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La traque au monstre
Du Comité de vigilance des puritains du Kil'sin
 
Dassen Dorn
Comitaire actif
Kil'sin  
Le Julung 2 Julantir 815 à 21h33
 
[hrp : animation personnelle validée par l'équipe du jeu :) ]



Aujourd'hui nous pensons qu'il va arriver quelque chose de grave. Notre pouls s'est plusieurs fois accéléré de manière incontrôlé, et sans raisons. En sortant de chez nous nous avons vus trois oiseaux noirs traverser le ciel, et à nos pieds au même moment, trois chats pourchassaient un chien boiteux.

« Putain de grosse traque au Lanyshta ! Putain de grosse traque au Lanyshta ! »

Celui-ci déboule de l'Agora et bouscule tout le monde. Il va chercher ses copains, il est tout rouge, il ne nous intéresse pas. L'agora est plus ou moins rempli et il y a beaucoup de bruit. Quatre ''bureaux'' sont installés un peu partout, c'est là qu'il se passe quelque chose d'important.

« Ôyeeez, ôyeeez ! Venez défendre votre foyeeeer ! Le Comité de Vigilance des Puritains du Kil'siiin recherche des volontaiiiires ! Un Lanyshta fou massacre nos citoyennnns ! Il s'est réfugié dans les Dessous et n'attend que vouuus, braves gens du Kil'siiiin ! Nous cherchons des jeunes gens fooorts et courageuuuux ! Un monstre Lanyshta se cache dans l'ombre, ne le laissez pas tuer vos amis et dévorer vos enfaaaants ! Devenez membre honoraire de notre comité, et partez avec nous à la chasse au Lanyshtaaa ! »

Ces gens qui parlent, ils ont tous la même tenue. Un costume vert et blanc très élégant, un chapeau pointu et de grosses lanières de cuir en guise d'épaulettes. Sur leur côté pend un sabre, dans le dos une lance ou un arc. Et ils transpirent comme des cochons car leur costume très vert et très épais est largement rembourré de cuir et de pièces de métal. Ils ont l'air un peu couillons, parfois, sous certains angles. Mais souvent les petits comme les grands les regardent les yeux grands ouverts. Ce sont des champions fiers et élégants, et on les observe avec envie, plein d'admiration.

« Ôyeeez ! Holààà ! Approchez ! Venez vous inscrire au Comité de Vigilance des Puritains du Kil'siiiin ! Traque au Lanyshtaaa ! Un fou dans les Dessouuus ! Cet après-midiii, démonstration de force du commandant Bourglot et de ses trouuupes ! Unité expérimentééée, entraînééée, spécialiséée pour l'occasion dans la traque au Lanyshtaaaaa ! »

À côté d'eux il y a toujours quelqu'un assit derrière un bureau. Il a beaucoup de papiers devant lui qu'il maintient d'une grosse pierre posée sur eux. Il note les gens qui se présentent et qui signent. Il n'y en a pas tant que ça, même si tout ça amuse aussi tout le monde. À côté du bureau à côté du crieur il y a des gardes avec des armures vertes et banales. Ils sont juste là pour montrer leur grosse hallebarde.

Et les crieurs continuent d'hululer.


« Puis pour vous, pour vous, rien que pour vouus... entraînement public au milieu de l'Agoraaa ! Participation possible pour les plus braves, baptême du feu pour les inscriiits ! »

On se sent si étrange dans cette ambiance. Des prospectus volent un peu dans l'air, sur lesquels il y a cette histoire traduite en plusieurs langues mais pas toujours. Nous marchons dans la place toute tordue et baillante de chaleur. Et puis sur les prospectus il y a ce dessin qui nous fait rire, une tête imaginaire en plusieurs versions d'un mutant Lanyshta à tuer.


alias Djet Tamère
 
Jade Srhaggelle
Représentant,
la Vigilance

Kil'sin  
Le Vayang 3 Julantir 815 à 12h11
 
Les emmerdes, c'est comme les chiens errants.
On en croise de temps en temps, sans que cela ne pose de problème. Mais il leur arrive de se regrouper, et là, on courre rapidement un danger.

Et tandis qu'elle se rendait chez sa mère adoptive, Jade ne pu s'empêcher d'entendre les braillements, y notant plusieurs éléments qui la firent grimacer.
Pour la plupart des personnes, le mot choquant, celui qui les attirait, c'était Lanyshsta.
Ce qui accrocha le plus l'oreille de Jade, c'était "Comité de Vigilance des Puritains".

Zut, flûte et... Et merde, en fait. C'était typiquement le genre de chose qu'elle préférait éviter.
Bien sûr, chaque Comité de Vigilance était indépendant, les Coordinateurs étant plus souvent des gens de bonne volonté facilitant l'échange d'informations entre personnes consentantes que des chefs capables de réguler les excès. Et le nom même de Comité de Vigilance n'était pas réservé, de quelque façon que ce soit.
Mais dans l'esprit des gens, tous étaient liés, et ils se rappelaient bien plus facilement les mauvais points que les meilleurs.
Du coup, "des Puritains", une appellation qui avait tendance à faire penser à la rigidité de la pensée, à la violence du discours et autres joyeusetés, était le genre de suffixe dont Jade se serait bien volontiers passée.

En approchant, elle tendit l'oreille, ouvrit les yeux, et s'arrangea surtout pour mettre la main sur l'un des nombreux prospectus. Les paroles volent, les écrits restent.
Bon, visiblement, on avait fait un effort pour grossir le trait, pour donner à cette affaire un aspect quasi "inter-Sharss", mais le traducteur devait maîtriser les autres patois de façon à peine supérieure à ses propres capacités, arrivant à un charabia difficilement compréhensible.
La version locale, par contre, ne lésinait pas sur les superlatifs, en usant et en abusant, même, "immondément monstrueuse créature sournoisement infâme" tenant assurément plus de la figure de style que de l'énoncé clair.

En parlant d'énoncé clair, d'ailleurs, une rapide lecture, et une écoute assidue, en ayant levé les filtres de tri adéquats, relevaient la pauvreté des éléments.
- Des morts. Surtout dans les Dessous. Mais ailleurs aussi, sinon l'information n'aurait sans doute pas filtré jusqu'aux Heures vives.
- Un Lanyshsta. Supposé.
- Une troupe qui recrute.
- Entrainement public afin d'en mettre plein la vue.

Le coup du Lanyshsta était génant. Il y avait deux possibilités, d'après les précédentes affaires de ce type :
1) Cela n'avait rien à voir avec les Lanyshstas, c'était juste une psychose due à un malformé, un magicien de rue ou autre.
2) C'était un Lanyshsta peu discret qui s'amusait à user de ses pouvoirs.

Le problème étant que, quel que soit la vérité, tant que la traque ne serait pas finie, cela serait néfaste pour les Lanyshstas. Si c'était un non Lanyshsta, mieux valait le retrouver rapidement, et faire toute la lumière là dessus. Si c'était un Lanyshsta... Il pouvait être considéré comme perdu, et le traquait ne ferait pas de mal au reste de la communauté.

Ce qui était le plus intriguant, néanmoins, restait cette "unité spécialisé dans la traque de Lanyshstas".
On ne traquait pas des Lanyshstas avec de gros muscles, le problème n'était pas tant de les éliminer que de leur mettre la main dessus.
A priori, Jade était prête à miser dessus, c'était ce que les gens du cru appelaient du flan, une exagération visant à attirer le gogo. Mais il y avait aussi la possibilité qu'au sein de ce groupe, il y en ai un, un fourbe, qui savait utiliser ses capacités pour repérer, identifier, et suivre à la trace un Lanyshsta, menant son gros alibi visible sur la piste de ses frères de sang -ou d'autre chose- afin de les éliminer.
Il était peu probable que nombreux soient ceux qui la surpasse au sein de la troisième Vague dans ce difficile exercice de traque, et elle-même était encore loin de pouvoir gérer une traque digne de ce nom par ces facultés. Et elle n'avait entendu aucun problème de ce type récemment.
Par contre, si c'était un des vagues précédentes... Cela posait un problème.
Un gros problème.
Et on ne gérait jamais aussi bien un problème qu'en étant au milieu de celui-ci.

Jade sortit de la foule, se dirigeant d'un pas assuré vers la petite table d'accueil des volontaires.

La plupart des membres de la troupe sont grands, mais elle l'est plus encore. Ils sont verts, mais là aussi, elle est au dela, de la pointe de la capuche jusqu'au bout des bottes, en passant par la peau. Par contre, niveau protection, et létalité affichée de leur arsenal, ils ont bien plus d'arguments pour apeurer le chaland.
Pas grave, Jade préfère ne pas avoir la faculté d'intimider quelqu'un tout en pouvant l'éliminer si le besoin s'en fait sentir, que l'inverse. C'est toujours plus impressionnant de voir gonfler les biceps lorsqu'on tend la corde d'un arc que de pointer un tube de métal sur quelqu'un, mais elle a plus confiance en le long fusil qui repose dans la housse jetée sur son épaule qu'en les monstruosités d'acier et de bois dans le dos des costauds.

Elle est devant le bureau, se penchant vers le responsable des inscriptions.


Jade Srhaggelle...

Coordinatrice aux Comités de Vigilance. Mais non. Se présenter ainsi serait sans doute vue comme une tentative d'ingérence/de prise de contrôle de l'affaire. Pour l'instant, il lui faut un maximum d'informations, en en laissant filtrer le minimum. Prendre une position d'observatrice.

... volontaire.

Il faut se restreindre de lancer une pensée pour sonder les personnes, guetter une réaction sur leur visage. Partir du principe que parmi eux, il y a quelqu'un de plus doué qu'elle à ce jeu là. Mettre ses capacités télépathiques en latence, afin de ne laisser aucune prise.

Quand commence l'entrainement ?

Position d'observatrice.
Pas de suiveuse corvéable à l'envie.
Ils ont les muscles des personnes assidues à l'entrainement, et l'équipement de ceux dépendant de personnes influentes. Mais il est peu probable que la moitié d'entre eux ait déjà mis le nez hors du Kil, et même si les Dessous sont réputés pour être "durs", rares sont les fois où ils le sont autant qu'une demi-douzaine de krynänns se lançant simultanément à l'assaut.
Le tout ne sera pas de faire une démonstration complète de ses talents, mais au moins de s'assurer une place de choix dans la catégorie "on va éviter de compter la demoiselle comme quantité négligeable.



La perfection est amorale.
 
Dassen Dorn
Comitaire actif
Kil'sin  
Le Dhiwara 5 Julantir 815 à 19h30
 
Le gars porte de grosses lunettes aux montures d'argent discrètement sophistiquées. Des gravures, des petits rouages tournant tout seul sans servir à rien, et une double paire de double lentilles fixées en casquette au-dessus des premières.

En fait non, ça n'a rien de très discret. C'est à la mode chez les jeunes gens aisés et sans goût.


Le tour de Jade arrive, lorsqu'il lève vraiment les yeux vers elle. Des yeux surpris qui deviennent aussitôt suspects.


« Vous êtes vraiment bizarre, vous... »

Il cesse de la dévisager, ça n'aura pas duré longtemps. Il fait son travail, il note son nom.

« Madame Srhaggelle, bienvenue chez nous et merci de vous être portée volontaire. Vous pourrez vous asseoir avec les autres en attendant l'entraînement. Il commencera juste après la démonstration, dans quelques minutes. Si vous souhaitez vous investir plus avant dans notre cause, n'hésitez pas à nous faire un don. Le petit bol à côté de moi est fait pour ça ! »

Le nez toujours baissé sur le bout de papier, il s'applique à écrire le nom de Jade avec de belles lettes amples et admirablement bizarrement roulées. Dans le bol en bord de table, la populace a déjà déposée de bonnes poignées de Krysoparses.


« Là ! » Il est fier.

« Maintenant vous pouvez signer ! » Il retourne la feuille et lui pointe du doigt une case libre à côté du nom magnifiquement calligraphié.




Midi est passé lorsqu'apparaît l'équipe du Commandant Bourglot. Les bureaux d'inscription, toujours ouverts, ont étés déplacés sur les bords de l'agora. Les cinq experts avancent en son centre et saluent le public. Ils ont tous fière allure et portent à peu près la même tenue que les crieurs.

Un jeune homme du comité grimpe sur les épaules d'un autre et présente le groupe.


« Mesdames, Messieurs, le comité de vigilance des puritains du Kil'sin est fier de vous présenter son fer de lance, l'équipe du commandant Bourglot ! »

Des gens applaudissent et le plus petit de l'équipe se démarque en avançant de deux pas. C'est un homme trapu au crâne rasé et aux énormes favoris noirs. Sa tenue est plus simple que les autres.

« Lorsqu'il n'y a pas de fous à combattre, Monsieur Bourglot vit aux Douces Chaumières sa paisible vie de père de famille. Il est en effet très fier de ses deux filles, Coroutine et Charbonelle, âgées de 5 et 7 ans. Tout à l'heure il nous a d'ailleurs avoué que sa femme attendait un nouvel enfant ! Donc s'il vous plaît, réjouissons-nous ensemble de cette heureuse nouvelle et applaudissons Monsieur Bourglot ! »

Des gens applaudissent encore.

« Mais derrière ce portrait de père idéal se cache aussi le brave travailleur. Mr.Bourglot est en effet maître ouvrier dans les mines du Kil'sin. Il gère l'une des plus performantes équipes de piocheurs de notre Sharss, ce qui leur a récemment valu de gagner la médaille des ''Très productifs travailleurs des valeureuses grandes mines du grand bon Kil'sin'' ! »

Dans la foule passe par endroits un léger brouhaha impressionné, mais une voix mauvaise crie :

« On s'en fou !!! Le spectacle ! »

Le jeune présentateur rougit un peu et abrège.

« Et maintenant, simulation en temps réel d'une exécution de Lanyshta ! »

Des tambours tambourinent, des trompettes trompettent, enfin ça fait du bruit quoi, il y a de la musique, une musique exhaltée ! Un énorme truc d'environ deux mètres de haut sort de la foule en criant comme un fauve. C'est poilu, ça porte de réelles griffes de combat et ça court dans tous les sens. La foule recule un peu, impressionnée. Mais aussitôt le Commandant Bourglot tonne un ordre à son équipe. Il sort une énorme pioche de derrière son dos tandis que ses associés encerclent la bête et l'isolent du public.

Ils se tournent autour un certain temps. Personne n'ose attaquer mais l'équipe semble maîtriser la bête. À coup de cris et de menaces ils l'entraînent là où ils veulent qu'elle soit. Bien au centre de l'agora. De la fumée sort de la bouche du Lanyshta alors qu'il essaye de mordre. Il grogne. Elle grogne d'un bruit étrange et métallique en défiant ses opposants d'un regard fou. Son visage n'a rien d'humain. Ça a des crocs, c'est épais, énorme... terrifiant. Le plus jeune des tueurs de Lanyshta arme un fusil au canon très large. Le déclic de l'armement fait se tourner la bête vers lui. Sans hésiter il tire. Un filet jaillit de l'arme mais la bête hurle et crache sur le filet un jet de flammes qui le brûle instantanément. Une... grosse douille tombe de la bouche de la bête. Mais on s'en fiche. De l'autre côté un lancier se jette sur elle et enfonce sa lance dans les côtes du monstre. La bête est surprise, mais le lancier ne s'arrête pas là. Il actionne le mécanisme de son arme, et la pointe se met à tourner et à forer le corps de la bête à toute vitesse. Ça dure une éternité et la chose hurle de douleur et des poches de sang éclatent partout sur son corps.

L'équipe est aspergée. Les geysers continuent assez longtemps à les éclabousser, mais la lance finit par traverser le corps du Lanyshta. On entend un bruit de déchirement et la pointe de l'arme ressort dans son dos. Mais le lancier est désormais trop près de la bête. Elle arrache l'arme de ses mains et, insensible à la douleur, elle se jette sur lui. Le courageux guerrier est plaqué au sol. Il se débat, mais sans aide il va se faire dévorer d'un instant à l'autre.

C'est alors que ses compagnons activent un mécanisme secret et que de superbes pistolets jaillissent de leurs manches. Aussitôt, ils mitraillent la bête. Les bruits de détonation impressionnent le public. Beaucoup de gens se bouchent les oreilles, mais par-dessus ce vacarme ils entendent le monstre Lanyshta gémir. Il gémit de douleur, d'un cri bizarre et surjoué, mais il ne bouge pas, paralysé au-dessus du lancier. Les geysers finissent par s'arrêter et les chasseurs laissent tomber leurs pistolets au sol, à court de munitions. Ils dégainent leurs sabres et défient la bête. Elle reprend peu à peu ses esprits... Mais soudain, sans répondre aux provocations elle lève ses griffes et s'apprête à arracher la tête du lancier. C'est alors que Monsieur Bourglot jaillit de nul part, il empoigne sa pioche à deux mains et la plante dans les côtes du monstre. Le bruit est sourd et métallique. Soulevée du sol par la puissance du choc, la bête se tord sur elle-même et s'éloigne assez pour libérer sa victime. Mais Monsieur Bourglot continue. Sans perdre de temps il court après le monstre, lui saute par dessus et dans le même mouvement, au moment de toucher le sol, il tourne sur lui-même et lui balance sa pioche dans le crâne. Les gens hurlent de peur et d'excitation. Le crâne se déboîte et vole dans les airs avant de s'écraser quelques mètres plus loin.

La bête se redresse et griffe l'air autour d'elle. Sans chercher à l'attaquer, sûr de lui, Monsieur Bourglot recule de quelques pas... Désorientée, sanguinolente, monstrueuse, elle marche toute seule quelques instants... Puis elle s'écroule.




« Déjà... ? »
Beaucoup cessent alors de retenir leur souffle.

Le silence règne durant quelques secondes. Personne ne bouge, personne n'applaudit.

Puis on entend un déclic. Quelqu'un appuie sur un bouton et une fusée à l'intérieur du crâne se déclenche. Dans une nuée d'étincelles le crâne s'envole de nouveaux dans les airs. Il monte haut, il vole rapidement en décrivant de grands cercles au-dessus de la place. Et finalement il explose en un formidable feu d'artifice.

Le public crie et applaudit. Ils ont l'air heureux.






« On applaudit bien fort cette superbe performance de Monsieur Bourglot ! Bravo à vous pour cette incroyable démonstration. Avec vous dans notre quartier, les Lanyshtas n'ont qu'à bien se tenir ! Ha ha ha !

Dans quelques instants, début de l'entraînement public encadré par Monsieur Bourglot en personne ! Merci à vous !
 »

Des membres du comité récupèrent la carcasse en plaisantant avec l'idiot coincé à l'intérieur.


alias Djet Tamère
 
Jade Srhaggelle
Représentant,
la Vigilance

Kil'sin  
Le Luang 6 Julantir 815 à 20h03
 
Jade n'était pas du genre à mépriser autrui.
Pas qu'elle ne s'évalue jamais comme étant d'une valeur supérieure à ceux qui l'entourait, mais c'était juste que se montrer méprisant était une manifestation émotionnelle doublée d'une marque de jugement, et que l'un comme l'autre étaient des dons d'information à autrui.
Aussi n'eut-elle pas le moindre rictus méprisant lorsque le "Lanyshsta" fut amené. Mais on en passa pas très loin.

Le tout était de savoir où se situait la supercherie.
Était-ce là juste une façon de se faire mousser auprès du public, d'assurer le spectacle, en mêlant un monstre improbable au nom accrocheur des Lanyshstas ?
Ou est-ce que la majorité des membres des Vigilants Puritains pensaient vraiment qu'un Lanyshsta ressemblait à... Cela ?
Pas que la démonstration en elle-même pause de gros problèmes, ceci dit.
Même au sein du public, la plupart des gens -pas forcément la plupart en nombre, mais en intelligence... On pouvait se contenter de convaincre 10% seulement des personnes, si c'était les 10% capables d'influencer les 90% restant- devaient bien réaliser le décalage entre une telle démonstration et la réalité. Il ne devrait en résulter au pire qu'une peur/haine des Lanyshstas proches de cette forme délirante, ce qui devrait au contraire assurer la tranquillité des véritables mutants.

Ceci dit, aussi décalée fut-elle, la démonstration était particulièrement instructive.
- Bourglot. Personnalité narcissique, à forte orientation symbolique. Outre le petit discours initial, le coup de la pioche de guerre pour le brave "Vigilant mineur" était vraiment symptomatique. Ceci dit, de tels personnes n'arrivaient pas à entretenir leur égo sans un charisme supérieur à la moyenne. Il pouvait donc être rentable de le flatter dans le sens du poil afin de pouvoir le manipuler, si le besoin s'en faisait sentir.
- L'équipement. Même s'il y avait un sacrifice au profit de la mise en scène, et que toute l'action avait sans doute été chorégraphiée au fil de diverses répétitions, la versatilité des soldats et leur bonne condition physique crevait les yeux. Là, c'était un phénomène de foire, mais contre un véritable adversaire, ils avaient au moins le potentiel de s'en tirer aussi bien. Tout dépendait en fait de leur psychologie, s'ils se prenaient pour de sculpturaux acteurs qui paradaient devant les demoiselles, cela tournerait vite au massacre. Mais que la moitié d'entre eux aient les nerfs suffisamment solide pour se comporter en situation réelle avec le même sang-froid que lors de ce combat d'apparat, et ils pourraient s'en sortir honorablement.
- L'artisan. Car si la créature était fantaisiste par son éloignement avec la réalité, pour quelqu'un n'ayant aucune connaissance de l'extérieur, elle avait un aspect réaliste, crédible. Le rendu visuel était correct, les mouvements relativement harmonieux... On était loin des créatures bio-mécaniques qui devaient les observer de loin, mais c'était quand même de la très bonne qualité, plus digne de travailler dans des ateliers de recherche sur de nouvelles armes que dans des artifices de foire.

Enfin bref. Pour l'instant, l'étape de l'épate était passée, le tout était de voir si l'entrainement allait se passer dans le même registre, ou si les choses seraient un peu moins alambiquées.

Semblant toujours impassible, Jade ne perdait pas une miette de la mise en place de l'étape suivante.
Pour paraphraser l'annonceur, avec les Lanyshstas dans le quartier, monsieur Bourglot n'avait qu'à bien se tenir.



La perfection est amorale.
 
Dassen Dorn
Comitaire actif
Kil'sin  
Le Matal 7 Julantir 815 à 22h52
 
Le spectacle a eu de l'effet.

Des gens parlent.

Il y a des colériques.

Il y a des naïfs.

Il y a ceux qui n'ont pas perçus les enjeux.

Et un nombre incertain de Krolanne trouve le discours xénophobe de ce spectacle plutôt tout à fait douteux mais pas encore assez injustifiable pour mériter un débat et une remise en cause publique de la conception ici défendue du problème Lanyshta.




Sans se changer l'équipe du commandant Bourglot vient chercher les volontaires. Ils sont toujours couvert de la mixture rouge projetée par les blessures du monstre.


Les crieurs continuent d'attirer ceux qu'ils peuvent.


« Cher public, messieurs dames ! N'hésitez pas à vous joindre à nous ! Volontaires ou pas, nous vous accueillerons avec plaisir. En cette cruelle époque de mutations, apparaissent de nouvelles menaces pour notre espèce. Chaque Krolanne devrait être capable de se défendre, et il est de notre devoir de partager avec vous notre expérience... sans réclamer le moindre frais ! »


Lorsque les premiers curieux s'approchent l'entraînement commence enfin.


Différentes tailles d'armures de cuir ont été déposées devant l'équipe du Commandant Bourglot ; et parfaitement rangées devant elles une série d'armes émoussées ou en bois attendent les mains des recrues. Mais pour commencer, le chef fait son discours.


« Bonjour à tous. Je suis monsieur Bourglot. »

C'est inattendu. Sa voix est plate. Très plate. Étouffée. Elle ne porte pas.

« Bon. Hum... Nous vous expliquerons plus tard comment se déroulera la traque. Pour l'instant il faut que je parle des généralités que tout Kil'sinite devrait connaître. »

C'est assez étrange car il à l'air vaguement timide et assez fier de lui. Il lève le doigt pour capter l'attention.

« Chaque Lanyshta est unique. N'oubliez pas qu'avant, c'était des Krolannes. Comme nous. Mais nos spécialistes pensent qu'il y avait quelque chose de corrompu chez eux. C'est ça qui a attiré les parasites. Oui. D'après nos spécialistes la mutation des Lanyshtas n'a rien de naturel. Un parasite venu de l'extérieur de la ville se serait introduit dans leur corps, parfois même sans qu'ils ne s'en rendent compte... Au fur et à mesure que ces parasites s'étendent dans l'organisme de leur hôte, ces derniers perdent peu à peu leur humanité. Leur personnalité s'efface, ils deviennent des marionnettes qui n'ont même pas conscience d'être manipulées. C'est pourquoi la plupart des Lanyshtas agissent comme des Krolannes et qu'il est très difficile de les repérer. Pendant cette période, ils croient même avoir des sentiments. Pourtant ce n'est qu'une illusion provoquée par le parasite, qui contrôle déjà les veines et les nerfs de sa victime. Puis le parasite grandit et fini par transformer la nature même du corps qui les accueille. Il commence à le faire profondément muter, et la conscience des hôtes devient de plus en plus rudimentaire. Sans comprendre ce qui leur arrive, et sans s'en rendre compte, ni s'en souvenir, eh bien... Ils commencent à se transformer en monstre. Même si ça ne dure qu'une nuit, les facultés du Lanyshta sont alors diaboliquement décuplées.

C'est à ce moment là qu'il est le plus dangereux !

On pense qu'il faut un à deux ans pour atteindre cette étape de la mutation, mais cette durée peut beaucoup varier selon les individus. Quoi qu'il en soit rappelez vous que plus le Lanyshta est vieux, plus il est dangereux. Je ne plaisante pas ! Avant la dernière étape de sa mutation nous pensons qu'il a eu le temps d'expérimenter de nombreux pouvoirs affreux. La puissance de son corps a progressivement monté, il a donc pu apprendre à la contrôler. Mais il y a aussi ce qu'on appelle les Lanyshto. Ceux-là sont un peu moins puissants, mais ne les sous-estimez pas ! On parle de Lanyshto lorsque la mutation finale s'est déclenchée presque aussitôt après le moment où l'hôte Krolanne a été parasité. Le parasite n'a pas eu le temps de se familiariser avec le potentiel du corps Krolanne, et donc ses capacités ont un peu avortées. Ça ne l'empêche pas d'être capable de porter, on l'estime, environ deux fois ce que pourrait un Krolanne normal.

Pour éliminer ces monstres, nous avons mis au point de nombreuses techniques. Bien que ce soit l'un des projets de notre comité, cela prendrait des années de les enseigner à tout ceux qui en sont dignes. Sans compter que les Lanyshta et les Lanyshto risqueraient de les apprendre en même-temps. Nous avons donc décidés pour l'instant de garder nos techniques secrètes. Mais dans tous les cas, le moyen le plus sûr de combattre un Lanyshta est de renouer avec notre instinct de survie. C'est ce que nous voulons vous montrer aujourd'hui.

Donc... on a des armes et des armures devant nous. Nous allons organiser des combats singuliers, à un contre un : l'un d'entre vous contre un membre de mon équipe. Vous pouvez défier celui que vous voulez dès qu'il sera disponible. Et suivez mon conseil, n'essayez pas d'imiter les techniques du comité. Elles sont très sophistiquées et ne sont pas encore à votre portée. Pour l'instant, apprenez simplement à utiliser votre force et votre instinct. En général quand on se bat pour la première fois on est très faible, on perd nos moyens à cause de la peur. Vous devez dépasser cette peur pour pouvoir réagir instinctivement face aux monstres. C'est le meilleur moyen de le surprendre et d'être en mesure survivre quelle que soit la situation.

Voilà... Est-ce qu'il y a des questions ? Un volontaire pour le premier combat ? Ce chanceux va même pouvoir me défier.
 »


alias Djet Tamère
 
Jade Srhaggelle
Représentant,
la Vigilance

Kil'sin  
Le Merakih 8 Julantir 815 à 16h10
 
Intéressant.

La conception que le Comité avait des Lanyshstas -ou du moins celle qu'elle présentait comme étant la sienne- était originale.
Au mieux partielle, au pire erronnée, mais en tout cas originale. En fait, d'après les ouvrages lus à ce sujet, les Lanyshstas étaient apparentés ici à ce qu'on pouvait attendre des Fuscusiens : parasite prenant le contrôle, développant lentement ses pouvoirs, avant une mutation brutale vers un stade d'évolution supérieur.
Un spécialiste aurait sans doute pu relever de nombreux points de divergence entre les deux présentations, mais au niveau de connaissance de Jade -qui devait sur ce point rester néanmoins supérieur à l'immense majorité du Kil- la confusion était presque parfaite.

Ajout à la connaissance sur le Comité de Vigilance des Puritains : sans doute au moins un membre ou ex-membre en sachant relativement long sur les Fuscusiens.
Que la confusion soit volontaire, afin de créer une histoire effrayante, ou subie, car ayant rencontré un krolanne habité de telle façon et confondu avec un Lanyshsta, cela importait peu : on atteignait pas un tel niveau de détail sans une base solide.

Monsieur Bourglot, aussi, était... En décalage.
A peine classé dans la catégorie narcissique charismatique, il faisait montre d'hésitations, et d'une absence de relief certaine.
Sans que cela doive faire oublier la démonstration de tout à l'heure.
Hypothèse 1 : il souffre d'un mal-être issu de la différence entre comment il se voit, et comment les autres le voit. Du coup, il compense. Mêmes conséquences que précédemment, sauf qu'il est sans doute un peu plus intelligent, et plus fragile psychologiquement.
Hypothèse 2 : le symbolisme. Il est une figure de proue jugée idéale par autrui, et n'est qu'un instrument entre d'autres mains. Ce qui pouvait expliquer le décalage, et le déclassait à une intelligence/volonté basse. Mais toutes les remarques sur la personnalité restaient valables, à un transfert près. Celui qui le contrôlait devait s'identifier d'une façon ou une autre à l'image qu'il donnait de Bourglot, et froisser cette image, c'était froisser la personne.

Dans tout les cas, il était hors de question de se porter volontaire pour affronter le chef.
- Si le but était encore une fois de faire de l'épate, il y avait de grandes chances qu'il ai un atout déloyal dans la manche lui permettant d'assurer sa victoire, quitte à humilier la personne en face. Il pouvait décider de "sacrifier" un volontaire pour assurer sa main-mise sur le reste, autant éviter.
- S'il combattait normalement, et qu'elle le laissait prendre l'ascendant sur elle, il serait très difficile d'inverser la tendance plus tard, si le besoin s'en faisait sentir.
- Si au contraire elle le dominait, l'égo -le sien ou celui de son manipulateur le cas échéant- serait froissé et pourrait lui poser des problèmes à court terme.
- Dans tout les cas, cela lui imposait de se mettre en avant, ce qui était pour l'instant hors de question. Dans le pire des cas, un Lanyshta traquant d'autres Lanyshstas en manipulant la troupe de Bourglot s'intéresserait particulièrement au combat de celui-ci, autant éviter d'être trop visible.

Les volontaires, soit par humilité, soit par crainte après la démonstration, ne se bousculaient pas au portillon.

Bon, du coup, il lui fallait deux personnes. Un en face, et... Ah, bien. Et un parmi les volontaires.
Un grand qui se tenait bien droit. Pas assez sûr de lui pour se jeter d'emblée dans la mélée, mais qui avait plus que les autres le potentiel d'accepter "l'honneur" d'être le premier.
Jade se décala un peu pour lui tapoter sur l'épaule.


Bonne chance.

Pas qu'elle lui souhaita bonne chance réellement. Dans l'absolu, il pouvait bien finir avec une machoire brisée dans la minute que la Vigilante n'en serait nullement émue. Mais elle avait parlé juste assez fort, attirant juste assez l'attention, pour l'encourager à relever le défi, tout en affirmant aux autres la place naturelle de "celui qui semblait le plus costaud". Qu'elle tombe sur un timide ou qu'un autre soit un petit excité, et cela ne prendrait pas, mais ce n'était pas grave.
Le tout était de donner une image de "personnalité volontaire et démonstrative, un brin fantasque", afin que l'on ne remette pas en cause ses propres choix.

En effet, suite à cet encouragement, Jade se décala ostensiblement, pour se planter devant un membre de la troupe des Puritains.
Pas le plus grand, mais le plus large, un air de contentement pas spécialement malin sur le visage. Hypothèse plausible : il était fier de son corps, sans doute de sa force, et chercherait à la montrer. D'autant plus si on remettait en cause cette prétendue force.
Et c'était exactement ce qu'il fallait à Jade : un costaud, potentiellement respecté par ses pairs, mais qui combattrait avec plus d'enthousiasme que de subtilité.
Dédaignant ouvertement les protections de cuir et les armes de bois -façon "je n'ai pas besoin de ça", surtout qu'elle n'avait justement pas l'intention de s'encombrer d'objets qui amoindriraient ses capacités- elle détailla le bonhomme de haut en bas puis de bas en haut, les mains sur les hanches.

Puis, semblant satisfaite de son choix, elle lâcha, de façon sonore, de quoi s'assurer que son adversaire aurait plus envie de lui refaire le portrait que de ne pas heurter la demoiselle.


Je prends le gros !


La perfection est amorale.
 
Dassen Dorn
Comitaire actif
Kil'sin  
Le Merakih 8 Julantir 815 à 21h28
 
Le guerrier ventru lance un regard au commandant Bourglot. Le commandant lui répond à voix haute.

« Ecoutez-moi, notre jeune recrue vient de faire une grave erreur. À cause de son orgueil. »

Le premier volontaire s'équipe et Bourglot s'approche de Jade. Mais pas trop, il hésite, il n'avance plus. Peut-être a t-il remarqué qu'il paraîtrait tout petit à côté d'elle.

« Dans un vrai combat, eh bien. il n'y a pas de règles. Ce n'est pas toujours le plus fort, le plus rapide ou le plus courageux qui gagne. Ça peut aussi être le plus sournois, le plus chanceux, ou le mieux équipé. N'oubliez pas ce que je vous dis. Si vous avez un moyen de prendre l'avantage sur votre adversaire, quel qu'il soit, prenez-le. Vraiment, prenez-le. Vous pensez que vous allez gagner, vous êtes sûr de vous ? Mais n'importe quoi peut arriver. Un second adversaire peut apparaître dans votre dos. Vous auriez pu renforcer votre position mais vous avez décidés de ne pas le faire. Par orgueil. Dans cette situation cette décision serait mortelle pour vous.

Madame, je ne vous donne pas de seconde chance. Assumez vos choix. Vous combattrez désarmée face à un combattant en pleine possession de ses moyens. Défendez-vous comme vous pouvez. Rusez. Gardez la tête froide.
 »

''Quelle cruauté'', ''holalà, quelle cruauté, finalement qu'il est sévère...''. Ça murmure ce genre de choses.

À côté le jeune homme en train d'enfiler son armure de cuir a un sourire ironique sur les lèvres. Il regarde Jade avec un peu d'amusement et de dédain.


« Hey Madame, bonne chance ! »

Quelques uns rient.

L'adversaire de Jade écarte le public et délimite du bout de sa lance un cercle d'une dizaine de mètres de rayon autour de la coordinatrice. Il fait très chaud, des gouttes de transpiration perlent de ses avant-bras et de son front. Il est un peu bedonnant mais il est encore jeune et musclé et lorsqu'il parle sa voix est grave et rugueuse. Elle porte comme devrait porter celle de monsieur Bourglot.


« Messieurs dames, écartez-vous ! Ce cercle est la limite de sécurité que je vous conseille de respecter ! Mais comme l'a dit le commandant Bourglot, ici, il n'y a aucune règle. Donc gardez un œil sur ce qui se passe entre la dame toute verte et moi ! Lorsque j'aurais réveillé son instinct et que vous découvrirez sa véritable nature, qui sait ce qui peut arriver ?! »

Un petit moment de frayeur parcourt certaines personnes. Les compagnons du vigilant rassurent aussitôt le public. Ces combats seront violents, mais s'ils les encadrent personnellement, c'est pour garder le contrôle de la situation.

Le ventru de l'équipe se met alors en garde. Sa lance d'entraînement est pointée vers Jade, qui est à environ 5 mètres devant lui. Sa position est solide, ses jambes écartées sont légèrement pliées, son centre de gravité est parfaitement placé. Il maintient la pointe de bois à deux mètres de lui, à la même hauteur que son propre nombril. Sa prise est solide, agressive. D'un coup il peut frapper avec assez de marge pour augmenter sa portée d'un long pas.


« Allez, attaques-moi ! »

Il aboie. Il est sérieux.

Ça en fait rire.



alias Djet Tamère
 
Jade Srhaggelle
Représentant,
la Vigilance

Kil'sin  
Le Julung 9 Julantir 815 à 11h09
 
Le combat pouvait sembler inégal. Une nouvelle mise en scène. D'ailleurs, dans la grande tradition du Kil'sin, l'un des spectateurs ne se gêna pas pour signaler que mais vous ne voyez pas que c'est du chiqué ? sans que cela semble émouvoir les autres badauds.
Qu'ils s'abreuvent à une source de découverte ou qu'ils observent une pièce de théâtre répétée, ils l'ignoraient peut-être, mais s'en fichaient pas mal tant qu'il y avait du spectacle.

Tandis que son adversaire se mettait en position, Jade se contenta de repousser correctement les pans de sa cape derrière elle, laissant apparaître une tenue excessivement moulante aux quelques reflets métalliques.
Pour ceux qui en connaissaient les propriétés, l'armure n'avait aucune chance d'arrêter un coup de lame, et même contre une arme de bois, sa protection serait minimale, bien en dessous des tenues d'entrainement. Mais cela, comme les apparemment tout simples bracelets de cuir qui lui englobaient les poignets, participaient à la stratégie globale.
Sur les raisons d'une victoire, mis à part une pondération sur certains éléments, elle était du même avis que le commandant.
Le plus fort était son adversaire, presque à coup sûr. Pour la rapidité, elle avait sans doute de la marge, mais mieux valait ne pas compter uniquement dessus pour faire la différence. Courage et chance étaient deux données subjectives qu'elle préférait mettre de côté. Son équipement était ce qui se faisait de mieux en la matière, surtout depuis qu'elle en avait subtilement amélioré l'efficacité. Quant à la sournoiserie...
Et bien face à un adversaire plus fort, plus rapide, plus courageux, plus chanceux et mieux équipé, une dose suffisante de sournoiserie permettait toujours de l'emporter. Même si ce terme était généralement moralement connoté.

Jade préférait l'appellation d'observation raisonnée.

Bon, il n'avait pas l'intention de foncer. Compréhensible, et raisonnable à la fois : un combattant plus lourdement harnachait prenait un risque à se mettre en branle contre un adversaire plus agile, alors qu'à rester statique, il était quasi inamovible. De plus, à charger à la lance face à une cible mouvante, il risquait de continuer dans le public, blessant quelqu'un en commettant une irréparable faute de communication.
Mais Jade n'avait pas l'intention de partir à l'assaut.

Tout en restant à distance respectable, elle observait le reste du public. Un coup dans le dos, une bourrade surprise, et cela pouvait modifier le cours des choses. D'autant plus qu'on l'avait prévenue qu'un second pouvait intervenir, au moins potentiellement.

Elle ouvrit la bouche pour provoquer, le forcer à bouger, mais la referma aussitôt.
Parler le moins possible, réserver ses propos pour des mots qui marqueraient.
Au lieu de quoi, elle se baissa d'un coup, ramassant du bout des doigts ce qui trainait à terre.
"C'est pas assez gros" venant d'un côté, "le vieux coup de la poussière dans les yeux" pour d'autres. Le public réagissait, commentait, et se mis en partie à rire lorsque Jade commença, tout en parcourant lentement l'extérieur du cercle, à lancer quelques cailloux sur son adversaire.

Enfin "cailloux"... Pas de ces grosses pierres aptes à fracasser un crâne, hein, plutôt de ces graviers de la taille d'une phalange qu'on expédiait d'une pichenette. Et même s'ils étaient bien lancés, rebondissant sur la joue ou le nez, ils ne causeraient aucun dégât.

Allez, viens !

Des clous. Elle n'attaquerait pas, mais continuerait à tourner. Après tout, d'un point de vue extérieur, c'était compréhensible : moins chargée, plus souple, elle pouvait marcher des heures en cercle, tandis que son adversaire, à maintenir une prise solide et une position inflexible, s'épuiserait plus vite sous le soleil. On pouvait aussi supposer de la peur, tout comme le laissait deviner la remarque de celui qu'elle avait encouragé.

Alors Madame, il est trop gros pour vous, finalement ?

Oh, allez. Juste un mot, histoire de marquer. Quelque chose qui semblait totalement futile en un tel instant.
Jade rectifia, d'un ton sec.


Mademoiselle.

Quelques rires, encore -il faut dire qu'avec les Kil'sinites, il s'en trouvait toujours pour trouver de l'ironie en tout- mais aussi quelques grommellements. Le spectacle ne démarrait pas, et certains commençaient à s'éloigner.
C'était un vrai combat, à sa façon. Sans règles. Dont aucune n'interdisait l'utilisation de la pression du public.

Un coup d'oeil à son commandant, qui haussa les épaules, changea l'attitude du combattant.
S'attendre à une démonstration de force, un coup apte à faire oublier le ridicule de la chose, une victoire en un coup pour contrer la guerre d'usure.

Il avança, sans hâte, armant un coup prévisible.
Le large balayage partit, fauchant l'espace à hauteur de taille à la limite du public, ne laissant aucune chance à un adversaire resté debout.
Mais Jade n'était déjà plus là, se faufilant sous la hampe d'un saut glissé sur la pointe du pied gauche. Puis, utilisant ses paumes pour pousser sur le sol et accélérer la rotation que la position en déséquilibre ne lui permettait pas d'acquérir pleinement, elle propulsa d'un mouvement tournant son talon droit en plein dans la rotule de son adversaire.

*CRAC*

Sur un enfant, ou un adulte frêle, du moins, est-ce ce qu'on aurait entendu, suite à la fracture qui se serait ensuivi.
Là, ce fut plutôt un "poc" sonore lorsque la genouillère de cuir encaissa la majorité du choc, à défaut de sa totalité.

Aussitôt, les nouveaux commentaires fusèrent, des admiratifs "oh, joli !" aux sceptiques "c'est pas comme ça qu'elle va l'avoir" en passant par quelques analyses plus fines "si elle lui refait le coup une ou deux fois, ça pourrait marcher."
Et effectivement, à voir la grimace sur les traits du "gros", il en était arrivé à la même conclusion. Le genou ébranlé pouvait tenir le choc, mais d'autres chocs semblables risquaient de lui faire faire ses adieux à sa rotule.

Bon. Elle venait de prendre un ascendant psychologique, mais il allait falloir rapidement y renoncer afin de le pousser à la faute. Qu'il devienne trop méfiant, et elle aurait du mal à le prendre en défaut.
Il fallait donc renoncer à sa propre adaptabilité, afin de laisser celle de son adversaire s'exprimer.

Il revint à l'assaut, de façon plus prudente, Jade se contentant de reculer et d'esquiver.
L'utilisation de sorts afin de l'aider était le plus difficile à repousser, ces derniers étant devenus une ressource naturelle ces derniers temps. C'était comme de se forcer à garder les yeux fermés tout en sachant que la vue nous aiderait bien.
Il enchainait les coups, patiemment, prenant garde à ne pas laisser d'ouverture, revenant lentement à une position plus offensive.

Enfin il se décida. Un nouveau balayage, moins vif que le précédent, comme un appel "regarde, je fais le même coup".
Jade eut la même réaction, serrant les dents par anticipation, se préparant au choc.
Car effectivement, sachant à quoi s'attendre, et disposant d'une arme plus contrôlable, son adversaire releva brusquement le bras gauche tandis que le droit se propulsait vers le bas, transformant un balayage horizontal de la pointe en une frappe verticale de la hampe.
Jade, qui avait ralentit sa rotation, fut percutée sur le côté de la cuisse, avant d'avoir pu porter son propre coup.
Elle roula sur elle-même -particulièrement désagréable avec sa combinaison- et se releva hors de portée, non sans s'être mordue la lèvre.
Le léger filet rouge ne passa pas inaperçu longtemps, attirant le rugissement de plaisir de son opposant.

Premier sang !

Quelques applaudissements, mais aussi des murmures inquiets, car rien dans l'attitude de Jade ne semblait annoncer son désir d'arrêter.

Il faut toujours se méfier de la victoire. Une victoire pousse son auteur à reproduire à l'identique la manoeuvre ayant conduit à celle-ci. Face à des animaux, c'est parfait, face à un adversaire capable d'analyse, c'est un risque mortel.
Et niveau analyse, Jade avait trouvé ce qu'elle souhaitait.

Après quelques gravillons -qui la firent huer par quelques excités- les assauts reprirent, avec un rien d'agressivité en plus, d'exaltation. Il devait la penser effrayer, mais le coup reçu était indispensable pour pouvoir porter sa propre offensive.

Balayage.
Se glisser sous la hampe.
Relevage de bras, coup vertical.
Sauf que cette fois-ci, Jade ne s'était pas mise à tourner pour frapper du talon, poussant au contraire pour se relever d'un bond, sous le bras gauche tendu en l'air. Ce qui est une mauvaise idée, quand la protection vient des épaulières, et que les aiselles abritent les coutures.
Jade s'était en une fraction de seconde glissée derrière le krolanne, l'avant-bras droit sous le menton, la main coincée sous l'aisselle de son adversaire lorsque celui-ci, par réflexe, avait tenté de la lui coincer en rabaissant le bras.

Si le mouvement avait provoqué applaudissements et rires, au point d'étouffer le cri de douleur du mâle, Jade sentait, au liquide lui coulant sur la paume, que le mécanisme de ses armes de poignet avait fonctionnait.

La scène semblait figée, le combattant à la lance redevenue horizontale, Jade derrière lui, semblant s'accrocher à une position certes avantageuse, mais que la lutte du continuer -une lutte classique, s'entend- et on pouvait deviner qu'elle aurait des difficultés face à la masse de son adversaire.
Mais là, pas un mouvement, et la foule prenait lentement conscience que quelque chose n'allait pas, bien plus lentement que le "tu bouges, tu meurs" murmuré au creux de l'oreille qui avait fait prendre conscience au Vigilant que le combat était terminé.

Les commentaires décroissants, et avant que les protestations ne croissent, Jade lança son explication.

Si Bourglot avait une voix fade de petit gratte-papier, et son adversaire la voix forte d'un meneur d'homme, la voix de basse de Jade gardait cette douceur et cette sensualité dont on aurait pu rêver au creux du lit, tout en conservant les accents implacables d'un orateur exposant des points incontestables. On aurait dit le ronronnement d'une panthère.


Dans un vrai combat il était plus marquant de reprendre les termes la lame ne se serait pas arrêtée dans les muscles. Mieux valait "muscle" que "gras", désormais. Elle aurait percé le poumon, s'avançant vers le cœur, et vous seriez en train de vous noyer dans votre propre sang. Pas trop de détails techniques, la foule voulait du marquant, pas un exposé.
Vous avez sous-estimé votre adversaire. Par orgueil. Dans cette situation cette décision serait mortelle pour vous.

Le premier sang ne compte jamais autant que le dernier.


D'un geste sec, elle arrachant la lame de sa gangue de chair. Le trou dans l'armure était minuscule, quasi invisible à une observation superficielle, mais il aurait pu suffire. Sans compter qu'elle aurait pu, le cas échéant, user de la jumelle de son arme pour percer la gorge.

Essuyant nonchalamment la lame dans la cape de son adversaire -tant pour le geste vis à vis de la foule que pour avoir une lame propre avant de la faire glisser dans son compartiment-, elle se tourna vers Bourglot, et le jeune homme qui avait fini de s’arnacher.


A votre tour, je crois. Bonne chance, Monsieur.


La perfection est amorale.
 
Dassen Dorn
Comitaire actif
Kil'sin  
Le Julung 9 Julantir 815 à 19h33
 
Jade enlève la lame.

« Oh ohhh ! Mais vous êtes malade ! »

Le chasseur s'écarte, il est paniqué. On perçoit la peur dans sa voix et dans ses yeux. De sa main il retient le sang qui coule le long de son armure.

Autour de lui le public murmure. Il n'a pas compris ce qui s'est passé et le peu de sang qu'ils voient les impressionne.

Les traqueurs de Lanyshta se lancent des regards. Ils comprennent la situation. Mais ils préservent les apparences.



« Bravo pour ce combat mademoiselle. Vous nous avez tous surpris.

Pouvons-nous savoir comment vous vous appelez ?
 »

Le commandant Bourglot interroge Jade, mais il gesticule d'une main à l'attention de ses acolytes. L'entraînement doit continuer.


Le premier volontaire entre dans l'arène improvisée à la place de Jade. En même temps les autres vigilants choisissent eux-mêmes leurs victimes et tracent au sol leur cercle de combat. On les entends plaisanter et discuter avec les nouveaux inscrits.

L'atmosphère se détend lentement.


Le second combat commence. Le volontaire est armé d'un sabre, il affronte un grand bonhomme en pleine forme. L'allonge qu'apporte la lance émoussée du vigilant lui permet de jouer avec sa victime. Il multiplie les vifs coups d'estoc et de taille, et le jeune homme s'agite pour parer ou esquiver les coups. Il est maladroit et perd beaucoup d'énergie, mais c'est un vrai athlète. Le vigilant accélère progressivement ses attaques, et l'autre parvient à tenir le rythme. Il commence à prendre le coup, mais la vitesse le déstabilise. Il doit se rendre compte qu'il ne peut pas tenir longtemps cette position. Il est oppressé, il n'a pas le temps de réfléchir, pourtant il doit s'adapter. Il tente alors d'avancer vers son adversaire, et ce dernier le laisse faire. Le vigilant n'a pas l'air fatigué non plus, pourtant ses coups deviennent hasardeux. Ça encourage le jeune homme qui redouble d'effort. Alors que le lancier commence à reculer pour garder l'avantage de sa portée, la recrue fonce soudain sur lui. Le vigilant pousse un cri aiguë, lâche sa lance et monte ses mains au visage en grimaçant d'horreur. À deux mains, l'énervé lève son sabre. Il va l'abaisser sur le crâne de son adversaire mais celui-ci reprend son sérieux. C'est rapide. Très rapide. D'un pas le vigilant se rapproche de l'épéiste et lui donne un coup de boule. Il sort de l'axe de son adversaire en se décalant d'un pas, saisit et tord l'un de ses poignets. Le jeune volontaire est emporté par son élan, il perd l'équilibre. Le poignet tordu il se penche mécaniquement en avant et manque de tomber à terre, mais un coup de pied au derrière le redresse sous les éclats de rire du public.


« Hey ! C'était pas mal ça. Toi t'en as dans le ventre. C'était vraiment bien, mais il va falloir te lâcher plus que ça. Si tu veux vraiment me toucher, sois plus rapide ! »

Il a lâché le poignet du jeune homme qui s'écarte un peu et reprend ses esprits. Les encouragements ont l'air de le toucher, mais peut-être n'apprécie t-il d'être humilié. Il se met en garde, à la fois coléreux et plus confiant.

« Yaaah ! »

Il charge comme une brute. Aucune stratégie, aucune technique. Il charge. Le sabre s'abat. L'autre dégaine comme l'éclair et les sabres s'entrechoquent devant son visage. Une rapide passe de sabres s'ensuit, mais le jeune homme n'a pas l'air d'être un bon escrimeur. Soudain il reçoit un petit coup dans les côtes. Il lâche sa propre arme et grimace de douleur. Mais avant que l'autre ne revienne à l'assaut il coince le sabre de son adversaire sous son bras et le frappe de sa main libre. Le vigilant se prend une droite en plein visage et les gens applaudissent. Ils encouragent le jeune homme qui tente d'en remettre une, mais son adversaire dégage son sabre, évite le coup et balaye ses jambes.

Finalement ce duel, il à l'air assez amusant.

Le combat continue ainsi un certain temps. Le vigilant laisse de nombreuses ouvertures à son adversaire. Il le teste, il joue avec lui, mais il n'hésite pas à lui faire mal lorsqu'il perd sa concentration. L'armure de cuir suffit à encaisser les coups, qui ne laisseront que quelques bleus sans gravité. À côté les autres combats se déroulent dans le même ton. Certaines recrues sont plus ou moins vives que d'autres, mais aussi plus ou moins jeunes. Les duellistes jouent généralement avec fair-play et l'assurance comme la répartie des vigilants leur permettent d'éviter les débordements. Le public est là, il soutient, il rit, et au moins le temps d'un duel de nouveaux volontaires apparaissent.

Le commandant Bourglot met la main à la pâte, lui aussi. Mais il est un peu lourdaud et pas très amusant. Ses acolytes les plus jeunes ont plus de succès.

Au bout de quelques instants celui qu'a blessé Jade revient à son tour. Maussade. Mais il reprend vite des couleurs et s'amuse autant que les autres.

La journée continuera ainsi avec de temps en temps un nez cassé ou un œil au beurre-noir. Mais les traqueurs de Lanyshta semblent faire leur travail et l'attraction a du succès...

À en faire oublier qu'il y aura un vrai monstre à traquer.



alias Djet Tamère
 
Jade Srhaggelle
Représentant,
la Vigilance

Kil'sin  
Le Vayang 10 Julantir 815 à 11h31
 
Il était difficile, pour ne pas dire impossible, de suivre tout les combats en même temps. Mais tel un cirque à pistes multiples, il était possible de se concentrer sur les temps forts des uns et des autres.

L'ensemble était relativement cohérent : les volontaires étaient majoritairement des jeunes gens plein d'entrain, ou une krolanne expérimentée, qui ne se lançaient pas dans cette "chasse au Lanyshsta" -même si Jade pu entendre deux d'entre eux insister assez vivement sur le fait qu'ils étaient volontaires pour "appréhender pacifiquement un Lanyshsta", se refusant à user de violence sans menace directe- sans avoir la moindre chance de suivre le rythme.
Un jeune, presque un gamin, fut bien gentiment recalé lorsqu'il resta à pleurer après le premier coup reçu, mais volontaire ne rimait pas avec suicidaire.
Et de même, pour la troupe, on ressentait un réel entrainement, et une certaine cohésion, même si à part quelques-uns -dont un fluet, défiguré par la petite vérole, qui semblait littéralement danser avec sa lance de bois, assurant le spectacle avec son adversaire alors qu'il aurait sans doute pu l'éliminer en un mouvement avec une véritable arme- on sentait plus d'enthousiasme et d'apprentissage de salle d'arme que d'expérience du combat réel.

Elle n'aurait pas forcément misé sur eux contre une troupe de krynänns vicieux à souhait, quand bien même eux ne s'imaginaient sans doute pas autrement qu'en vainqueurs.

Quelques spectateurs vinrent la féliciter, et tenter d'engager la conversation, mais repartirent face à son silence distant.
De la troupe, elle ne recueilli pas le même accueil, essentiellement des regards mi-figue mi-raisin, hésitant entre le "mais pour qui elle se prend, cette conne ?" et le "ok, donc elle, on va éviter de lui mettre la main aux fesses".
Si elle espérait pouvoir aller se faire payer un coup à boire avec la troupe, c'était raté.
Pour ce qui était de prouver sa valeur et de s'assurer qu'on ne l'enquiquinerait pas, c'était réussi.

Ne restait plus qu'à attendre que la foule se disperse, et on pourrait passer aux choses sérieuses.



La perfection est amorale.
 
Dassen Dorn
Comitaire actif
Kil'sin  
Le Sukra 11 Julantir 815 à 15h27
 
« Rendez-vous ici demain, un peu avant minuit. »

Les vigilants laissent aux volontaires le temps de se reposer.

« Ne parlez de notre réunion à personne, nous devons surprendre ce Lanyshta ! »



Nous sommes le ''Sukra 11 Julantir''. La nuit vient de tomber et un certain nombre d'entre nous sommes venus avec un peu de vin et quelques gâteaux. À part les 200 personnes rassemblées, l'agora est vide. Cela nous permet de prendre nos aises ; en attendant tout le monde on prend l'apéro et on discute. Enfin, ''on'' ce n'est pas tout le monde puisque les vrais vigilants font bande à part. Ils regardent nos gourdes et nos gourdins avec dédain. Ces gens sont vraiment jeunes, peu ont plus de 22 ans. Ils ont tous une belle moustache parfaitement peignée et un costard de guerre, ou un robe de guerre avec un maquillage de guerre (en réalité tout à fait banal). Globalement ils ont tous l'air assez riche. Du moins, riche comment on peut l'être au Kil'sin. C'est à dire, du genre riche comment on peut l'être dans une famille de marchands ou de comitaires hyper-actifs. Tous bien éduqués, bien pensants et en bonne santé. Ils ressemblent à une saleté de bande de révolutionnaires aux idées progressistes radicales, ce qui nous les rends plutôt sympathiques. Et puis ils sont plutôt bien équipés. Ce sont les seuls à avoir quelques pistolets et à porter des rapières, même si en général ils portent comme tout le monde juste un gros bâton avec un peu plus de vernis que sur les nôtres.

Exactement lorsque minuit sonne, le commandant Bourglot sort de son trou. Lui et son équipe sont les seuls à porter une armure. Ils sont accompagnés d'une dizaine de vigilants un peu plus précieux que les autres. D'ailleurs l'un d'eux porte une énorme col blanc qui lui remonte au milieu du visage, et ses yeux sont cachés derrière un masque rouge en forme de... de ça :






« Bien. Monsieur Bourglot, veuillez attirer leur attention. »

« Heu, d'accord monsieur. Bon, herm... S'il vous plaît, un peu d'attention ! … Hey ! … SILENCE, les gens ! »

Quelques têtes se retournent vers lui, mais personne n'a vraiment envie de l'écouter. Alors le gars masqué étend les bras pour écarter Bourglot et les gens autour de lui, et il prend lui-même la parole.

« L'exposé du plan d'attaque des puritains va commencer ! »

Le mot passe et les bavardages diminuent enfin. On installe une carte du Kil'sin à côté du jeune homme, qui continue avec assurance.

« Merci à tous d'être venus.

Depuis des années la criminalité ronge notre quartier : pickpockets, escrocs, violeurs et meurtriers... et maintenant les Lanyshtas ! Évidemment, tout est lié. D'après nos études, les personnes aux mœurs agressives ou dépravées sont plus sujettes que les autres à être parasitées par un Lanyshta. C'est pourquoi les Dessous est le lieu le plus propice à leur reproduction, mais c'est aussi le lieu où ils reviennent se cacher après avoir sauvagement assassinés l'un des nôtres ! Pouvons-nous rester les bras croisés tandis qu'ils continuent leurs massacres et deviennent de plus en plus dangereux ? Si vous êtes là c'est que comme moi, vous avez déjà répondu à cette question. Et la réponse est non ! Nous devons les enfermer, et si la menace est trop grande, pour le bien commun nous devons les tuer ! Cette nuit chacun de vous va risquer sa vie pour que la paix perdure dans notre quartier. Quoi qu'il se passe, n'oubliez pas pourquoi vous êtes là.
 »

Il sort une baguette et utilise la carte pour illustrer ses propos.

« Notre descente dans les Dessous va se dérouler en plusieurs parties. Tout d'abord, nous allons former des groupes. Nous sommes un peu plus de deux cent, nous formerons donc dix groupes d'environ vingt personnes, plus l'équipe du commandant Bourglot. Ces groupes seront composés de dix vigilants pour dix volontaires. Aucun d'entre vous ne risque de se perdre dans ce dédales de ruines et d’égouts, car au moins un agent d'entretien sera présent par groupe. Ils connaissent parfaitement cette région du Kil et vous serviront de guide.

Lorsque la chasse commencera et que vous débusquerez une individu, rappelez-vous qu'il est la plupart du temps impossible de reconnaître un Krolanne d'un Lanyshta. Soyez sur vos gardes. Tout ceux que vous rencontrerez sont des suspects... et pire, le risque qu'ils soient infectés est bien plus important que dans n'importe quelle autre partie du Kil'sin. La seule manière de vérifier leur nature est de les mettre en danger. Vous devez leur faire peur, et les forcer à utiliser leurs capacités. Si vous êtes assez rapides, ils n'auront pas le temps de se transformer, mais vous en aurez vu assez pour pouvoir les arrêter et nous les remettre. Ne soyez pas timides ! Nous sommes face à des monstres ! La seule manière de les arrêter est d'utiliser soi-même la force ! Faites confiance aux vigilants de votre groupe, et aidez-les du mieux que vous le pouvez.

Plus en détail, voici la marche à suivre. D'ici une heure, nous nous rassemblerons tous ici, à l'entrée des Dessous.
 »

Il indique l'endroit de sa baguette.

« C'est là que le dixième groupe : l'arrière garde, établira son campement. S'il y a des blessés dans votre groupe, ramenez-le au campement. Des médecins les prendront en charge et des renforts vous seront attribués. Si vous faites face à une menace trop importante, retranchez-vous au campement de l'arrière-garde, et envoyez des messagers prévenir les autres. Si vous tuez ou capturez des Lanyshta, encore une fois c'est à l'arrière-garde que vous devrez les emmener.

Les neuf autres groupes suivront des itinéraires largement improvisés pour empêcher l'ennemi de deviner notre tactique. Globalement, vous devrez vous éparpiller dans toutes les directions. Ce dédale de caves et de galeries est un vrai labyrinthe. Marquez votre chemin et ne laissez rien vous échapper. Certaines zones des égouts sont inexplorées et dangereuses, même pour les Lanyshta. Fiez-vous à vos guides, et prenez garde à ne pas aller trop loin.

Dans tous les cas, n'ayez crainte ! La prestigieuse équipe du commandant Bourglot nous servira d'avant-garde. Bien qu'ils suivront un itinéraire spécifique basé sur leurs propres recherches, ils ne seront jamais loin. De plus, quelle que soit les rencontres que vous ferez vous serez toujours en large supériorité numérique. Le nombre fait la force. Travaillez en équipe et faites vous confiance les uns les autres. Ainsi, rien ne pourra nous empêcher de rendre justice !
 »

Les gens sont excités, c'est palpable. Pourtant le discours de cet inconnu en rebute certains. Pourquoi une telle violence ? Ces violeurs et ces assassins pourraient simplement être raisonnés. Mais d'autres connaissent la dureté des fous qui habitent les égouts. Et même si beaucoup ne semblent pas entraînés, les vigilants n'ont pas l'air tendres. Calmes, disciplinés. Quelle que soit leur expérience, cette nuit s'exprimera la violence de leur détermination.

« Avant d'y aller, des questions ? » demande Bourglot.


alias Djet Tamère
 
Jade Srhaggelle
Représentant,
la Vigilance

Kil'sin  
Le Sukra 11 Julantir 815 à 20h11
 
La journée s'était écoulée tranquillement, Jade en profitant pour faire quelques recherches sur le Comité de Vigilance des Puritains.
C'était un "ancien", par bien des côtés, un émergeant de la première scission, apparemment.
L'avantage étant que pour avoir duré plusieurs années, c'est qu'il n'avait pas commis d'impair phénoménal.
L'inconvénient étant que, ayant une indépendance longue durée, et aucun Coordinateur attitré, elle ne pourrait que très difficilement, en cas de besoin, faire valoir sa position, sans rencontrer un "et alors ?" vaguement amusé.
Accessoirement, ils avaient tendance à grossir, ce qui là encore avait l'avantage de permettre un renouvellement des idées théorique, et l'inconvénient d'avoir une grosse machinerie derrière.
Sans compter l'équipement. Du bon équipement et une bonne discipline, cela voulait dire des personnes qu'on entretenait à ne faire que ça, pas les copains du coin qui se réunissaient le soir pour une patrouille d'une heure avant de retourner boire la soupe chez bobonne.

Bref, il y avait un financement derrière. Et contrairement aux Comités d'Exploration - dont certains devaient effectivement entretenir une troupe armée d'importance et bien entrainée - qui pouvaient espérer avoir de grosses rentrées d'argent pour compenser, les Comités de Vigilance n'étaient pas spécialement rentables -pas sans commettre quelques arnaques, et à ce niveau là de population, il aurait sans doute sauté depuis longtemps.
Quelqu'un finançait donc ce petit groupe à fonds perdus.
Questions : Qui ? Pourquoi ?
Le "comment" étant au final anecdotique.

C'est ainsi que, après s'être approchée du groupe pour tirer au clair cette histoire de Lanyshsta, Jade retournait à la nuit tombée rejoindre ses "nouveaux collègues" afin d'en apprendre plus sur le Comité.

Hey, salut ma grande ! Alors ça va ? Bien remise ? T'as assuré le spectacle hier !

Oh. Un des "bleus" qui tentait de faire ami-ami. Il faut dire que dans le lot, il risquait d'y avoir de tout : le craintif qui essayait de trouver un costaud pour le protéger, la féministe qui voudrait la prendre en exemple, le dragueur invétéré, mais aussi le non-violent horrifié, celui qui la snoberait en espérant ainsi s'attirer l'attention des titulaires, le jaloux, le macho, et une floppée de ces caractères répartis selon toutes sortes de proportions.
Eurent-ils été vingt fois moins nombreux, que Jade aurait peut-être accepté de converser avec quelques uns, afin d'en accroitre une connaissance accrue. Là, vu le nombre, d'une part ils ne se formaliseraient pas longtemps de son silence, et d'autre part elle engrangerait plus de renseignements en regardant les mouvements d'ensemble.

Une bande de gamins -même les vieux, quelque part, étaient des gamins pour accepter avec un tel enthousiasme le principe de la réunion secrète en place publique (il n'y avait sans doute qu'au Kil'sin qu'on pouvait voir cela) - encadré par une autre troupe de gamins -des vrais cette fois- équipé assez étrangement.
Une arme ne devrait pas servir à proclamer qu'on est armé, elle devrait se concentrer sur son efficacité. Entre un gros bâton vernis et un pistolet doré, et le fusil qui repose dans l'étui de cuir informe jeté sur son épaule, les gens se retourneront toujours sur les premiers, l'affirmation vivante de sa propre dangerosité. Alors qu'avec son fusil si banal, dans son étui si passe-partout, un bon tireur pouvait éliminer trois de ces fiers à bras avant qu'ils ne réalise qu'on leur tire dessus.

Ce ne fut pas très intéressant, en fin de compte -vu la "discrétion" initiale, les Lanyshstas eurent-ils été effectivement une masse de monstres assoiffés de sang comme ils étaient décrits, on aurait pu avoir droit à une embuscade en pleine ville, mais on en était loin- du moins jusqu'à l'arrivée de Bourglot.
Ou plutôt, jusqu'à l'arrivée du marionnettiste de Bourglot.


Je te tiens.

Ce n'était pas tout à fait vrai, bien sûr. Aucune assurance que celui-là soit la tête pensante, et aucun nom à mettre sur l'absence de visage, mais c'était indéniablement un échelon supérieur.

Puis suivit l'exposé du plan d'attaque. Gueule le plus fort, mon gars, ils ne t'ont pas entendu au Kil'dara.
Et rapidement, l'identité passa à un plan secondaire.

Non...
Ils étaient sérieux ?

Ah pour sûr, ils allaient risquer leur vie, oui !
Des groupes dans les Dessous. Pas pour se planquer, pas pour s'infiltrer, pas pour explorer, non. Pour faire une descente dans les Dessous.
Et quelle descente... Du genre "on choppe tout ceux qui passent, on part du principe que ce sont des Lanyshstas, et on les pousse à la transformation. Comment faire ? Ben en les maltraitant, tiens !"

Statistiquement parlant, ils ne prendraient personne. Dans la mesure où les consignes données aux Lanyshstas étaient justement "poursuivez votre vie normalement, évitez les zones de stress et de danger", il était même possible qu'il n'y ait aucun Lanyshsta dans les Dessous.
Par contre, on allait y envoyer de jeunes excités, remontés à bloc, avec pour instruction de jouer des muscles sur les passants, qui risquaient en plus de se transformer en un clin d'oeil en monstres sanguinaires.
Ils allaient tomber sur des habitants des Dessous, adeptes du coup de surin, de la fuite éperdue à travers les dédales, et ayant chacun des relations au sein des Dessous, catégorie "peu recommandable".
Cela risquait fortement de déraper, et qu'une des recrues se retrouve avec un peu d'acier dans le ventre, et l'auteur du "délit de fuite" risquait de mal finir s'il -lui ou quelqu'un d'autre lui ressemblant- se faisait reprendre. Ce qui déclencherait des représailles en conséquence.

Pire, qu'un foutu alchimiste se soit procuré dans les Dessous quelques substances bizarres, et que, tout tremblotant, il laisse tomber une fiole un peu instable lors de son "interrogatoire", et il se ferait lyncher par les excités.

"Les Comités de Vigilance massacrent un innocent ! Les Dessous se défendent ! Au moins dix-sept morts !"
Ah oui, les journaux de demain matin risquaient de valoir le coup...

Merde. Merde ! MERDE !

Le risque que ça tourne au carnage était trop important pour être simplement négligé. Mais un simple "Whooo, les gars, on se calme, rentrez chez vous" n'allait pas suffire.
Bon, exposé des objectifs :
- Éviter que la réputation des Comités de Vigilance n'en pâtisse.
- Éviter qu'une telle affaire puisse se reproduire.
- Résoudre cette foutue affaire. Même si en l'occurrence même un Fuscusien lanyshsta en train de se reproduire en contaminant d'honnêtes citoyens -si cela était possible, au moins- risquait de faire moins de dégâts que ce qui se préparait.

Bon, elle avait les fins. Et les moyens ?
Aussi étranges que soient les croyances de ce Comité sur les Lanyshstas, elle ne pouvait se permettre d'entrer dans un débat technique, qui soulèverait obligatoirement la question des sources.
Par contre, il fallait jouer sur la tolérance Kil'sinite. Certains semblaient réticents, déjà.
Les autres, trop emballés... Leur laisser une seconde chance de réfléchir.
Les groupes mixtes, c'était logique, elle ne pouvait aller contre.
Les volontaires au sale boulot, c'était... Hum. C'était dangereux pour eux. Risque de débordements. D'un autre côté, s'il y avait débordement, il serait sans doute préférable qu'on puisse l'imputer à des volontaires indisciplinés plutôt qu'à un "vrai" membre de la vigilance. Tant pis pour les bleus, ils morfleraient, elle ne tenterait pas de les bouger.
Les agents d'entretien. Impossible de les éliminer. Ils restent.
Les groupes... Non, rien de cohérent pour entraver dix groupes.
L'arrière-garde. Oui, l'arrière-garde était éliminable. Si elle sautait, dès la première "prise", les groupes remonteraient, et constateraient qu'il y avait un problème. Ce qui pourrait leur éviter de repartir.
Les Puritains. Commencer dès maintenant une procédure non pas d'élimination, mais en tout cas de distanciation des Puritains et des Comités de Vigilance. Monter un dossier à charge, retenir les détails... Signaler l'info rapidement, aussi, qu'il soit officiel que, avant le début de l'opération, les "vrais" Comités de Vigilance étaient opposés à cela.
Puis Binoclard, aussi. Si quelque chose tournait mal, sur un plan politique, c'est Bourglot qui tomberait. Symbole de réussite et de déchéance. mais Binoclard pourrait participer à une recréation de ce genre.
Bourglot était un technicien du conflit, l'autre avait ses paroles chargées de haine. S'il n'était pas la tête, il en était au moins l'un des cœurs.

Et le pire, dans tout cela, c'est que c'était peut-être une simple manoeuvre destinée à détourner l'attention. "Parcours largement improvisé, sauf l'itinéraire spécifique de l'équipe d'élite". Cela pouvait être vu comme du "mettez du bordel, faîtes diversion, le groupe qui compte fera son office tranquillement durant ce temps". Façon casse du siècle. Ou assassinat noyé dans le sang d'innocents.
Si c'était le cas, bravo l'artiste. Mais utiliser les, pour ne pas dire "ses" Comités de Vigilance était une erreur qu'elle ne laisserait pas passer.
Sinon... C'était juste un fou qui venait de lancer un caillou le long d'une pente, et qui réalisait trop tard le sourd grondement qui s'ensuivait.

Bon, en tout cas, il fallait passer aux choses sérieuses.

Et après une question sur une éventuelle prime de risque de la part d'un volontaire, Jade s'avança.


Ici aussi. Questions.

Pas d'opposition frontale, donc. Mais réveiller la conscience populaire, pourrait-on dire.
Quoi qu'elle s'adresse visiblement au Commandant, comme une bonne petite recrue ayant appris qui était le chef, son attention est concentrée sur celui qui a exposé les faits.


Donc si je résume, pour protéger la paix, on doit déclencher la guerre, c'est ça ?
Car on entend plein de truc sur les Dessous, c'est vrai, et ça ne m'étonne pas que les Lanyshstas s'y réunissent..
.

Aider à relativiser, leur laisser faire le calcul eux-même, en comparant avec les millions d'habitants du Kil.

... et c'est sans doute pour ça qu'on a réussit à en attraper... Quoi ? Deux cents, depuis le début ? Mais je me demande...

Dont à peine dix pour cents devaient en être véritablement, mais hors de question de le dire.

... si sur les milliers - dizaines de milliers ?- de personnes dans les Dessous s'il y en a tant que ça. Je veux dire, on va surtout tomber sur des Kil'sinites standards, non ? Alors je suppose que les Puritains...

Pas "nous". Pas "les Comités de Vigilance". Toi, mec. Les volontaires ont encore un choix à faire.

... ne suivent pas l'adage populaire "mieux faut un assassin laissé libre qu'un innocent entravé", mais avec les Dessous, ça risque de tourner à la boucherie...

En fait, quasi tout le monde suivait les adages. Dans une société dépourvue de tout système législatif, les adages formait la base de la morale commune et de la sagesse populaire. Alors oui, chacun était libre d'aller à l'encontre. Mais le rappeler aux volontaires ne pourrait pas faire de mal. Maintenant, un peu de peur.

... vu qu'ils sont du genre solidaires, comme les fourmis, et que si on a le nombre au début, on sera submergé s'ils se réorganisent.

Trop long. C'est sensé être une question, pas un discours. Retourner sur une acceptation de façade et une question.

Bref, on a des trajets de replis express de prévus quand ça chauffera ?

Pas "si", "quand", histoire d'enfoncer le clou.

En faisant mine de s'intéresser à la carte, elle note précisément l'endroit prévu pour l'arrière-garde, les rues par lesquelles arriver, les centres les plus proches.
Puis elle relève la tête, les yeux fixés sur le masque. Paraître naturelle. Sourire n°3-B.


Ah ! Et au fait. Vous êtes qui ?

Pas qu'elle s'attende à une réponse honnête, mais que les autres s'interrogent aussi, au moins.
Qu'elle suive son équipe, qu'elle s'éclipse pour filer l'équipe de Bourglot, ou mieux, le Binoclard, elle n'en sait encore rien, ne pouvant prévoir au dela de sa prochaine et très proche pause pipi.

Mais ce qui est sûr, c'est qu'elle ne va pas descendre sagement mettre le feu à la ville.



La perfection est amorale.
 
Dassen Dorn
Comitaire actif
Kil'sin  
Le Dhiwara 12 Julantir 815 à 00h04
 
Les gens murmurent entre eux suite aux paroles de Jade. Ça monte lentement au cerveau, mais ils ont l'air de prendre conscience que le danger sera réel et qu'avant de partir à la chasse au Lanyshta les méthodes de ce bonhomme masqué mériteraient d'être discutées, et améliorées.

« Hey, elle a pas tort ! Moi j'ai... enfin j'ai un cousin éloigné qui a déjà caché des trucs dans les Dessous, mais c'était pas un criminel pour autant. Je veux dire... enfin il a souvent des soucis, mais c'est un brave gars. Je me dégonfle pas mais c'est que... je m'imagine pas trop le passer à tabac pour vérifier... »

« Ton cousin est un voleur et on devrait le protéger ? S'il veut pas avoir de problèmes qu'il fasse comme tout le monde, qu'il répare ses méfaits et qu'il devienne quelqu'un de meilleur ! On peut plus laisser ces gens là dégrader notre quartier sans que personne ne fasse justice ! »

La réponse est tranchante. Elle vient de l'un des vigilants.


Sans tenir compte de cet aparté, le jeune homme masqué s'explique calmement.


« Je suis Malthogan, le grand vigilant du Comité de vigilance des puritains du Kil'sin.

Laissez-moi d'abord vous rassurer. Nous n'allons pas nous attaquer aux milliers de pauvres bougres vivant dans des caves par manque de revenu décent. Ce sont justement pour ces gens là que nous nous battons. Si notre quartier n'était pas assailli d'escrocs et d'assassins, personne n'aurait à souffrir de ces conditions de vie. L'argent de tous serait suffisant, il serait équitablement redistribué et nous vivrions tous dans un climat saint ; un climat de confiance et d'entraide.

Notre cible cette nuit sont les égouts. C'est dans cette partie du Kil'sin que se cachent les parasites qui l'affaiblissent. Ce sont des individualistes, dénués de conscience collective. Ils ne sont unis que par la peur ou par l'appât du gain. Il n'y a donc aucun risque à ce qu'ils parviennent à s'organiser et à nous opposer une résistance sérieuse. Croyez moi dans cette partie des Dessous, personne n'est innocent. C'est un nid à Lanyshta, des Lanyshta consciemment protégés par ces indésirables. Nous devons donc briser leur réseau, les désorganiser. Oui, cela signifie donner un coup de pied dans la fourmilière... mais pour l'instant cette fourmilière est assez grosse pour que nous puissions nous occuper d'elle.

Nous prendrons tous des risques cette nuit. Mais que se passera t-il si nous restons passifs ? En quelques années leur réseau se renforcera, il s'étendra à d'autres parties de la ville, et progressivement, comité après comité, rue après rue, meurtre après meurtre, ils en prendront le contrôle. Le monstre Lanyshta a déjà commencé à frapper, sa dangerosité n'est plus à prouver. Nous devons les débusquer avant qu'il y ait d'autres morts, lui et ses semblables inadaptés ! Nous devons leur montrer que le peuple du Kil'sin ne se laissera par dévorer de l'intérieur !
 »

Applaudissements.


alias Djet Tamère
 
Jade Srhaggelle
Représentant,
la Vigilance

Kil'sin  
Le Dhiwara 12 Julantir 815 à 10h29
 
Ouf.
Ou plutôt, vu qu'il y avait eu gradation triple de référence fécale, ouf. Ouf ! OUF !

Et que l'aspect "jeune recrue volontaire" ne soit pas compatible avec la rétention de respiration, l'empêchant de ce fait de relâcher réellement la pression, ne changeait rien à l'affaire.

Ne jamais sous-estimer son adversaire.
C'était un principe de base, un impératif. Mais du coup, cela la poussait régulièrement à surestimer les capacités ou les volontés d'autrui.

- Tant mieux, j'ai failli me chier dessus !
- Mouais, elle s'enflamme un peu trop, cette connasse...


Elle n'allait pas se retourner pour cela, mais l'auteur du "conasse" vit sa voix consciencieusement enregistrée, afin de pouvoir l'identifier ultérieurement.

Bon, les égouts, hein ? Oui, c'était assez cohérent. Délirant, d'une certaine façon, mais cohérent.
Et si l'expédition risquait de faire des remous... Elle ne virerait pas pour autant au jeu de massacre.

Réorganisation des objectifs -à croire qu'on passait plus de temps à organiser et définir les objectifs qu'à chercher à les atteindre.
Faire sauter l'arrière-garde devenait peu rentable. D'une part les proies seraient moins nombreuses, d'autre part la poursuite de l'opération poserait moins de problèmes. Sans compter une pression des Dessous moins forte, au final, même si elle voulait continuer le plan, elle n'en aurait pas forcément les moyens.

Cela se tenait : une descente musclée dans un endroit mal famé, en misant sur l'incapacité des résidents à s'organiser sur une si courte durée.
Bon, le lendemain, une fois les plaies pansées, il y aurait sans doute du remue-ménage, et elle doutait qu'il en sorte grand chose de bon. Marquer l'opinion, et la séparation, ça s'était dans ses cordes. Un dossier complet attendrait de voir ce qui se passerait.

Quant à Malthogan, on pouvait, étonnamment, envisager qu'il s'agisse d'une véritable identité. On ne prenait pas un titre aussi pompeux que grand vigilant pour retomber dans l'anonymat. Elle aurait tout le temps de s'en occuper après.

Pas d'applaudissements de la part de Jade, mais un hochement de tête ravi.


Rassurée, en effet. Pour les groupes, vous avez une liste pré-établie ou on le fait à la bonne franquette ?
Et pas d'autre questions de ma part. Plus qu'un passage aux toilettes et je suis prête.


A cette heure, quelques bars étaient encore ouverts. Ce n'était pas tant des toilettes qu'il lui manquait, que cinq secondes avec un inconnu.


La perfection est amorale.
 
Dassen Dorn
Comitaire actif
Kil'sin  
Le Dhiwara 12 Julantir 815 à 11h33
 
« Nous allons faire nous-même les groupes. »

L'exposé est terminé. Malthogan a l'air satisfait de lui-même. Il s'écarte de la scène et le reste du comité prend le relais.

« Bien ! Heu... mademoiselle, c'est pas vraiment le moment pour la pause pipi... Bon, s'il y a des urgences de ce genre, dépêchez-vous. Je constitue les équipes dans cinq minutes. »

L'organisateur est embarrassé. C'est un jeune comitaire, le fusil dans le dos. Il tremble un peu en tenant le long rouleau sur lequel sont listés les inscrits. Deux minutes plus tard, il commence l'appel.

« Les vigilants, groupe un ! Mettez vous près de la sortie de l'agora. On va appeler les volontaires un par un. Si vous entendez votre nom, rejoignez le groupe de vigilants que je viens d'appeler. »

Quelques membres du comité se détachent de la masse et attendent les volontaires au point désigné.

« Dès qu'une équipe est complète, partez à notre point de rendez-vous et attendez les autres. On partira tous dans les égouts en même temps. »

Et la liste de noms défile. Les groupes se remplissent rapidement. Parfois quelqu'un ne répond pas à l'appel. Il s'est discrètement éclipsé de la réunion. Ou encore, le volontaire est un vieillard ou un peureux ne tenant pas très bien sur ses jambes. On le mute alors à l'arrière-garde, et un autre prend sa place. On remarque aussi les nombreux absents qui auraient pu faire porter le nombre de volontaires à deux dizaines de plus. Quoi qu'il en soit, les groupes se remplissent et Jade n'est toujours pas appelée.

« … Voilà pour le neuvième groupe. Vous pouvez y aller. ... Bon, il en reste combien ? Une bonne dizaine, avec les volontaires de dernière minute. Ça tient la route. Nous formerons l'arrière-garde, sous le commandement direct du Grand Vigilant. Allez, prenez le matériel médical et en route ! »

L'équipe du commandant Bourglot porte elle-même les quelques lits de fortunes qui pourraient servir à allonger les blessés. Il semble qu'ils partiront en même temps que tout le monde.


alias Djet Tamère
 
Jade Srhaggelle
Représentant,
la Vigilance

Kil'sin  
Le Dhiwara 12 Julantir 815 à 13h37
 
J'y cours.

L'idéal aurait sans doute été de s'absenter durant le trajet la menant jusqu'à l'entrée désignée, mais elle augmentait ainsi les risques d'avoir un collègue -ou plutôt une collègue, les mâles ayant généralement moins de scrupules à se vider la vessie contre un mur- qui en profiterait pour l'accompagner.

Les listes étaient prêtes, inutile de chercher à trop en savoir, elle ne pourrait de toutes façons pas les altérer sans se mettre dangereusement en avant. Il y avait des fois où il fallait savoir se contenter de ce qu'on avait. Et au moins elle pourrait insister un peu plus longuement.

Et pour le moment, ce qu'elle avait, c'était une bonne foulée, partant en droite ligne de l'agora vers les Estaminets, l'endroit où elle aurait le plus de chances de trouver ce qu'il lui fallait.

Là !
Pas un bar, mais un petit resto encore allumé, parfait. Jade poussa la porte.

Désolé, mais nous sommes fermés.

Excusez-moi, où sont les toilettes ? Ah, non, on s'en fiche, en fait. Jade se dirigea droit vers l'homme, sortant quelque chose de sa poche. Il dut un temps envisager un braquage, mais si les gestes étaient brusques, le ton était calme et les paroles aucunement agressives.


Heure supplémentaire. Allez au bureau des Répéteurs le plus proche, et réveillez quelqu'un.

Ce qui allait bloquer. C'est pourquoi elle ouvrit la main, dévoilant une poignée de graines.

Je paye cash. Un seul message à transmettre. Prêt ? "Suite aux événements de la nuit, la Vigilance enquête sur les Puritains." Compris ?
Hein ? Heu oui, mais...
Répétez.
"Suite aux événements de la nuit, les Vigilants sont en quête des..."
Non. La Vigilance enquête sur les Puritains. Répétez.
"Suite aux événements de la nuit, la Vigilance enquête sur les Puritains."
Encore.
"Suite aux événements de la nuit, la Vigilance enquête sur les Puritains." Mais pourquoi... ?
Pour les Répéteurs. Dès cette nuit. Si le message est disponible demain matin, je paye double. Sinon je reviens voir pourquoi ça n'a pas été. Bonne soirée.


Et sans s'arrêter au "mais au fait" entamé derrière elle, Jade est ressortie, reprenant sa course dans l'autre sens.
Il y avait peu de risques que cela interfère de quelque façon que ce soit avec la mission de la nuit -même si avec les Répéteurs, on était pas à l'abri d'un excité qui passerait une nuit blanche à essayer de déterminer qui étaient les Puritains, quels Comités de Vigilance étaient concernés, et surtout de quels événements on parlait- mais lorsque les informations sortiraient -et elles sortiraient, forcément- ce simple petit message pourrait faire valoir l'antériorité.
Pas parfait, loin s'en faut, mais sans savoir comment se déroulerait la nuit, elle ne pouvait pas faire plus précis, surtout sur le temps d'une pause pipi.
Au moins, le soupçon d'une divergence de point de vue atténuerait les retombées néfastes pour les Comités de Vigilance.

Sur le trajet, elle se cracha dans les mains, avant de les frotter entre elles : un reste d'humidité pour quelqu'un s'étant lavé rapidement les mains après une escale technique. Toujours le soucis des détails.

Elle arriva au milieu d'une liste de noms énoncés, qui s'avéra être la composition du 8ème groupe. 75% de chances d'avoir été appelée. Il faudrait voir l'organisateur.
Quoique...
Le "reste" était à l'arrière-garde ? A l'extérieur, avec le chef ? Là où on pouvait être discret et s'éclipser en cas de besoin ? C'était bien aussi, autant ne pas attirer l'attention, et rester près du centre de traitement des infos.

Trouver un petit quelque chose à porter. Rejoindre le groupe. Se laisser emmener.

Et observer la suite des événements.



La perfection est amorale.
 
Dassen Dorn
Comitaire actif
Kil'sin  
Le Dhiwara 12 Julantir 815 à 19h13
 
Quelque part entre la Place des heures vives et les Rigoles, la dixième équipe finit par rejoindre les autres. Au milieu de la nuit avec leurs lampes et leurs torches, cette procession de révoltés ne passe pas inaperçu. Quelques ivrognes veulent se joindre à la danse, et d'autres passants interrogent les vigilants. Mais ils sont tous écartés sans ménagement. L'opération vient de commencer, les gêneurs ne seront pas tolérés.

Des ordres sont donnés, et les amis s'encouragent. Les groupes se dispersent, chacun partant vers l'une des entrées des égouts de la ville. Au milieu d'eux l'équipe de Bourglot faire fière figure. D'un mot ils se mettent en formation et partent au trot vers les égouts du nord. On ne tarde pas à les perdre de vue.

Malthogan ordonne aux siens d'installer le campement : de grossières barricades et des tentes de soins. Tout le monde doit rester aux aguets. Si les autres arrivent à débusquer le monstre Lanyshta, il pourrait très bien tenter de fuir les égouts. La dixième équipe sera alors le dernier rempart capable de l'arrêter.

Mais malgré ces discours plus ou moins enflammés, les braves gens du Kil'sin ne tardent pas à sortir les cartes et à ouvrir en douce les bouteilles.



alias Djet Tamère
 
Jade Srhaggelle
Représentant,
la Vigilance

Kil'sin  
Le Luang 13 Julantir 815 à 12h03
 
Bien. D'ici, elle pourrait assister aux événements, à défaut de les créer. Par définition, l'arrière-garde était là où tout le reste convergerait, ce qui assurait une certaine perte d'informations, un certain délai, mais aussi une vision globale.

Il fallait aussi, cependant, miser sur les développements possibles. Une attaque, oui, mais ce que Jade craignait peut-être plus, c'était des fouineurs qui, on était jamais à l'abri des coïncidences malheureuses, pourrait la reconnaitre et l'associer aux Puritains.

Engager la conversation avec Malthogan était tentant, mais... Mais cela contribuerait trop à la démarquer du lot, une fois encore. Mieux valait rentrer dans le rang, et ne revenir qu'en cas de développement.

Mais lorsqu'on ouvrit les bouteille et qu'on sortit les cartes, Jade déploya ses propres outils.
Elle ouvrit son étui et en sortit son fusil, un lourd modèle Kil'darien, sans ornements, sans fioritures. Sans faille. Capable de toucher une pièce à plus de 100m dans les bonnes conditions. Et avec les améliorations que Jade y avait lentement infusé, la pièce avait de plus intérêt à être rudement épaisse pour ne pas être totalement annihilée.
Le tout dans un bruit à peine plus puissant qu'un bon éternuement.


Je vais prendre une position en hauteur. Toujours utile.

Dans l'esprit des présents, c'était sans doute "toujours utile pour guetter, voir de loin, avoir une vue dégagée et couvrir vos arrières".
Dans le cas présent, c'était surtout utile pour ne pas avoir à faire semblant de s'intéresser aux discussions, tout en étant invisible depuis la rue, et en pouvant s'éclipser discrètement par les toits si nécessaire.

Elle prit position directement à l'aplomb des barricades.
Sur un plan efficacité opérationnelle, la position était, au mieux, médiocre. Elle n'avait accès à la vision qu'à deux voies sur trois, l'une d'elle étant en plus partiellement masquée par un bâtiment plus haut. Sans compter que, en passant par les ruelles, un éventuel assaut arriverait sur les barricades avant qu'elle n'ait pu finir un chargeur, l'obligeant ensuite à se pencher par dessus le rebord pour tirer à la verticale, dans la mêlée.
Mais la plupart des gens auraient été surpris de constater à quel point les sons montaient bien, et de là où elle était, seuls les plus ténus des murmures lui échappaient.
Pour protéger le campement, elle était mal placée. Pour le surveiller tout en se protégeant elle -le bâtiment gênant pour la vue avait une échelle de service, lui permettant de partir très vite en cas de besoin- c'était parfait.

Ne restait plus qu'à prendre son mal en patience en attendant que l'un des groupes -ou autre chose- revienne...



La perfection est amorale.
 
Dassen Dorn
Comitaire actif
Kil'sin  
Le Luang 13 Julantir 815 à 21h28
 
Minuit est passé et la nuit est douce.

Cela fera une heure qu'ils se sont dispersés dans les Dessous. Depuis, ni signe, ni son, ni nouvelle. Certains commencent à s'inquiéter ; d'autres, à s'endormir.


« Eh bien Jade, vous ne vous ennuyez pas, accrochée à votre fusil comme ça ? Vous devriez vous détendre, je ne veux pas que vos nerfs vous lâchent avant que le monstre apparaisse. »

La voix est douce et mielleuse. C'est la voix de Malthogan.




alias Djet Tamère
 
Jade Srhaggelle
Représentant,
la Vigilance

Kil'sin  
Le Matal 14 Julantir 815 à 09h49
 
Pas de réaction, la question est sans fondement, du sous-type de la question rhétorique.
Quoique...
Ah, non, il s'agit peut-être d'une tentative d'entamer la conversation. Ou de l'affirmation d'un poste de chef par le tour des recrues. Dans les deux cas, une absence totale de réponse est à proscrire.
Pénible, cette absence de danger, d'enjeu. Lorsqu'il faut prendre une décision rapide à des fins de survie, la démarche est facile : plus les possibilités sont restreintes, plus son sens de l'analyse, spécialement entrainé à ces situations, trouve aisément la solution optimale.
Mais les discussions à bâton rompues, les relations superficielles, sont autant de problèmes ouverts ne disposant pas d'une solution unique. Déstabilisant.

Avec quelques instants de retard sur les réactions d'une personne plus habituée aux interactions sociales, Jade répond.


Vous sous-estimez la détente que peut procurer le fait de tenir une arme capable de percer le cuir d'un Knorg adulte. Mes nerfs ne lâcheront pas.


La perfection est amorale.

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