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Aruspicine revisitée
chercher l'avenir dans les entrailles du passé
 
Helhar'sen
Gestionnaire du Kil,
Le Doc

Kil'dara  
Le Julung 23 Otalir 814 à 20h14
 
***
La lumière de ce bel après-midi ensoleillé parvient jusque dans la rue de Myr, dans les profondeurs du Grand-Pont de Glou, quand Helhar'sen décide de quitter son cabinet médical. Personne n'a pris de rendez-vous avec le médecin dans les heures suivantes, ce qui lui laisse largement le temps de se rendre aux Cubes-Confort après avoir placardé une note informant de son absence temporaire sur sa porte.

En arrivant à l'entrée de l'immense complexe aux allures austères, le lanyshta salue la krolanne assise à la réception d'un geste de la main familier et se dirige sans hésitation dans le dédale des halls, des escaliers et des couloirs qui se succèdent. Depuis vingt ans qu'il est dans le métier, les occasions de venir remettre des notifications de décès et des rapports d'autopsie au Conseil de la Gestion Mortuaire n'ont pas manqué...

L'accès est relativement discret, dans les profondeurs des bâtiments, hors de vue des krolannes parcourant les zones réservées à la documentation et au sport, et la distance à parcourir pour arriver à destination est non-négligeable.
***


***
Au bureau d'accueil des affaires mortuaires, Lynizeth réajuste ses lunettes en demi-lunes devant ses yeux et plisse le nez en voyant Helhar'sen se diriger vers elle. La vieille krolanne à l'air sévère pose la plume avec elle était en train d'écrire.
***

- Bonjour Lyn'... salue Helhar'sen avec un hochement de tête. Comment vas tu?

***
La légiste fait une de ses moues dubitatives dont seule elle a le secret.
***

- Salut gamin. répond elle, comme d'habitude malgré le fait que les cheveux du médecin aient commencé à blanchir depuis quelques années déjà. De ce que j'ai entendu, c'est plutôt à toi qu'il faut poser la question.
Comment t'as pu ne pas t'en apercevoir? Tu travaillais avec lui tous les jours!


***
La question est directe, comme il fallait s'y attendre de sa part : inciser dans le vif du sujet est précisément la spécialité de Lynizeth...
Helhar'sen hausse les épaules, comme pour esquiver la pique.
***

- Le vieux était bizarre depuis sa naissance de toute façon, un peu plus ou un peu moins, je n'ai pas vu de différence... se contente-t-il de répondre.

***
Le lanyshta et la vieille krolanne restent tous deux silencieux un instant, plongeant dans leurs mémoires respectives vers leurs souvenirs du Doc'.
C'est elle qui rompt enfin le silence.
***

- Si tu viens pour le voir, tu perds ton temps. Quand on l'a amené ici après que la foule en ait fini avec lui, il n'était déjà plus reconnaissable, alors tu imagines bien qu'après l'autopsie complète, tous les morceaux qui restent du Doc' sont soigneusement étiquetés et conservés dans le formol...

***
Le médecin secoue la tête négativement, et prend un air déterminé.
***

- On avait depuis longtemps dépassé le stade du sentimentalisme lui et moi. C'est justement son rapport d'autopsie qui m'intéresse. Le sien, et ceux de tous les autres lanyshtas qui sont passés entre tes mains et celles de tes collègues...
Les gens pensent sûrement comme toi : "il travaillait avec lui depuis des années, comment a-t-il pu ne pas voir que c'était un lanyshta?". Et ils se diront que si je n'ai pas vu ça, c'est que je n'ai pas ce qu'il faut pour être un bon médecin...

J'ai fait une erreur une fois, il est hors de question que ça se reproduise. Si je croise à nouveau un lanyshta, je dois être capable de le diagnostiquer!


***
La détermination et le sérieux d'Helhar'sen n'étaient pas feints, même si ses motivations réelles l'étaient...
***





(Agur 816)
 
Narrateur
 
Le Vayang 24 Otalir 814 à 15h07
 
*** Lynizeth tiqua légèrement. ***


Tous les autres Lanyshstas ? C'est problématique. Toutes les personnes éliminées sur présomption de statut Lanyshsta, c'est possible. Combien en étaient vraiment là dedans, bonne question.
Combien de Lanyshstas meurent sans qu'on ai décelé leur nature, et ne se font pas autopsier, c'est personnellement la question que je me pose.


*** Elle semble hésiter, peser le pour et le contre. ***


Pour les rapports complets, ça risque d'être difficile de les obtenir. Tout ce qui concerne les Lanyshstas de près ou de loin finit par se retrouver au Conseil d'Inhibition des Esprits Nocifs. Et tu sais comment ils sont, il y a beaucoup de choses qui rentrent là bas, mais pour en faire ressortir la moindre feuille, c'est délicat...

*** Soupir. La situation ne lui plait visiblement pas. ***


Mais on garde parfois des notes. Ou des souvenirs. Je peux essayer de faire le tour et d'en tirer une synthèse.

*** Une ultime hésitation, puis elle se dirige d'un pas vif vers une étagère, y prenant un dossier peu fourni avant de le tendre à Helhar'sen. ***


Il ne sort pas d'ici, et il est sensé être sur un bureau du Conseil d'Inhibition des Esprits Nocifs d'ici ce soir. Mais d'ici à ce qu'on vienne le prendre pour l'acheminer, tu il est tout à toi. Tu peux même emprunter de quoi prendre des notes, si tu veux. Mais je te préviens, il n'y a pas grand chose.

 
Helhar'sen
Gestionnaire du Kil,
Le Doc

Kil'dara  
Le Vayang 24 Otalir 814 à 15h31
 
***
Les paroles de la légiste ramènent Helhar’sen à la réalité.
Evidemment il aurait dû se douter que c’est le C.I.E.N qui détient toutes les informations qu’il recherche, mais le médecin n’y a aucun point d’entrée, contrairement à la Gestion Mortuaire…
Le lanyshta retourne un regard plein de gratitude à Lynizeth quand la krolanne lui remet le dossier. C’est léger, mais c’est déjà plus que le rien dont il part.
***

- Merci Lyn’, j’apprécie…
Je me fais l’impression d’être un jeune aspirant qui découvre un nouveau domaine d’étude et qui doit se taper toute la littérature sur le sujet, mais sans connaître encore les points-clefs sur lesquels axer ses recherches.
Comme tu le soulignes, il est plus qu’évident qu’un nombre non-négligeable de cas doivent être des faux-positifs, et qu’un certain nombre de faux-négatifs ont échappé à l’identification. Mais à l’heure actuelle je suis preneur de tout ce que je peux trouver.


***
Avec diligence, le lanyshta accepte la proposition de son aînée et s’installe sur un coin de bureau pour consulter le maigre dossier et en recopier toutes les données pertinentes. Le médecin s’attache tout particulièrement aux mesures des constantes comme la localisation, la forme, la taille et le poids des organes - en particulier l’encéphale - recherchant des indications sur des transformations qui seraient restées invisibles de l’extérieur.
Quand il a fini de recopier le maximum d’informations, il rend le dossier sans plus tarder à la vieille krolanne qui le reprend quasiment sans le regarder, déjà retournée à son propre travail.
***

- C’est peut-être maigre, mais c’est déjà un début. dit-il avec une inclinaison raide du buste. Si tu retrouves quoi que ce soit de plus, je veux bien que tu me le mettes de côté si ça ne t’embête pas trop...
Et c’est à charge de revanche : si tu as besoin de quoi que ce soit, n’hésite pas à me le demander.


***
Helhar’sen aurait bien pris Lynizeth dans ses bras pour la remercier, mais leur amitié a toujours été austère et un tel geste aurait sans aucun doute éveillé plus de soupçons qu’autre chose.
Et puis ni l’un ni l’autre n’ont jamais été très portés sur les effusions d’amitié.
Enfournant ses notes dans la poche de poitrine de sa redingote, le médecin se contente donc de lui offrir un sourire timide qu’elle ne lui rend pas.
***

- Je ne te promets rien, gamin... répond-elle en replongeant dans ses dossiers. Mais je verrai ce que je peux faire.




(Agur 816)
 
Helhar'sen
Gestionnaire du Kil,
Le Doc

Kil'dara  
Le Sukra 25 Otalir 814 à 00h31
 
***
Helhar'sen hâte le pas sur le chemin du retour, mais deux ouvriers agricoles se ressemblant trop pour ne pas être frères l'attendent devant sa porte lorsqu'enfin il revient au cabinet médical. Au vu du bandage ensanglanté ceint autour de la main du premier krolanne et l'air inquiet du second, le médecin voit ses espoirs de pouvoir relire tranquillement ses notes s'envoler.

Les deux heures qui suivent sont donc consacrées à sauver ce qui peut l'être du pouce de l'ouvrier dont la main s'est prises dans l'engrenage d'une vapo-meule... Les deux dernières phalanges sont si finement broyées qu'il ne reste plus grand chose pour raccrocher les tendons ailleurs que sur la première phalange, et Helhar'sen ne peut qu'offrir une amputation propre au blessé.
Une amputation "propre", c'est plus long et douloureux qu'un simple coup de hachoir chauffé à blanc. Il faut cautériser les artères, enlever les muscles déchiquetés, découper proprement la peau et la re-suturer. C'est pour ce genre de soins qu'il est important d'avoir une bonne table d'opération avec des sangles de contention bien solides...
Le krolanne devra se contenter d'une prothèse rigide avec une fraction de la mobilité de son pouce. Quand il repart, encore sonné par la douleur, il écoute à peine les recommandations du médecin pour le renouvellement du cataplasme anti-sceptique et du pansement stérile qui l'entoure, mais son frère est plus attentif et parait parfaitement comprendre la nécessité de respecter les instructions.

D'autres patients sont arrivés entre temps, et le reste de la journée défile jusqu'au soir sans qu'un instant de répit ne soit laissé au lanyshta. C'est finalement à la lueur d'une lampe à gaz, assis confortablement à son bureau qu'Helhar'sen peut enfin examiner ses notes.

Le foie présentait un début de cirrhose. A priori rien qui ne puisse être expliqué par les quelques verres que le vieux devait certainement s'enfiler de temps en temps.

Les bronchioles des lobes pulmonaires inférieurs étaient légèrement grisâtres, signant probablement un début de calcification. A moins que ce soient les conséquences à long terme de fumées toxiques que le Doc' aurait pu inhaler quand il concoctait lui-même des médicaments dans son laboratoire.

Le cerveau semblait parfaitement normal si ce n'est une masse légèrement supérieure à la norme. Pas grand chose, rien qui ne soit statistiquement différent de la moyenne des krolannes, mais suffisamment rare pour être noté...

Mis à part cela, rien de notable.

Helhar'sen lit et relit encore ses notes, compare les mesures aux chiffres moyens de la population, s’interroge sur tout ce que l'autopsie aurait pu rater. Mais rien n'y fait...
La déception est à la hauteur de l'espoir que le médecin avait mis dans l'autopsie de son oncle et ancien patron pour dénicher des indices sur ce qui le guettait lui-même. Son regard se porte encore une fois sur les notes pré-opératoires, s'attardant sur les détails des blessures fatales. "Les" blessures fatales, car entre le crâne défoncé, la gorge écrasée, les vertèbres disloquées, et les côtes cassées qui avaient perforé plusieurs organes, ont aurait dit un cadavre sorti d'un éboulement de rochers.

Avec un soupir, le médecin s'apprête à jeter ses notes quand un détail attire son regard. Ce n'est sûrement rien, mais les outre-scientifiques du Conseil de Gestion Mortuaire ne sont habituellement pas du genre à faire des imprécisions. Surtout dans les qualificatifs qu'ils emploient pour décrire leurs observations.
Alors pourquoi auraient-ils indiqué que le Doc avait les cheveux blancs alors qu'ils étaient clairement gris dans son souvenir? Gris, pas blancs.

Aurait-il commis une erreur en recopiant les documents?
Il retourne mille fois la question dans sa tête, mais il est sûr d'avoir parfaitement recopié mécaniquement tout ce qui était dans le dossier...

Alors quoi? Qu'est-ce qui aurait pu faire que le vieux ait eu les cheveux blancs au moment de sa mort? Ca ne change pas de couleur comme ça des cheveux! Et qu'est-ce que ça pouvait signifier? Quelle différence cela pouvait faire de toute façon?

Helhar'sen saute de son fauteuil comme un diable sort de sa boîte et se précipite dans la salle d'eau pour se figer devant le miroir dans lequel il s'observe longuement.
Non, rien. Du moins pas plus de cheveux blancs fleurissant ailleurs que sur ses tempes...
Ca pouvait aussi bien être un indice qu'une fausse piste.

Il lui en fallait plus.
***



***
Après une nuit passée à peiner à trouver le sommeil, le médecin laisse son cabinet fermé pour retourner aux bureaux de la Gestion Mortuaire, quelque peu après l'ouverture, quand tout le monde est à son poste mais que les "affaires" de la journée n'ont pas encore commencé.
***

- Salut Lyn'... Tu avais raison, il n'y avait pas grand chose. dit-il en arrivant devant le bureau de Lynizeth. Juste assez pour aiguiser ma curiosité.




(Agur 816)
 
Narrateur
 
Le Sukra 25 Otalir 814 à 09h13
 
*** Un léger sourire accueille la remarque. Pas un de ces sourires francs qui disent "je suis content de te revoir", non, un simple petit sourire pouvant signifier avec une économie certaine de mouvements "il y a quelque chose que je sais et que toi tu ne sais pas". ***


Alors je crois qu'elle va finir par devenir particulièrement tranchante avec ce que je t'ai trouvé.

*** Lynizeth semble dans un état inhabituel, légèrement indécise. ***


J'ai fait le tour. C'est assez brouillon, vu qu'il s'agit surtout de souvenirs s'étalant sur trois ans. En plus des faux-positifs et des faux-négatifs, certains ont aussi pu confondre avec des krolannes normaux qu'ils ont eu à disséquer.
Si on devait réduire l'étude à chaque cas individuel, on dirait "rien d'anormal".
Si on essayait de trouver un dénominateur commun, on dirait "aucun".
Mais il y a suffisamment de points de singularité pour qu'on s'y intéresse. Je t'ai tout mis là.


*** Elle tend une simple feuille, couverte d'une écriture serrée. ***



 
Helhar'sen
Gestionnaire du Kil,
Le Doc

Kil'dara  
Le Sukra 25 Otalir 814 à 14h21
 
***
Le médecin maîtrise sa hâte pour ne pas arracher la feuille des mains de Lynizeth.
***

- Merci... Voyons voir. dit-il en se saisissant du document tendu avec un air dégagé.

***
Il parcourt rapidement les informations qui y sont inscrites, et relève la tête pour poser un regard surpris sur la krolanne.
***

- Un dixième de ces lanyshtas potentiels est concerné... c'est trop pour être un hasard. Ca pourrait être des malformations de naissance, mais dans ce cas il y aurait des données publiques disponibles sur ce genre de dysmorphies. commente le lanyshta d'une voix songeuse.
Le fait qu'il n'y ait pas de point commun à tous les cas semble exclure l'hypothèse d'une pathologie transmissible classique. Et la possibilité de l'action d'un parasite ou d'un symbiote semble éliminée par le fait qu'aucun corps étranger n'ait été remarqué.

Par contre les quelques redondances citées font penser soit à une phase évolutive, soit à la résurgence de caractères dormants. D'après les modèles couramment admis, ce genre de phénomène se produit en réponse à une pression de sélection induite par l'environnement, et se déroule en deux phase : d'abord la multiplication des phénotypes, puis la sélection des mieux adaptés à leur environnement...
Il faut croire que ceux-là n'étaient pas bien adaptés.


***
Et lui, fait il partie de ceux qui étaient mieux adaptés, ou bien finira-t-il par être consigné dans un des rapports que Lynizeth remplit quotidiennement?
Helhar'sen tente de juguler le tourbillon de pensées contradictoires qui se déchaîne dans son crâne.
***

- Encore merci Lyn'... Je ne sais pas où ça va me mener. C'est déjà beaucoup, dit-il en agitant la feuille de notes avant de la plier et de la ranger dans une poche, mais il va m'en falloir encore plus pour monter une étude crédible...

***
Le "plus" en question peut être obtenu en expérimentant sur des lanyshtas vivant. Il y a déjà lui, et peut-être bientôt certains autres perçus au travers des Entrelacs. Il va également falloir mettre la main sur les rapports d'autopsie complets stockés au Conseil d'Inhibition des Esprits Nocifs.

Après avoir remercié encore la vieille krolanne, Helhar'sen prend congé, l'esprit encore plus bouillonnant qu'avant son arrivée.
***





(Agur 816)

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