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Dispute de ta race
 
Dassen Dorn
Comitaire actif
Kil'sin  
Le Vayang 24 Jayar 816 à 16h58
 
Comité de Dispute. Arène numéro 3 des Disputaires. Il est tard, le public est silencieux. L'atmosphère est électrique.


B : Valet de l'arrogance.

E : 6 de la désillusion.

Une vague de murmures parcourt les bancs de l'arène. La carte tirée par chacun des duellistes ne fait que compliquer une situation déjà tortueuse. Ils se penchent simultanément sur leur pupitre et trient leurs cartes, intenses et concentrés sur l'argumentaire qu'ils pourront opposer à leur adversaire. Le public sait que les combinaisons seront mauvaises. Ils vont devoir jouer le tout pour le tout, prendre des risques et pousser leur adversaire à réclamer la danse.

Les derniers grains du sablier s'écoulent. Le Vieux Démon frappe deux coups sur sa table d'arbitre. Fin de l'intermède.


« Berreglionnard a l'initiative. Valet de l'arrogance. Carte du défi et montre salace. 3 points de patience, un virgule cinq point de moral et encore 4 de volonté. »

Le grand homme au masque bleu agrippe de ses deux fois six doigts les bords du pupitre. Il fait face à son rival et sa voix fluette prend soudain un ton condescendant.

Berreg : Donc qu'est-ce que vous voulez, à la longue ? Nous affamer ? Mon cher monsieur, demandez-vous pourquoi même au Kil'dara on n'utilise pas de méthode aussi irresponsable. C'est un choix de lâche, un non-acte, un demi-refus. Vous ne cherchez ni à nous éliminer ni à nous intégrer, mais seulement à nous discriminer. Vous créez des tensions sociales qui n'ont pas lieu d'être. Vous faites de nous les boucs émissaires de problèmes structurels auxquels vous êtes incapables de faire face.

Exort : Erreur ! Erreur ! Je ne vendrais pas mes pommes à des voleurs et des assassins ! Tout le monde parle de vous, des Répéteurs au dernier des poivrots ! On raconte que vous tuez les gens la nuit dans le noir. Un survivant de la Noyade vous aurait vu défendre les Dessous de la vindicte populaire. On dit que vous ne respectez ni nos lois ni nos coutumes. Erreur ! Quelle erreur ce serait de vous vendre mes pommes !

Berreg : ''On raconte'', ''on dit que...'' Vous faites de rumeurs des vérités, comme un enfant qui veut croire aux histoires qui lui font peur. À qui est-ce que je parle ? À un marmot apeuré ? Ou à un adulte ; un comitaire engagé, un verbeux du Kil qui agite, un tribun qui débat, un mordeur de question qui pose celles qui fâchent jusqu'à nous croquer le Passage ?

Exort : Quel ton condescendant ! Quel manque de respect. Il y a trop de rumeurs pour qu'il n'y ait pas d'inquiets. Tout le monde dans mon comité pense la même chose ! Vous ne savez pas vous-même ce que vous êtes. Un mauvais client, ça c'est sûr ! Mais aussi, bien pire. Une connaissance de mes amis a vu l'un d'entre vous se transformer. Ça peut vous arriver d'un moment à l'autre, là, devant mon étal. Un fourmillement dans le bras. L'eau qui vous monte à la bouche. La peau qui gratte puis les yeux qui révulsent. Ha ! Au milieu des gens, sans que vous ne compreniez quoi que ce soit à ce qui vous arrive : un monstre ! Horreur ! Vous ne savez rien de vous-même. Ni but. Ni contrôle. Alors vos arguments, c'est pire que des rumeurs : des promesses hypocrites, des non-dits et des excuses !

Berreg : Mais, que.. ! Des histoires à dormir debout ! Le témoignage est lointain. Vous me jugez à partir d'autrui. Comment savoir si ce jour-là votre ami n'a pas fumé les mauvaises herbes ? Moi je n'ai rien à cacher. Je suis différent, et j'en ai souffert. Mais je n'ai jamais créé de...

Exort : CARTE INTERRUPTION ! Vous n'avez jamais rien créé tout court ! Cela fait plusieurs années que vous existez ! Et vous n'avez servi à rien. Ha ! Que des problèmes ! Des problèmes de problème de Lanyshta ! Regardez-moi ces mains étranges. Qu'est-ce que vous pourriez espérer faire avec ça ? Rien n'est adapté à vous ici. Des mains maladroites qui tiennent mal l'outil, et bonjour les gants. Trop grandes vos mains, elles se coincent dans les portes !

Berreg : Mais, c'est faux. Je suis capable de faire des choses que d'autres ne pourraient pas. Ces doigts sont aussi un don. DEMONSTRATION !


Le duel est en suspens. Berreg quitte son pupitre et s'avance au milieu de l'arène. Il s'échauffe les poignets, se tourne vers le public et sort de sa veste un long fil à la boucle close qu'il tend entre ses deux mains. Puis le spectacle commence. Pendant deux minutes l'artiste fait danser ses douze doigts à un rythme effrayant. Le fil s'enroule, se noue, les fils s'entremêlent et forment des arabesques sophistiquées et éphémères. Un tableau mouvant se forme sous nos yeux, un visage s'ouvre, se ferme, nous sourit, se transforme en cheval au galop et le tonnerre déchire l'image. Berreg frappe dans ses mains, écarte ses doigts, resserre, coud, recoud et frappe encore. Les fils tintent doucement comme les cordes d'un instrument étouffé au rythme de son souffle et de ses aspirations. Le spectacle est hypnotique. Personne ne le quitte des yeux. Un nuage se forme, une condensation, une boule complexe mais toujours étrangement harmonieuse et contrôlée. Le souffle se fait rauque. Les mains miment la résistance. Les doigts rouges commencent à souffrir. Soudain un faux geste volontaire. Trois doigts craquent l'un après l'autre. Et brutalement il écarte les bras, les fils cassent. Les fils s'envolent. Ils retombent doucement sur le sol autour de lui.


Et les gens applaudissent.


L'artiste s'incline.



alias Djet Tamère
 
Dassen Dorn
Comitaire actif
Kil'sin  
Le Vayang 24 Jayar 816 à 17h04
 
« Conformément aux règles modifiées de l'avant-veille depuis hier. Les Lanyshtas des bancs votent la réaction du public de la scène. Comment les Krolannes près de l'étal d'Exort réagissent à la démonstration ? Si vous souhaitez une réaction négative, levez la main. »

Quelques-uns se mettent à ricaner. Ils se regardent entre eux avec complicité, avec un rire dans les yeux, un petit rire cruel et innocent. Tous sans exception lèvent leur main.

« Holà, Berreglinou ! » Une petite femme ronde au masque de bébé agite sa main en criant. « Moi je lève la main mais je suis sûr que tu vas gagner. Courage, tu es le meilleur ! »

Un autre renchérit : « Ouais, t'es le meilleur Berreg ! »

Berreg reprend sa place. Le Vieux Démon conclu.

« Les passants s'arrêtent pour regarder avec fascination le spectacle du Lanyshta. La dextérité de l'artiste aux six doigts est spectaculaire. Mais elle l'est à un tel point qu'au bout de quelques instants elle commence à leur paraître inhumaine. Les enfants se mettent à pleurer. Angoissés comme devant la vue d'une image dérangeante que leur esprit ne parviendrait pas à comprendre. Leurs mères leur cachent les yeux. Et quand les fils craquent. Instinctivement. Tous hurlent de frayeur.

Les passants gardent maintenant leur distance avec Berreglionnard. Ils le regardent avec rancune pour les avoir ainsi effrayés. Affliction attribuée : LE REVERS DU SUBLIME.
 »

« Oooh… ! » Ils gloussent, faussement choqués par cette situation dans laquelle beaucoup se reconnaissent.

« Exort-le-misérable a l'initiative. 6 points de patience. 3 de moral et 12 de volonté. Main d'action vide. Pour rappel : Carte majeure du suiveur intolérant. »

Exort : D'accoooord ! Terrrifiannnnt ! Terrreuuuur ! Mais ça sert à quoi votre truc, là ?! N'êtes vous pas fou d'en faire autant pour des pommes ? Les Lanyshtas et leurs prétendus dons, c'est toujours pareil. Terreur ! On n'en voit jamais les bénéfices. On ne voit que votre sorcellerie nuisible et vos problèmes. Vous n'avez rien à Passer. Terreur ! Vous n'avez rien à Passer ! Vous n'avez rien à faire ici au Kil'sin.

« Seuil critique atteint. Berreglionnard à 0 de patience. Main d'action vide. Le joker est joué. Dernière chance avant la Danse. »

Berreg : Espèce de salop !

E: Quand on veut des pommes à la mort. Il y a ce qu'on dit, et il y a ce qu'on pense. Tu sais ce qui agite ta langue, toi ? Pas tes muscles, non non non. Mais une étrange maladie.

B: Espèce de salop ! Je suis né ici. J'y ai grandi. C'est mon Kil autant que la vôtre. J'ai des droits ! Je ne partirai pas d'ici ! Je ne me cacherai pas. Je suis un mutant autant qu'un Krolanne. Vous m'accepterez, de gré ou de force !

Exort : Erreur ! Pauvre Monsieur. Ici vous faites peur, terreur et erreur ! Je vous le dis pour votre bien. Ce n'est pas votre place. Emmenez votre sorcellerie ailleurs, car ici vous ne serez jamais heureux.

Berreg : Ahhh ! Marchand de putains ! Vends-moi tes pommes et que ça s'arrête !

L'homme aux six doigts saute par-dessus son pupitre. Il écarte les bras, puis serre les poings dans une posture qui imite la rage. En face de lui Exort claudique sur sa jambe de bois jusqu'au centre de l'arène. Conformément aux règles, il brandit dans sa main le bâton dont il a l'avantage. Les deux rivaux se jettent l'un sur l'autre. Berreg évite le premier coup et parvient rapidement à désarmer son adversaire. Mais Exort le plaque au sol, son terrain de prédilection. La scène devient confuse. Étranglements, clés de bras, morsures et doigts dans l'oeil. Sous les acclamations du public les combattants s'étripent dans un nuage de poussière. Malgré le poids de l'estropié, Berreg a un léger avantage. Mais Exort est aussi un sournois. Il sait que Berreg n'a pas le droit de réutiliser son bâton. Il dévie une claque, plante un doigt dans un nez, arrache une touche de cheveux, puis d'un bond il roule et se jette sur son arme. Cette fois Berreg n'est pas en position pour l'esquiver. Exort lâche les coups. Il frappe les mains de Berreg. Il lui brise les doigts, puis il lui saute à la gorge, le coince contre le sol et lui enfonce le bâton sur la trachée.

En quelques secondes le masque bleu cesse de se défendre.

Il agite les bras : c'est le geste de l'abandon.



alias Djet Tamère
 
Dassen Dorn
Comitaire actif
Kil'sin  
Le Vayang 24 Jayar 816 à 17h22
 
Trois coups résonnent sur une table. Le Vieux Démon clôt le combat.

« Fin de la Dispute de ce soir. Vainqueur : Exort-le-Misérable. »

Exort : YOUUUUUUUHOUUUU...... !

L'estropié danse et sautille sur sa jambe de bois. Les commentaires fusent. Chaque masqué quitte son banc pour venir le féliciter. Dans l'excitation générale, malgré les rires et les accolades, les ''Lanyshtas'' forment sagement un cercle autour de Berreg. Personne ne le soutient, Exort est encore au centre de l'attention. Pourtant ils regardent le perdant et attendent ce petit rituel dont ils ont pris l'habitude. Le tour de magie. La vraie sorcellerie du Vieux Démon. Dassen s'accroupit près du mutant en souffrance. Il lui prend les mains dans les siennes. Les gens discutent en les regardant ; habitués, mais toujours émerveillés devant le phénomène. Soudain une énergie déforme l'air. Une lueur nimbe ses mains. Et les doigts brisés se réparent sous leurs yeux.

Le sorcier interrompt son sort.

« Comme d'habitude : endure. Ton corps doit s'endurcir. Je ne répare que l'irréparable. »

Quelques rires ; un ''c'est joli''. Maintenant que le rituel est passé, le cercle se disperse dans la bonne humeur.



Berreg se remet péniblement sur ses pieds. La femme qui l'a encouragé plus tôt le prend par le coude et l'aide à se relever.

Extralucida : Berreg, ce soir tu as assuré. Le valet de l'arrogance est vraiment difficile à jouer. Tu t'es laissé déborder à la fin, mais les 30 premières minutes étaient excellentes. Il a failli perdre pied dans les excès.

Berreg tourne vers elle ses yeux aimables et son sourire timide. Sa voix est soudain beaucoup plus douce : C'est vrai ?

Extralucida : Oui. En un an, quels progrès ! Et ta Démonstration ! Holàlà, tu en as vraiment trop fait, mais ce spectacle était très poétique.

Berreg : C'est gentil Extra, mais finalement, j'ai encore perdu.

Extra : Dis, Berreg, tu me fais confiance, hein ?

Berreg : Bah, oui. En général.

Extra : En général ?! Hi hi hi ! Sérieusement Berreglinou, c'est écrit dans les lignes de tes mains. C'est qu'une question de temps avant que tes dons prennent de l'ampleur ! …. Allez ! Maintenant laisse-moi sauter sur ton dos ! Il faut aller chercher les copains !

Pris par surprise, Berreg manque de s'écrouler. Il trottine jusqu'aux marches et rattrape en chancelant les premiers Lanyshtas descendus en bas. Le Vieux Démon est déjà en train de les raccompagner :

« Vous êtes nombreux ce soir. On va devoir faire 5 groupes pour 3 artères différentes. N'oubliez pas les règles. Et les anciens, mémorisez le chemin. La prochaine fois l'un d'entre vous fera l'une des escortes. »

Extra : Attendez, attendez ! Les vétérans avec moi ! On a reçu la réponse du Président !

Elle saute à terre. L'un des Lanyshtas s'avance. Son masque est un drôle de casque métallique recouvert de barbe. Le personnage est assez effrayant.

Nyan : C'est les négociations de la semaine dernière ? Le contre-don de la rénovation des tunnels ?

Il désigne la trappe par laquelle les autres comitaires s'apprêtent à sortir du bâtiment : un vieux passage souterrain qui serait encore écroulé sans le soutien logistique du Président.

Extra : Oui oui oui, il nous a donné une mission !

Nyan : Oh ! Alors ta divination s'est réalisée !

Extra : Ha ha. Une fois de plus.

Clin d'oeil.

Deux autres marginaux quittent les rangs pour rejoindre Nyan, Berreg et Extralucida. De son côté, sans un mot, Dassen ouvre le trappe et s'engouffre dans le noir, suivi d'un premier groupe de comitaires masqués.
En tant que Portier, Le Vieux Démon ne s'occupe pas directement de ce genre d'affaires.



Berreg : On devrait s'installer dans la cuisine pour faire le point. J'imagine que le Président nous a laissé des instructions précises. Mais avant, où est Kaboum ? On ne peut pas commencer la réunion sans lui.

Ils se regardent, regardent autour, insatisfaits.

Alors le jeune homme siffle.

Quelque part dans la maison un bruit sourd lui répond. Bruit de course affolée. Ça saute les marches, ça court à toute allure. Une énorme masse de poil bouscule une lourde porte et le monstre brun qui apparaît se jette à leurs pieds. La langue pendante, le chien Kaboum les dévisage de ses petits yeux noirs. Il devine que ses amis seront de sortie cette nuit.

Ça a l'air de lui plaire.



alias Djet Tamère
 
Dassen Dorn
Comitaire actif
Kil'sin  
Le Merakih 29 Jayar 816 à 17h27
 
Extralucida réajuste son masque de bébé puis caresse la tête du chien assit à sa droite, sur le banc.

« C'est bien que tu sois là Kaboum.

Maintenant c'est parti ! Résumé de la situation !
 »

Elle parle vite et avec enthousiasme, comme si elle racontait une histoire palpitante.

« Vous vous rappelez tous du boulot du Président ? Oui, c'est le cul-de-jatte terré dans son bureau des Dessous qui a une tête énorme ! Notre première mission diplomatique ! On est allé le voir parce que ce petit malin, il sait comment faire couler la monnaie. Il fait plein de choses. C'est un prêteur qui demande des intérêts énormes en cas de retard de paiement, mais il fait aussi dans le trafic d'information, il joue les assureurs de transactions illégales, et les intermédiaires entre les partis pointilleux. C'est surtout un monsieur qui a réussi à se créer un réseau de contacts plutôt carrément fiables, et dont une bonne partie ont des dettes à lui rembourser sous forme de service à rendre. En plus de tout ça, le Président a une qualité indéniable : c'est un ami des Lanyshtas !

Il nous a fait des prix en or, et a promis de garder le secret. Les accords à long terme ont été signés, et il continuera de nous soutenir, mais à condition qu'on lui prête main forte de temps en temps. Entre amis on s'entraide ! S'il coule, on perd des contacts, on perd des infos sur les potentiels Lanyshtas, sur nos ennemis, et on va avoir un mal de chien à faire tenir cet endroit debout.
 »

« Ouaf ! »

« Oh, pardon Kaboum, ça m'a échappée. »

Elle lui frotte à nouveau la tête.

« Bref ! On vient de recevoir une copie des accords définitifs, et avec eux, une nouvelle mission ! Je dois vous dire honnêtement que j'avais des doutes quand j'ai vue pour la première fois la tête du Président et de son costume. On aurait dit une parodie de gentleman de là-haut, ha ha ! Mais quand il nous a dit que nos ennemis étaient les mêmes, apparemment c'était pas du bluff.

Il veut qu'on aille voir un type pour le forcer à rembourser sa dette. Ce type, c'est pas n'importe qui ! C'est le poète et metteur en scène Tarok De Lafoir ! Ce fumier a écrit une pièce anti-Lanyshta ! Vous saviez ça ? Quelqu'un l'a lue ?
 »

- Non.
- Pas moi.
- Connais pas.


Les autres secouent la tête, l'air indigné.

« Moi non plus, mais on ne peut pas laisser ça impuni ! Il nous fait passer pour des attardés hideux et avides de pouvoir. Qui on serait si on se laissait marcher dessus par ce genre de salop ? Vous trouvez ça normal, vous ?! »

- Non ! On peut pas rester sans réagir. On me crache dessus depuis que je suis tout petit, alors maintenant j'en ai vraiment vraiment marre !
- Je ne supporte plus ça... Ces gens n'ont aucun respect, et ça ne fera qu'empirer si on fait la sourde oreille...
- Ouais ! Ça peut plus durer ! Il faut qu'on fasse quelque chose !
- On est prêts pour ça ! On va lui donner une leçon ! Où est-ce qu'il habite, Extra ?


Sa poitrine se gonfle, un sourire rayonnant grandit sous son masque. Elle frappe du poing sur la table.

« Oui ! Il va lui apprendre à nous respecter, ce fils de Scylla. Vous avez raison, on est prêts pour ça ! Tarok habite au 13 rue des Anges, dans les Douces Chaumières. Troisième étage, mais je ne sais pas encore quelle porte. On entre chez lui, on récupère les 400 pierres et on lui montre qu'à partir de maintenant il vaut mieux pas casser les couilles aux Lanyshtas ! »

-Ouais !
-Ouais !
-Ouais !
- Ouaf !
-Ouais !


« C'est nous les meilleurs ! »

-Ouais !
-Ouais !
-Ouais !
- Ouaf !
-Ouais !


« On mérite d'être respectés ! »

-Ouais !
-Ouais !
-Ouais !
- Ouaf !
-Ouais !


« On va se faire connaître, et plus personne osera nous cracher dessus ! »

-Ouais !
-Ouais !
-Ouais !
- Ouaf !
-Ouais !


« Je vais chercher les herbes pour quinze minutes de transcendance préparatoire, puis en route pour les Chaumières ! »

-Ouais !
-Ouais !
-Ouais !
- Ouaf !
-Ouais !




alias Djet Tamère
 
Dassen Dorn
Comitaire actif
Kil'sin  
Le Julung 30 Jayar 816 à 18h07
 
Ses pupilles sont dilatées, ses gestes sont bizarrement vifs, hypersensibles. Extralucida est penchée sur un tas de cailloux et de lignes tracées dans la terre. Les cailloux forment des chiffres, de 0 à 9, répartis au hasard sur une grille hâtivement creusée dans le jardin de l'immeuble 13 rue des Anges. Au-dessus de la grille, elle maintient du bout des doigts une petite chaîne à laquelle est attachée un pierre précieuse. La chaîne balance, imperceptiblement. La pierre passe au-dessus des chiffres. La main cherche, attentive, puis enfin, elle s'arrête. Extralucida soupire. Elle connaît enfin le troisième numéro.

« Un.

Numéro trois-cent un.

Hi hi, allons-y !
 »

Les cinq Lanyshtas et leur chien se glissent vers la porte d'entrée. À cette heure, les lampadaires sont éteints. Seule la lune les éclaire.

En trois coups de poignet Berreg fait tomber la serrure. Il range ses crochets, ouvre la porte. Les cinq masques silencieux s'engouffrent dans l'immeuble et montent les marches deux par deux jusqu'au troisième étage.



Nyan : Trois-cent un, c'est ici !

Le murmure les rallie. Berreg vérifie le numéro de la porte en l'effleurant du bout des doigts avant d'inspecter la serrure.

Berreg : Elle a l'air compliquée. Je risque de mettre beaucoup de temps avant de… de trouver les clefs.

Nyan : Les clefs ?

Berreg : Oui, enfin… Ouvrir la porte.

Extralucida : Pourquoi tu dis pas crocheter ?

Berreg : Chuuut... ! Peut-être que tous les voisins ne dorment pas. On pourrait donner l'alerte en utilisant des mots suspects.

Nyan : D'accord, d'accord... Il te faut combien de temps ? Si on reste ici trop longtemps on risque de se faire repérer.

Le masque bleu lève un par un ses douze doigts devant son visage.

Berreg : Environ 13 ou 22 minutes.

Nyan : Trop long. On démonte la porte. Molus, une bougie ! Je vais aider Berreg.

Un adolescent maigre et tordu, peut-être une fille, approche une bougie vierge et frotte son briquet d'une main tremblante.

Berreg : Les autres, s'il vous plaît, vous devriez monter la garde ! Il faut surveiller l'escalier, et puis les lueurs sous les portes, et aussi bien tendre l'oreille pour ne pas se faire surprendre.

La bougie s'enflamme. Fragile et peu lumineuse.

Molus se gratte nerveusement le téton : Ss... si quelqu'un. Viens. Je fais quoi moi ?

Nyan : On l'assomme.

Soudain Extralucida sautille et entoure de ses bras le maigre Molus : Puis on le balance par la fenêtre, HI HI HI !

Elle saute sur la pointe des pieds et mime la chute tournoyante du corps dans les airs.

Nyan : Restes concentrée Extra. Silence et coordination, les deux clés pour toute effraction réussie. Au boulot !

Les Lanyshtas prennent position et Berreg sort délicatement ses outils. Il manque d'éternuer lorsque le masque barbu de Nyan frôle son visage.

Nyan : Encore heureux qu'elle tienne debout. Je serais raide mort avec tout ce qu'elle a pris...

Berreg lui répond avec soudain de grands yeux angoissés : Tu crois qu'elle a quand même trouvée la bonne porte ?

Nyan pose une main sur son épaule. Il prend une grande inspiration : D'après ce qu'elle dit, plus elle se shoote et plus elle est précise... On croise les doigts.


alias Djet Tamère
 
Dassen Dorn
Comitaire actif
Kil'sin  
Le Merakih 6 Julantir 816 à 14h45
 
En quelques minutes les gonds ont sautés. La porte penche, maintenue debout par sa serrure. Malgré le bruit régulier des outils, aucune signe de vie à l'étage. Un dernier coup de pied de biche. Sec. Bruyant.
La porte se détache.

Un courant d'air agressif siffle entre leurs pieds. Une odeur étrange leur dérange l'odorat. L'appartement est opaque, obscur. Un premier coup d'oeil les fait frémir.

D'instinct Berreg se raidit, écarte les autres. Accroupit, il prend appui sur le mur et rassemble son courage.

Puis il étire lentement son cou dans les ténèbres.

Les Lanyshtas retiennent leur souffle. Ils fixent le dos immobile de Berreg parfois éclairé par la bougie qui crépite, déjà mourante, comme s'il risquait de disparaître à chaque fois que la lumière s'éteint.

Quelques araignées s'enfuient et se faufilent le long des murs. Les secondes passent. La flamme vacille à nouveau, et cette fois lorsqu'elle revient Berreg est adossé en silence contre le mur du couloir. Il est exténué. Ses bras tremblent. Effrayé, il se tourne vers ses camarades.


Berreg : Aucune lumière... Aucune. Des formes étranges au fond. Ça bouge... Comme des ombres plus épaisses que l'obscurité naturelle.

Ils frissonnent. Se rapprochent instinctivement les uns des autres.

Berreg : Je ne sais pas... si c'est réel. Quelque chose n'est pas normal. Je le sens dans mes bras, dans mon torse, dans les muscles de mon visage...

Nyan, lugubre : Les herbes du comité aiguisent nos sens et notre instinct. Elles nous révèlent l'invisible et préparent nos corps au surnaturel.

Extralucida déglutit, soudain beaucoup plus calme : Ce n'est pas ce que j'ai prévue. Aucun signe sur le monde invisible. Aucun démon. Aucun signe. On ne me dupe pas. Jamais. Jamais jamais.

Ils se regardent en silence, focalisés sur les ténèbres du pas de la porte 301.

La bougie qui les éclaire à peine vacille encore. Elle crépite. Elle meurt. Enfin, elle s'éteint.

Et les cœurs s'accélèrent.

Extra sort son pistolet. Nyan son canif. Touty sa marmite. Et Molus lui, n'a que ses poings.


Alors Berreg murmure nerveusement du bout des lèvres : Envoyons vite un éclaireur. Kaboum ! Ici ! Psssst !



Kaboum ne vient pas.



Berreg : Kaboum !

Ils n'osent pas détourner leurs regards de l'entrée de l'appartement. La panique commence à monter chez les plus jeunes.

« Ils l'ont eu... » lâche Molus. Mais Berreg sort de sa poche un petit paquet de croquettes. Une goutte de sueur tombe du bas de son masque bleu. Fébrile, il secoue une fois le sachet.

Rien.

Silence.

Leurs mains crispées sur leurs armes. Berreg expire. Inspire par à coups. Et secoue à nouveau le sachet.


Tous sursautent.
Le bruit de course d'un lourd animal résonne sur le plancher. Un monstre de poil noirs saute sur Berreg, haletant, la bouche débordante d'une poignée de saucisses crues qu'il mâchonne à grands coups de mâchoire. Son museau humide traîne sur le masque bleu et descend aussitôt vers les croquettes. Excité, la queue folle et les oreilles dressées, il essaye d'avaler pour libérer sa gueule. Berreg se redresse mal, le repousse à peine. Les Lanyshtas terrorisés brandissent leur arme et plissent les yeux pour comprendre ce qui se passe.


Berreg s'exclame : Des saucisses, Kaboum ! Où as-tu trouvé ces putains de saucisses ?!

Nyan : Quoi ?

Extralucida se retourne. Elle pointe du doigt une silhouette, à trois mètres là-bas. Leurs yeux s'adaptent à la lumière. Une porte est ouverte sur un quarantenaire aux yeux cernés, encore habillé, comme un artiste, les mains tâchées d'encre. Il tient une bougie dans une main, et dans l'autre, une poignée de saucisses qu'il mâchonne en pointant sur le groupe ses yeux désabusés.

« Messieurs dames ? Quand comptez-vous... »

Ils bondissent. Aussitôt le gros Touty lui enfonce sa marmite sur la tête et le bouscule à l'intérieur. Les Lanyshtas s'y précipitent et referment la porte derrière eux.

Nyan jette un coup d'oeil à Extra : C'est lui ? C'est quand même pas lui ? Extra, hein ?

La voyante emmêle une mèche entre ses doigts : Hi hi... Il correspond un peu à la description donnée par le Président...

Berreg : Tu t'es... trompée de porte ?!

Extralucida : J'y étais presque, hi hi. On dirait que j'ai mal dosée avant le départ. La prochaine fois je ferais mieux. Hi hi hi !

L'adrénaline les as rendus fous mais le groupe reprend de l'assurance. Ils entraînent le raciste dans sa chambre. Touty retire la marmite, bloque ses poignets pendant que Berreg l'attache au cadran et que Nyan lui ligote les chevilles.

Extra se déchaîne : Le Président est en colère. Crie et je me servirai de ton foie pour lire l'avenir ! Hi hi hi !

« Noonnn ! S'il vous plaît ! C'est inhumain ! »

Berreg ramasse l'oreiller tombé par terre pendant qu'ils le ligotaient. Il grimpe sur le lit... hésite... puis le replace derrière la tête du metteur en scène.

Berreg : Restez calme Monsieur. Détendez-vous.

Extralucida remonte légèrement sa robe, marche sur le lit et s'assoit de profil sur les hanches de Tarok. Les ressorts grincent. Elle se met à sautiller comme une enfant tout en lui pointant vaguement le pistolet sur la tête.

Extra : Le Président est en colère ! Hi hi hi ! Vilain voleur, tu lui dois sacré paquet de fric !

Nyan : Ouais espèce de fils de ta race, et il paraît que t'as écrit des saloperies sur les Lanyshtas ?!

Les yeux exorbités du metteur en scène passent de l'un à l'autre. La sueur commence déjà à inonder son front.


alias Djet Tamère
 
Dassen Dorn
Comitaire actif
Kil'sin  
Le Dhiwara 10 Julantir 816 à 17h13
 
Tarok : Les Lanyshtas ?

On dirait qu'il vient de comprendre quelque chose. Son expression change aussitôt.

Tarok : Mais quel rapport avec mes dettes ?

Extra : Où sont les pierres, Tarok de Lafoir ? Un malheur arrive toujours à ceux qui ne remboursent pas leurs dettes. C'est dans l'ordre des choses.

Berreg : Qu'est-ce que vous avez contre les Lanyshtas, Monsieur ? Vous ont-ils fait du mal personnellement ?

Tarok : Mais je ne sais pas ! Je n'ai pas eu le temps.

Extra : On ne joue pas la montre avec les gens des Dessous, Tarok !

Berreg : Qu'est-ce que vous leur avez dit Monsieur de Lafoir ? Vous les avez mis en colère ? Qu'est-ce que vous avez dit aux Lanyshtas ?

Tarok : Quoi ? Mais mais mais… c'est drôle, heu, justement.. Et des places gratuites pour tout le monde ? Ça ne vous intéresse pas ? Hein ? Ha ha !

Extralucida cesse de sautiller. Elle se décale des hanches vers l'estomac du metteur en scène. Puis elle se penche brutalement vers les jambes de Tarok. D'un coup de mâchoire elle lui mord le nerf à l'intérieur de la cuisse. Tarok se met à hurler de douleur. La voyante est un peu ronde mais elle est agile ; elle se redresse aussitôt et lui fourre son pistolet au fond du gosier.

Extra : Il est bien trop tard pour t'esquiver, Tarok de Lafoir, petit coquin... Dis-moi où est caché ton magot.

Le metteur en scène s'étouffe pour toute réponse.

Berreg : Qu'est-ce qui était drôle, Monsieur Tarok ?! Et qui est-ce ce que ça a fait rire ?!

Nyan : Répondez !

Tarok grogne, tousse et renifle. Il essaye d'articuler quelque chose mais le canon du pistolet rend ces sons inintelligibles.

Berreg soupire : Je crois qu'on ne tirera rien de lui.

Nyan : Ouais. Enlève ton pistolet Extra, je vais le bâillonner.

Extralucida fait la moue sous son masque de bébé. Mais elle essuie son arme sur le bord de l'oreiller et finit par descendre du lit.

Nyan : Qu'est-ce qu'on fait de lui ? C'est un ennemi des Lanyshtas. Il faut lui faire quelque chose.

Extra : On lui coupe les... heu... les pieds.

Berreg : Les pieds ? Mais ça va faire très mal.

Nyan : C'est dégueulasse. Si vous faites ça laissez-moi changer de pièce.

Extra : Oh là là... Alors on le bâillonne et on le pend par les... les pieds au bout d'une corde, à sa fenêtre.

Berreg se tord les mains : Mais... mais... avant que le jour se lève il va rester des heures la tête en bas. On peut peut-être simplement lui faire écrire une lettre d'excuse.

Pour la première fois, le gros Touty ouvre la bouche. Sa voix est délicate. Une petite voix nasillarde et difficile à entendre.

« Je pourrais lui faire un tatouage. »

Extra : Où ?

Nyan : Sur la gueule ? Oh oui, pas con !

Berreg : Hum ! Ce serait comme un message envoyé à tous ceux qui nous haïssent.

Nyan : Et ce sera facile de le retrouver dans la rue.

Berreg : Peut-être qu'il finira par se ranger de notre côté. Il comprendra enfin ce qu'on ressent, nous les délaissés.

Nyan : Je suis pas délaissé.

Berreg : Qu'est-ce que vous en pensez Monsieur Tarok ? Cette punition vous convient ? Vous la comprenez ?

Berreg se penche attentivement sur lui : Hum... je pense qu'il a l'air d'accord. Tu peux commencer Touty. En attendant nous on va piller son appartement.

Touty sort de sa veste deux petites sacoches dépliables dont il extrait ses outils.
La première piqûre est au milieu du front.



Cette nuit-là, les Lanyshtas pillent tranquillement l'appartement du metteur en scène. Extralucida saccage un certain nombre de choses, mais trouve la réserve d'argent (insuffisante). Nyan démonte un pendule et une partie du plancher. Berreg et Molus dérangent et rangent avec méthode tout ce qu'ils trouvent, puis ils dénichent des gâteaux dont ils s'empiffrent, et balayent pour finir, les deux pièces principales, mal entretenues par leur propriétaire.

Vers quatre heure du matin, la porte de la chambre s'ouvre de nouveau.

Touty est sagement assit à côté du lit où gît Tarok, inconscient, la chair enflée. Intrigués, les quatre disputaires s'approchent. Touty redresse alors la tête de sa victime. Et les Lanyshtas retiennent un cri.




La gêne s'installe.


Tout d'abord, personne n'ose parler.


Mais Extralucida perd très vite sa patience.


Extra : C'est drôlement beau Touty ! Je ne savais pas que tu avais autant de talent.

À sa suite ils s'approchent encore pour former un cercle autour du lit. Avec expertise, Touty penche plusieurs fois le crâne de sa victime pour mettre en avant son travail. Sans un mot il effleure d'un doigt les détails les plus sophistiqués.

Berreg : C'est... C'est...

Nyan : Écoutes Touty. C'est beaucoup trop classe. Comment tu veux qu'on prenne cette punition au sérieux ?

Berreg : Je pense que l'idéal Touty, ce serait que... que tu salopes ton travail. Mais une saloperie d'artiste, tu vois ?

Un infime soupir se glisse hors du masque de Touty.

Nyan : Oui, par exemple un gros texte en travers du visage.

Berreg : Un texte très simple. Peut-être juste un mot.


Ils réfléchissent. Moment d'hésitation.



Extra : LANYSHTAAAA !

Tous les regards se tournent vers l'hystérique.

Mais l'un après l'autre, ils hochent la tête d'un air grave.


Nyan : Là, on comprends.


alias Djet Tamère
 
Dassen Dorn
Comitaire actif
Kil'sin  
Le Dhiwara 11 Saptawarar 816 à 15h25
 
Trois derniers posts modifiés.

Fin de la dispute.


alias Djet Tamère

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