'il est fiable de s'exprimer ici, envers un inconnu notoire, puis se lance. Comme si tout cela nécessite une confiance absolue qu'elles accordent au jeune krolanne.
La mention des "frères et soeurs" indique toutefois, outre la prestance et les habits de l'homme, sa présence dans ce Quartier si atypique, qu'il est lui-même Apostat.

A dire vrai, ce n'est pas vraiment lui qui n'a pas donné son nom. Celui-ci a été rayé des rapports d'enquête. Sciemment. Si cet Apostat ne souhaitait pas être retrouvé, il avait le pouvoir de ne pas du tout être mentionné, plutôt qu'un immonde gribouillis tâche systématiquement la mention de son intervention. Attirant forcément l'attention sur celle-ci et l'étrangeté du procédé...

Bref : il s'avère que la maison Flicksen...

Thaïs s'apprête à continuer, se ravise. Elle observe attentivement la réaction du jeune homme, notamment sur le fait que le nom de l'Apostat ait été barré. S'il souligne un intérêt pour l'information ou s'en fiche royalement. S'il tend une oreille attentive à son début de phrase ou pas. En fonction, elle la continuera ou se ravisera immédiatement.

 
Oromonde ne rajoute rien de plus, le visage impassible, détaillant calmement Shymön et les alentours. Ce dernier les teste, bien évidemment, aussi faut-il laisser l'épreuve faire son cours.
A l'attention de Thaïs, Oromonde rajoute mentalement :
Citation :

 
La d'Ascara ne tressaille pas au message d'Oromonde. Elle répond mentalement, très calmement, sans lâcher leur illustre interlocuteur des yeux :

Oui, ça peut marcher. Je vais y aller graduellement en parlant de l'écroulement de la maison et d'une sorte d'oeil mécanique qui la surveillait. Nous pouvions facilement faire surveiller la demeure, ce n'est pas une information qui nous mouille trop.

Par contre, mentionner Carmïnn risque de nous conduire à nous expliquer sur le pourquoi du comment nous la connaissons. Même si je te rejoins : ça pourrais provoquer le fort intérêt de notre enquêteur...

 
Shymön Arasthécoute attentivement, le regard vissé sur celui de Thaïs.
Presque hypnotique. Intense.
Parfois, ses yeux vont de l'une à l'autre, à l'affut.
Lui aussi, visiblement, les jauge...

A la mention du nom de l'apostat barré, il tique.
Cela n'est pas habituel, c'est certain.
Pour la suite, il écoute, mais ne semble pas plus que ça savoir ce qu'est la maison Flicksen.
En tous cas, il ne réagit pas...

 
Thaïs continue tranquillement, tentant de ne pas ciller devant ce regard si intense -trop intense !
Il ne s'agit pas de fondre comme une midinette -loin du genre de la d'Ascara, qui plus est. Il faut faire preuve de professionnalisme...

Un instant, elle veut rester sur son idée initiale et évoquer l'oeil mécanique. Mais des pensées d'un groupe de lanyshsta's inter-Kil lui reviennent en mémoire. Ils parlent de manipulation mentale des simples krolannes pour qu'ils n'entendent ou ne voient pas certains mots, certaines choses. Se pourrait-il qu'un sort similaire puisse exister et ne rende les machines bio-mécaniques visibles par les seuls Lanyshsta's ? Si tel est le cas, dire qu'elles l'ont vu serait se déclarer mutées directement. La d'Ascara préfère opter pour l'évocation de Sinope, avec qui elle a été en contact mental pendant son exploration de la maison Flicksen.

Bref : il s'avère que la maison Flicksen s'est écroulée sur elle-même. Nous avions trouvé étrange le fait que le rapport d'enquête ait semblé altéré par la soustraction de l'identité de l'Apostat, et nous étions presque arrivées à la maison du drame lorsqu'elle a disparu. Pouf. Ecroulée.

Et bien figurez-vous que nous avons vu un homme en sortant. Un individu fort étrange, qui ne semblait pas du Quartier ! Avec la poussière et les décombres, nous avons hélas perdu sa trace.

Un regard vers Oromonde.

A-t-il détruit sciemment le lieu du crime ? C'est étrange, quand même !

Bref : nous voulions remonter ce constat à l'Apostat impliqué sur l'enquête directement. Puisque visiblement il y a quelque-chose de pas rond au Commissariat de la Défense sur ce dossier... et je n'ai aucune autorisation pour pousser l'enquête plus loin sur la présence d'un étranger dans la zone à l'heure dite, même si je travaille aux Sans-Destins...

Thaïs semble en avoir terminé. Elle reste toutefois très à l'affût des réactions de l'Apostat -qui semble bien dissimuler ses pensées hélas-, prête à embrayer sur autre chose, un nouvel élément, si elle sent qu'elle perd totalement son intérêt. Mais ne laissant rien voir du fait qu'elle pourrait livrer d'autres éléments dans l'immédiat. La Commis ne doute pas que l'inconnu jouera la distance jusqu'au dernier moment, tâtant tout ce que les deux jeunes femmes pourraient lui livrer.

S'il tourne les talons, hausse les épaules comme si tout ceci est sans aucun intérêt, Thaïs enchaînerait. Mais le cas échéant, elle attendrait calmement la suite, comme si elle avait livré la perle du siècle...

 
Oromonde croise les mains silencieusement, les yeux fixés quelque part au-dessus de l'épaule droite de Shymön.

" Ce n'est pas tout" rajoute-t-elle. "L'affaire semble avoir touché aussi le domaine des Prédictions."

Il serait intéressant de savoir si les Apostats, ces entités sacrées du Kil'Dé, avaient des sentiments particuliers à l'égard de l'évocation du Un ; eux qui n'étaient pas pris dans la réalisation de sa Destinée de la même façon que leurs concitoyens, avaient-ils de l'affection ou du dédain pour ce Destin auquel tous se vouaient ? Allons, inutile de tourner autour du pot plus longtemps. Ou bien Arasth était intéressé, ou bien il ne l'était pas, dans tous les cas elle n'allait pas poireauter là au soleil en attendant que cette figure de jeune premier termine son brushing matinal. Inutile de communiquer, bien sûr, sur cette dernière impression.

" Avons-nous suffisamment attiré l'attention, Monsieur, pour poursuivre cette discussion en privé ?"

 
Thaïs grimace gentiment à la remarque d'Oromonde et adresse à l'Apostat un regard en coin complice. Entre le "olala, elle a l'air de maîtriser un sujet que je ne comprends pas mais qui a l'air hyper important" et le "elle n'est pas commode, hein".

Elle hausse les épaules, comme désolée de cette remarque un peu brute mais néanmoins très très pertinente de son acolyte.

Tout en pensant vers Oromonde :

Tu fais le méchant Commis, je fais le gentil Commis, ça roule.
Tu le fais hyper bien, d'ailleurs...

 
Shymön écoute les propos de Thaïs, attentivement.
Il ne montre aucune émotion particulière, sinon un intérêt non feint.
Est-ce pour l'affaire ou pour la jeune femme ?
Difficile de deviner ce qui se cache sous le sourire enjôleur...

Lorsque Oromonde ajoute sa tirade, il la regarde elle aussi, mais tique un tantinet.
Evoquer les prédictions a déclenché quelque chose...

Il réfléchit un instant.
Puis répond d'une voix calme, en les enjoignant à le suivre dans la rue d'un geste ample.
Il parle tout en marchant lentement.

Tout ceci est intéressant.
D'autant plus que vous devez être désespérées pour vous livrer ainsi à un inconnu comme moi...

Un Apostat ne se charge pas "d'enquêtes" en tant que telles.
Il ne rédige pas de rapport.
Il ne collabore pas avec les services officiels.

Un Apostat - s'il s'intéresse à une affaire quelconque - agit en son nom propre, pour son intérêt propre, sans avoir à rendre de compte à qui que ce soit...
Même à d'autres Apostats.

Nous n'avons pas de supérieur hiérarchique, pas d'instances dirigeantes.
Chacun d'entre nous est autonome, vit et agit comme il l'entend.
Pour l'immense majorité d'entre nous, cela se fait toujours pour le bien de la communauté ou a minima pas pour son mal...

Ceci étant dit, j'ai entendu parler de phénomènes étranges.
De cette maison écroulée, entre autre...
J'ai aussi entendu dire que des Lanyshstas étaient impliqués.
Ce serait logique.

Vous parlez de prédictions.
Je suppose que vous voulez signifier qu'elles ont été malmenées. Déformées.
Sinon, vous ne l'évoqueriez pas...

Pour être franc, on vous a menti.
A mon humble avis, aucun Apostat n'est intervenu dans votre affaire.
On a voulu vous faire croire ça, afin de vous faire peur.
On a en général peur de nous...

Si un Apostat était intervenu, comme je vous l'ai déjà dit, il n'y aurait pas de rapport.
Pas de trace.
Il aurait pu ordonner qu'on oublie son implication, et on lui aurait obéi.

Ils arrivent devant une belle maison, coincée entre deux grandes bâtisses.

J'habite ici.
Vous avez dorénavant mon adresse, et mon autorisation de me contacter si vous le désirez.
Votre histoire m'intéresse.
Surtout parce qu'on ne "joue" pas avec nous autres, sans qu'il y ait des conséquences...
J'aimerai bien savoir pourquoi on vous a menti, pourquoi on a cherché à vous éloigner.

Je ne m'impliquerai que si vous le voulez.
Réfléchissez bien, néanmoins. Discutez en.
Car une fois votre choix fait, vous ne devrez pas le regretter.

J'ai tout pouvoir. Toute latitude d'action.
Vous ne savez rien de moi, ni de mes principes d'existence.
Vous ne me recontactez pas, et je vous oublie.
Vous revenez vers moi, par une simple lettre ou autre, et... vous devez savoir que vous pourriez pâtir de mon implication.
Car si j'apprends que vous m'avez menti, ou omis certaines choses... je pourrai vous en vouloir.

Il les regarde, et se courbe en avant, comme un au revoir.
Il va certainement ensuite retourner chez lui, n'attendant pas une réponse immédiate.
Les deux comparses ont maintenant la main, immédiate ou avec un délai...

 
Thaïs écoute attentivement le jeune homme. Elle acquiesce à ses mots : la logique du fait qu'il n'y avait aucun intérêt pour un Apostat d'être mentionné dans un rapport pour en être ultérieurement rayé. Et puis le fait qu'il s'en trouve intéressé, qu'il propose de s'impliquer... Alors qu'il les laisse sur le pas de ce qui semble être son habitation, l'esprit fuse vers Oromonde :

Nous n'avons menti sur rien... presque rien, pour l'instant. La Défense nous cache des choses, c'est évident. Et je ne vois pas comment faire sauter les verrous sans cette aide...

Par contre... Il nous précise bien qu'un Apostat n'a de compte à rendre à personne. Je ne vois pas pourquoi il nous en rendrait à nous par la suite... L'impliquer c'est peut-être nous démettre de l'affaire et introduire un pion... dangereux dans l'histoire.

L'adolescente grimace. Il faut faire un choix, vite. Il pourrait paraître étrange de prendre un délai de réflexion important.

 

Oromonde peine à ne pas laisser fleurir l'intérêt et la fascination dans lesquels la plonge la tirade de cet empaffé de Shymön. Si ce dernier jette un autre regard séducteur à Thaïs, peut-être l'étripera-t-elle avant la fin de son monologue, mais soit, ce qu'il a à dire est tout de même intéressant.

Une espèce d'enthousiasme la saisit qu'elle contrôle difficilement, car elle a vaguement envie de donner des coups de coude ravis à son amie appuyés de lourds clins d’œil façon « on a réussi ! »

Elle se retient donc d'ajouter quelque chose, d'autant plus que malgré la curiosité de la situation, les propos de l'Apostat n'ont rien de rassurant. Tout d'abord, ce dernier les prends pour des idiotes. Téméraires, les idiotes, ne nous y trompons pas, mais quand même pas très malines. Ensuite, il s'y connaît tout de même très bien en renseignements locaux...comment peut-il déjà se douter ou avoir entendu que des Lanyshtas auraient mis leurs nez dans cette enquête ? C'est qui, ce type, exactement ? Et bon, on ne va la lui faire : s'il veut mettre son nez dans cette affaire, c'est qu'il a probablement une assez bonne idée de quelles forces sont en jeu. Et le ton final menaçant de Shymön finit de faire disparaître son sentiment d'enthousiasme, le remplaçant par un frisson glacé et un vague pressentiment. De toute évidence, elles vont bien finir par aller le chercher à un moment ou l'autre. C'est très narratif, indépassable. Et en cet instant précis, Oromonde est persuadée que ça ne se finira pas vraiment bien…il sera impossible de dissimuler leurs natures de lanyshtas, d'autant plus que l'Apostat doit déjà avoir ses doutes sur la question. Mais quel est le point de vue des Apostats sur les lanyshtas exactement, ça n'est pas connu...

Réprimant l'inquiétude sourde que lui impose les propos de l'Apostat, Oromonde hésite, pas sûre soudainement de vouloir se la ramener tout de suite.
Citation :

Tandis que l'Apostat fait mine de s'en aller, Oromonde tente le coup :

"Pourquoi vous faut-il notre assentiment pour vous impliquer ? Comme vous l'avez juste dit, vous avez tout pouvoir ici. Monsieur."

 
Thaïs adresse un sourire angélique à Oromonde, en réponse à sa pensée et la nécessité d'un plan B. La d'Ascara est SPECIALISTE des plans B. Qui consistent souvent à aller enterrer un corps calciné dans un bois obscur, la nuit. Qui s'enchaînent souvent ensuite avec une course poursuite et le massacre de quelques innocents témoins. Et se finissent idéalement pas un énorme et massif feu de forêt. Qui, bien entendu incontrôlés, sont susceptibles de ravager quelques villes sur le passage.

Mais ça serait ironique de le lui reprocher, surtout venant d'une lanyshsta enceinte d'un étranger qui avait suicidé son précédent fiancé quelques mois plus tôt.

Bref : Thaïs est enthousiaste. Enthousiaste de mettre une main dans cet engrenage dangereux.
D'un enthousiasme qui ne peut qu'être alarmant émanant d'elle...

Elle écoute attentivement la réponse à la question intrépide de la "méchante Commis".

 
Shymön s'arrête. Hésite un bref instant.
Il se retourne à demi, un sourire aux lèvres, toujours enjôleur.

Je suis joueur.
Mais je ne vous veux aucun mal.

Je vous respecte.
Voici pourquoi j'attendrai que vous ayez pris votre décision. Mesdames.

Il se retourne, et va vers chez lui...

 
Oromonde n'ajoute rien et jette un regard en coin à Thaïs, lui faisant les gros yeux et ouvrant la bouche en tentant de lui faire lire sur ses lèvres :

"Rentrons...prévenir...Harvain..." semble-t-elle dire. A moins qu'elle ne tente de faire passer un autre message ? "Fais...le...poirier avec les deux mains"...possible aussi.... ; "chou-fleur", peut être...

Le tout surmonté d'une grimace tandis qu'elle désigne le coin de la ruelle avec insistance de la tête.

 
Thaïs fronce les yeux en tentant de lire sur les lèvres d'Oromonde. Diable, pourquoi n'use-t-elle d'aucun contact mental, beaucoup plus simple ? A-t-elle peur que l'Apostat capte les signaux psychiques ? Ce serait trop tard, elles ont déjà communiqué par ce biais non loin de lui. Toutefois, la d'Ascara, pragmatique, arrête son questionnement là et tente de décrypter ce que sa compagne tente de lui faire passer.

Plusieurs options passent dans sa caboche, à un rythme effréné :
-Fuyons cet avenir vain ?
-Rendons l'empire serein ?
-Crions que l'émir est vilain ?
-Buvons pour un rire câlin ?

Puis, un éclair de génie :
"Nous devrions lui tenir la main !"

Mais bien sûr !!! Le contact physique, meilleure façon de le mettre en confiance et de l'impliquer !
c'est totalement contradictoire avec les réticences précédentes d'Oromonde, mais si Thaïs était connue pour sa capacité d'analyse du passé et sa capacité à ne pas prendre de décisions impulsives et/ou inconsidérées et/ou qui pourraient la faire passer pour une hystérique dans une enquête très sérieuse, ça ne serait pas Thaïs.

Thaïs se jette donc sur l'Apostat, lui attrape -ou tente de lui attraper le bras- en s'écriant :

Nous implorons votre aide !!!

Sourire victorieux à Oromonde, qu'elle laisse compléter sa demande. Car bon, après tout, elle n'a fait qu'exécuter sa volonté. Qui n'était pas très claire, il faut bien l'avouer. A un cheveu qu'elle comprenne "grillons ce sbire malsain...".

Oui, heureusement que Thaïs est une pro des charades.
Ou pas.