Au Grand-Pont de Glou les activités sont nombreuses: commerces, promenades, salons de thé ou simplement regarder les autres badauds. Sauf au plus profond de la nuit les passants sont nombreux.

Une charrette a la roue brisée gêne le trafic et son propriétaire et en train de discuter vivement avec le conducteur de l'attelage suivant.

J'y peux rien si ma roue s'est brisée sur ces mauvais paves. Plaignez-vous aux ponts et chaussées !

L'autre ne parait pas d'accord avec cette option.

J'ai pas le temps ! Je livre moi monsieur ! Dégage ton tas de bois !

Heureusement a quelques pas, le spectacle est plus plaisant. Une jeune krolanne de belle allure, munie d'un violon s'est juchée sur une caisse de bois et a entrepris de divertir les passants.

Courage! Tu peux jouer dans une auberge, tu peux jouer dans la rue.

Sans réfléchir davantage elle attaque un difficile morceau de Joseph Parangonni, un compositeur de légende et elle s'en tire pas mal. Si de nombreux passants passent tout droit, certains s’arrêtent pour écouter en souriant. Il y en a même deux ou trois qui viennent poser un girasol ou deux devant la violoniste.

La violoniste semble se concentrer et continue de plus belle. Un passant irascible semble vouloir venir la frapper pour qu'elle arrête mais heureusement quelques auditeurs l'en empêchent. Il part en grommelant.

J'aime pas les sonates de Parangonni,

 
Sa prestation terminée, la violoniste salua une seule fois le public clairsemé avant de ramasser les pièces. Deux individus bien vêtus mais au langage peu civil firent quelques commentaires discourtois.

Ferait mieux de travailler comme danseuse de cabaret cette petite. dit le premier

Elle aurait un public plus large et plus d'argent. On va l'inviter a boire un verre. r;pondit l'autre.

Cependant, elle avait probablement l'oreille aussi fine que musicale car elle fila rapidement derrière une grosse charrette de produits végétaux.

Elle est passée ou cette gueuze? la surprise des deux krolannes était totale. Ils se precipiterent derrière la charrette pour ne trouver plus personne. Il ne restait qu'une vieille caisse de bois.

Grrr, dommage. On l'aurait ramenée au patron il nous aurait verse pas mal de girasols.

Plus loin sur le Grand-Pont du Glou, en face du cabinet médical, une musicienne montait sur un tonnelet retourne pour mieux être vue et se préparait a jouer du violon.

C'est mon destin, je dois continuer a jouer.

 
Sans paraitre se soucier davantage de la situation, juchée sur son tonnelet elle salue le public absent.

Un passant commente: L'a pas l'air bien dans sa tête cette greluche.


La greluche musicienne en question a le regard perdu dans le vague. Tout a coup elle attaque un solo de Kris'Tof Viz'lar. Quelques chalands s’arrêtent net, surpris par la musique. Une dame et son enfant paraissent particulièrement intéressés.

Peut-être qu'elle pourrait venir jouer pour ton anniversaire? Tiens va poser une pièce pour elle sur son tonnelet.

La difficulté de la mélodie ne parait pas l’arrêter et le rythme de son archet va en accélérant, comme le voulait le maitre Viz'lar quand il composa jadis cette musique.

Si l'archet vole, c'est juste. avait coutume de dire le compositeur, selon Persh'et Ron son biographe officiel.

Le public est maintenant plus nombreux et commence a gêner quelque peu la circulation. Cela risque d'attirer l'attention de la maréchaussée dont les gouts musicaux ont la réputation d’être plutôt sommaires.

 
Tandis que les passants sourient en écoutant sa musique, elle continue de faire voler son archet. Gênée par la foule, une charrette plus grosse que les autres doit ralentir, provoquant derrière elle des perturbations routières.

Un conducteur plus irascible que les autres finit par apostropher un garde.

Qu'est-ce que vous attendez ? Faites dégager la route ! Je dois livrer mes bonbonnes moi.

Le garde remonte l'embouteillage et tombe sur la violoniste. A grands coups de sifflet il lui fait comprendre qu'il vaut mieux s’arrêter de jouer.

Vous pouvez pas jouer ici! Voyez les problèmes que ça cause.

Quelques auditeurs tentent bien de défendre la musicienne mais celle-ci ne parait même pas vouloir protester.

Je suis désolée monsieur l'agent. Elle verse quelques larmes qui semblent sincères.

Bon ça ira pour cette fois, mais ne jouez plus au bord de la chaussée. Mettez-vous quelque part ou la foule peut se tenir sans déranger.

C'est a ce moment que les deux rabatteurs des bas-fonds, ignorants de l'interlocuteur de la violoniste reviennent tenter de lui mettre le grappin dessus.

 
Alors ma petite tu vas nous suivre de gré ou de force.

L'un d'eux la saisit par un bras et elle se met a crier.

Au secours, au secours !

Ça tombe bien puisque le garde est juste la a un mètre de distance! Il souffle dans son sifflet pour ameuter ses collègues et d'un mouvement bien place frappe de son gourdin sur la tête de celui qui tient Tri' par le bras. Les deux gaillards qui pensaient faire une prise facile se retrouvent dans la position peu enviable de proie.

Au nom de la loi vous êtes en état d'arrestation.

Le plus frais des deux tente de filer a travers la circulation mais un autre garde arrive sur les lieux se précipite déjà sur lui. Il fait moins le poids face a un solide gardien de l'ordre et se retrouve rapidement parterre sous la menace d'un gourdin copieusement garni de pointes de métal.

Je... je me rends... C'est mon camarade qui a eu l’idée de kidnapper cette musicienne.

D'ailleurs ou est-elle celle-la ? A la faveur de l'inattention des deux malfrats et des gardes, elle a disparu sans demander davantage.

Quelques centaines de mètres plus loin, devant un restaurant connu elle discute avec le maitre d’hôtel.

Puis-je jouer pour divertir vos clients quelques minutes ?

 
Citation :

Thiya s'arrêta net et tourna la tête en tous sens, surprise. La pensée était proche, comme la dernière fois. Elle aperçut entre les silhouettes entrecroisées des passants un visage familier. La jeune krolanne aux cheveux d'argents semblait en mauvaise posture. Elle venait de se faire saisir le bras par un agent de l'ordre. Alors que Thiya se préparait à foncer tête baissée dans le tas, la musicienne s'échappa et se faufila avec une aisance déconcertante entre les obstacles de la rue encombrée. Thiya tenta de la suivre tant bien que mal, la perdant de vue plusieurs fois. Elle semblait ne pas lui prêter attention et se mit à discuter avec un homme devant un troquet. Pourtant, Thiya était persuadée d'avoir reconnu cette tonalité de pensée..

***C'est vous! Je croyais ne jamais vous retrouver après votre départ précipité de l'autre soir. Vous êtes donc bien...***

Thiya n'avait pas un très bon jeu d'actrice. Elle se tourna maladroitement vers un étal de fruits bigarrés et fit semblant d'être très absorbée dans son choix, s'emparant d'un fruit cabossé qu'elle fixa avec une intensité incongrue.

 
Le regard violet de Tri' se posa sur Thiya qui fixait un grotescard roux sur l’étal d'un maraicher ambulant .

Dites-moi le fruit que vous mangez, je vous dirai qui vous êtes.

C'est une citation connue... Et ces fruits servent de savon davantage que de nourriture.

Elle lui tend la main.

Je m'appelle Tri'Renn'Tess mais tu peux me tutoyer et m'appeler Tri'. Evite de... ...penser trop fort, je n'aime pas trop ça.

Elle avait l'air sincère et engageante malgré un visage curieusement impassible.

 
Thiya regarda le fruit qu'elle tenait dans la main, et reconnut effectivement un gros fruit cabossé et terne dont on se sert habituellement pour fabriquer du savon. Elle le reposa avec un rire gêné.

Ahah oui, vous avez... Je veux dire tu as raison. Quelle tête en l'air je fais! J'espère que tu n'en déduiras pas d'idées farfelues sur moi.

Thiya tenta de retrouver se contenance, mais le regard froid de Tri' la mettait mal à l'aise. Elle ne savait pas ce qu'elle pouvait bien penser.

Heu... Enchantée, je m'appelle Thiya. Je suis Apprentie.

Ses yeux bleus se posèrent sur l'instrument de musique de Tri'.

Je vois que tu es musicienne. J'ai entendu dire qu'on pouvait en faire un peu d'argent. J'ai justement quitté il y a peu de temps le domicile de mes parents et j'ai besoin d'une source de revenus... Saurais-tu me recommander quelques endroits où jouer?

Après quoi elle tenta de communiquer un peu moins brusquement par l'esprit.

*** Excuse mon manque de délicatesse, je ne sais pas trop comment me servir de ce... don. Personne de mon entourage n'est au courant et je ne sais pas comment réagir... ***

 
Tri' regarda son violon non sans une certaine tendresse.

La musique a longtemps été ma seule amie tu sais. Je n'ai pas grandi dans une famille comme toi, j’étais seule la plupart du temps. Ne te trompe pas cependant, ce n'est pas pour inspirer la pitié ou la compassion que je te raconte ça. C'est juste que tu as l'air d’être une fille éveillée et qu'ainsi tu pourras peut-être me comprendre.

Pour répondre a ta question, bien que je ne puisse pas me prévaloir d'une grande expérience dans ce domaine, je te suggère de jouer dans une rue ni trop passante, ni trop isolée. Dans une rue passante, tu risques, comme je l'ai appris a mes dépens, de provoquer des problèmes de circulation et de t'attirer des ennuies. Dans une rue isolée, outre le manque d'auditeurs, des problèmes de sécurité ne sont pas a exclure. Les gens mal intentionnés ne sont hélas pas rares.

Elle darda son regard violet droit dans les yeux de Thiya.

Si tu veux un bon endroit pour essayer tes talents, tu peux aussi aller au Cabaret des Espoirs. Le patron laisse jouer n'importe qui, je ne dis pas ça pour toi. Tu ne gagneras aucun argent peut-être mais quelle que soit ta prestation il t'offrira le couvert. Et pour le coucher...

Elle parut réfléchir.

Tu peux venir chez moi si tu veux. C'est assez grand et c'est tranquille. Qu'en penses-tu?

Elle regardait ailleurs maintenant mais utilisa le don.

***prends garde a ne pas trop user de télépathie. Certains lanyshstas sont sans scrupule. Pour ma part je ne l'use qu'en cas de nécessité***

 
Il était évident Tri' était profondément attachée à son violon. Thiya trouva que cet instrument allait parfaitement avec l'air de douce mélancolie qui se lisait sur son visage fin.

Merci pour vos... heu pour tes conseils. Je me rendrai peut-être à nouveau au Cabaret des Espoirs pour y proposer mes services, bien que je ne pense pas avoir un talent et une passion aussi remarquables que les tiens. Ce qui me passionne, c'est la connaissance. Et plus particulièrement l'histoire des Sharss et de notre monde. Il est vrai que je suis encore jeune... Mais j'espère en apprendre plus avec le temps. Et surtout explorer les autres Kil!

Elle avait des étoiles dans les yeux.

Citation :

Thiya choisit de ne pas répondre par la télépathie.

Tu parles sérieusement? Mais on ne se connaît pas. Je pourrais être dangereuse. C'est toi-même qui le dis.

 
Son regard était tantôt dans le vague, comme perdu, tantôt acéré comme une lame et fixe sur le sujet de la conversation.


Explorer l’extérieur? C'est dangereux et ambitieux mais un bien bel objectif. Moi-même j'y ai souvent pense et très récemment je crois avoir trouve de quoi faire le pas.

Le Cabaret des Espoirs permet de se produire librement. N'aie crainte, certains artistes sont tellement mauvais que tu paraitrais douée a cote d'eux. Quoi qu'il en soit la décision t'appartiens. Tu auras cependant besoin de ressources pour partir en exploration, du matériel sérieux est indispensable.

Thiya semblait gentille et sympathique, peut-être un peu naïve, sans doute un défaut du a son éducation familiale. Si elle avait grandi comme Tri'...

Toi dangereuse? Éventuellement en créant un problème par inadvertance mais pour le reste. Je pense savoir reconnaitre les fourbes... L'expérience est un professeur brutal mais on apprend. On apprend et on ne peut oublier.

Ne te sens pas obligée, tu peux réfléchir et te décider plus tard.

Elle prit le temps d'une pause de réflexion.

Désolée... Ne cherche pas trop a me déchiffrer... Je n'ai pas trop l'habitude des contacts sociaux.